Chapitre 1

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Avertissement : violence, maltraitance

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1 - Dazai : Vie et mort

Trois ans plus tôt

Aujourd'hui devrait être inscrit sur le calendrier en tant que journée la plus déprimante de l'année. La rentrée, vous vous rendez compte ? Quitter mon lit pour m'asseoir pendant des heures sur une chaise à prendre des notes (ou pas) en attendant que ça passe, ça ne me fait vraiment pas envie. 

Ma mère pose une main délicate sur mon épaule.

- Allez, courage mon grand. C'est un nouveau départ, tu devrais t'en réjouir, non ?

Je lâche ma cuillère, qui retombe dans mon bol en éclaboussant la table, et me retourne brusquement.

- Maman ?

Rien. Je sais qu'elle n'est pas là, mais je ne supporte plus ces illusions douloureuses.

- Maman ?

- Oh, arrête tes gamineries, Dazai.

Je tressaille en entendant la voix de mon oncle - et dorénavant tuteur légal - résonner à l'autre bout de la pièce.

Il s'avance, jusqu'à se trouver en face de moi, de l'autre côté de la table.

- Elle est morte, d'accord ? Ta mère et ton père sont morts tous les deux dans un accident de voiture. Je suis ton nouveau père.

Je baisse la tête, les yeux emplis de larmes. Il me répète ces mots depuis deux semaines maintenant.

- Je m'en fous ! je hurle, hors de moi. Je veux pas de toi dans ma vie ! Maman a toujours dit que tu trempais dans des affaires louches, la justice aurait même pas dû te laisser me garder ! Et je veux savoir où est ma sœur !

Mon oncle se redresse lentement. À la lueur dangereuse de ses yeux, je me demande si je n'ai pas été trop loin.
Il se dirige tranquillement vers le tiroir à couverts, y prend un couteau à viande et revient vers moi sans aucune expression.
Je commence à trembler. Je voudrais partir, mais je suis paralysé par la terreur.

- Tu ne dois jamais dire ça, tu m'entends ? Jamais. Ton devoir maintenant, c'est d'écouter ce que je te dis. Je m'occuperai de ton éducation à la maison, tu n'iras pas à l'école, et tu sortiras quand je te le demanderai. Tu parleras quand je te le demanderai, mangeras quand je te le demanderai, tu ne seras rien sauf si je te dis de l'être.

Je ne comprends que la moitié de ce qu'il raconte. Mon cœur s'emballe tellement que j'ai l'impression d'imploser.

Mon oncle attrape doucement mon bras et remonte ma manche jusqu'au coude. Il place ensuite le couteau sur ma peau.

Je sens la lame froide annihiler tous mes autres sens. J'ai peur. Je n'ai jamais eu aussi peur de toute ma vie.

- Je vais te montrer comment te punir pour cette fois, et ensuite tu le feras tout seul.

Il appuie et laisse la lame entailler ma peau. Une fois, puis deux.

C'est un nouveau départ, tu devrais t'en réjouir, non ?

Non. Cette vie qui commence ne m'a pas l'air réjouissante du tout.

Au bout d'un certain temps, mes larmes s'arrêtent de couler.

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Deux ans et 10 mois plus tard (par rapport au passé)

Deux mois plus tôt (par rapport au présent)

- Tu es sûr de ne pas vouloir manger ?

- Oui.

Odasaku soupire et sors de ma chambre en prenant soin de refermer la porte derrière lui. Depuis qu'il m'a recueilli, il y a quelques semaines de ça, il a plus ou moins réussi à gagner ma confiance, sans pour autant changer mes comportements.

Il faut dire que je suis un cas difficile. Quand je vivais avec mon oncle, j'enchaînais les tentatives de suicide. Il a été abattu par un membre d'une organisation criminelle rivale de la sienne, me laissant encore plus seul que je ne l'étais déjà. Odasaku s'est porté volontaire pour m'adopter, et c'est ce qu'il a fait après avoir obtenu mon accord et celui de la justice. Je ne le connaissais pas, mais j'ai vite compris qu'il était radicalement différent de tout ce que j'avais vécu jusqu'ici.

Cela dit, même lui ne peut pas me faire oublier.

La mort de mes parents, la disparition de ma sœur.
Le premier jour de violence.
Toutes les nuits passées dehors.
Les transactions de stupéfiants, les combats, les poursuites de la police.
Les entailles sur mon corps, de plus en plus nombreuses.
Les larmes qui se mêlaient à mon sang sur le sol.
Les yeux suppliants de ma première victime, la sensation du pistolet tremblant dans ma main.
Ma première tentative de suicide, par noyade. Infructueuse comme toutes celles qui l'ont suivie.

Je me laisse glisser au sol, soudainement épuisé.

Je ne sais même pas ce que je fais ici. Je devrais être mort depuis longtemps déjà.

~~

Présent

Odasaku m'aide à rajuster le nœud de ma cravate.

- C'est bon comme ça ? Pas trop serré ?

Je souris, amusé.

- C'est parfait, arrête de t'inquiéter.

- Hmm. Dans ce cas, en voiture, jeune homme !

J'essaye de me convaincre que mes mains ne tremblent pas. Après tout, je vais au lycée aujourd'hui, pour ma rentrée en Terminale. Je me sens un peu à l'étroit dans mon uniforme. Je ne sais pas encore comment je vais gérer les contacts sociaux qui auront forcément lieu. Si je suis désagréable avec tout le monde, ça devrait suffire, non ?

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Hey ! Voilà le premier chapitre... Il est un peu difficile au niveau psychologique, mais j'espère qu'il vous a quand même plu ! Je tenais à ce que le passé de Dazai soit raconté au début, mais pour la suite je me concentrerai sur la relation du Soukoku.
C'est tout pour aujourd'hui ! Prenez soin de vous ! (~‾‾▽‾‾)~

{Soukoku} Et les feuilles mortes tombèrent dans l'océanOù les histoires vivent. Découvrez maintenant