La rivière

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Belle est luisante sous les rayons solaires d'un après-midi de canicule, la rivière dite « des âmes sœurs perdues » est associée à une légende du village où se trouve sa source. Je n'y crois pas, mais cela ne m'empêche pas de vous la conter :

Un garçon, une fille, venant de familles riches mais inconnus vivaient sur des terres voisines, séparés par une rivière.

Il eut une célébration en l'honneur du roi et les deux filiations furent invités. Et au cours de la danse d'ouverture, les deux regards se sont croisés. Ainsi prit forme pour eux une nouvelle réalité; il n'y avait plus rien, plus personne, seulement cette aura invisible qui les forçait à se rapprocher. L'honoré du jour fit à ce moment-là son entré et, du reste de la soirée, aucun mouvement ne vint consolider les regards qu'ils se lançaient.

Épris et pleins d'espoir, leurs pas les guidèrent jusqu'à la rivière qui devint dès lors le lieu d'expansion de leur inclinaison. Une simple espérance devint un mot, une heure un rendez-vous, un regard une chanson et un signe de main, un baisé.

Contrairement à ce que nous pourrions imaginer, il n'y eut aucune opposition à cette amourette innocente. Une croyance populaire affirme que cette douce inclinaison évoluait en suivant le courant de la rivière. Et, bien plus tard, les dires se confirmèrent.

Un évènement malheureux changea le rêve des tourtereaux en cauchemars. La fille perdit son grand-père dans un accident. Exposés aux conséquences des jeux d'argent chéris par le défunt, la riche famille due se résoudre à rejoindre la vie de la basse-cour.

Le changement de niveau social, inclinant trop violemment la balance, rendait toute espérance d'union impossible. Peut-être fallait-il s'enfuir ? Longeant la rivière, ils espérèrent que celle qui les a réuni protégerait leur amour jusqu'au bout. Mais, cette nuit-là, le ciel pleurait, la rivière ne savait quelle voie emprunter, les amoureux durent se soustraire à se séparer.

Les adieux furent larmoyants et déchirant. Dans ce nouvel univers, brute, réaliste, le temps s'écoulait lentement. Les minutes devinrent des heures, les heures des jours, les jours des mois et les mois, des années. La douleur, l'amertume et le désespoir s'abattaient sur les cœurs, comparables aux eaux de la rivière les moments de tempête.

Celui-ci ressassait les images passées, et celle-là rêvassait à ce qu'aurait été leur futur. Et un jour, les deux cœurs se fortifièrent et les pages tournèrent. La rivière reprit son courant, et ils vécurent heureux jusqu'à la fin des temps, mais pas ensemble.

418 mots,
Prémicius.

Recueil de nouvelles IOù les histoires vivent. Découvrez maintenant