Le pique-nique

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_On se revoit de l'autre côté ? Plaisanta Sophie, au fond de son fauteuil roulant.

Je ris légèrement, tout en continuant de la pousser entre les rayons du supermarché. Nous avions l'habitude de nous séparer pour faire nos courses. Mais, cette fois, nous étions restés ensemble parce qu'elle ne pouvait pas se déplacer seule en fauteuil roulant, du moins, je ne pouvais le permettre.

Le panier de courses posé sur ses genoux contenait divers articles qui serviront plus tard pour un pique-nique. Nous avions décidé d'en effectuer un cet après-midi, dans une prairie en amont de la ville. Je voulais en faire un depuis un long moment déjà et elle aussi. Après s'être rassuré que nous avions bien tout ce qu'il nous fallait pour l'activité, nous nous sommes dirigés vers la sortie du supermarché en passant par la caisse.

Après avoir chargé nos achats sur le siège arrière de ma voiture, j'entrepris de poser ma copine sur le siège avant, sans oublier de ranger le fauteuil dans le coffre avant d'embarquer à mon tour. Le lieu du piquenique étant éloigné, le voyage dura un peu plus d'une heure. Pourtant, je ne vis pas le temps passé car nous avions passé le trajet à discuter de tout et de rien.

Arrivés sur le lieu, je me souviens pourquoi nous l'avions choisi. La prairie s'étendait à perte de vue, un tapis chatoyant de couleurs et de parfums. À chaque pas, l'herbe douce caressait délicatement les chevilles, révélant un monde enchanteur qui s'éveillait sous le doux baiser du soleil. La brise légère chuchotait entre les tiges fleuries, créant une symphonie délicate qui berçait les sens.

Un kaléidoscope de fleurs égayait le paysage. Des coquelicots écarlates et passionnés se dressaient fièrement, leurs pétales frémissant comme des flammes dansantes. Les marguerites, avec leurs pétales blanc pur et leurs cœurs d'or, semblaient sourire au ciel azur. Des campanules bleues, telle une mélodie de velours, se balançaient gracieusement au rythme de la nature.

Les papillons tournoyaient, insouciants, parmi les fleurs, leurs ailes déployant une palette de couleurs vives. Les abeilles affairées, vêtues de rayures dorées et noires, s'activaient avec diligence, récoltant le doux nectar et diffusant un bourdonnement mélodieux. Le parfum enivrant de la prairie flottait dans l'air, une symphonie olfactive qui invitait les sens à s'épanouir. Celui sucré des roses sauvages et des lavandes caressait les narines, tandis que la fraîcheur mentholée de la menthe sauvage chatouillait délicatement les sens.

À l'horizon, de majestueuses montagnes se dressaient, leur silhouette se fondant harmonieusement avec le ciel. Leurs sommets enneigés semblaient toucher les nuages, ajoutant une aura de grandeur à cette scène bucolique.

Au cœur de cette prairie, un ruisseau cristallin serpentait, offrant sa musique apaisante à l'écosystème. L'eau pure et limpide invitait à se laisser porter par sa fraîcheur, tandis que les poissons multicolores glissaient gracieusement entre les pierres polies. Cet endroit était un véritable tableau vivant, une symphonie visuelle et sensorielle qui éveillait les émotions les plus profondes. C'était un havre de paix où l'on pouvait se perdre, se connecter à la nature et trouver l'inspiration.

Ayant choisi le parfait emplacement pour le pique-nique, j'entrepris d'installer toutes les fournitures, ainsi que ma conjointe. Elle était trop faible pour marcher seule, alors je la soutenais doucement, un bras protecteur enroulé autour d'elle. Nous nous sommes assis avec précaution sur la couverture étalée sur l'herbe douce. Le soleil radieux inondait notre petit coin de paradis, créant une atmosphère chaleureuse et réconfortante.

Sophie était pâle, mais son sourire illuminait son visage, m'insufflant une lueur d'espoir dans mon cœur. Le panier d'osier trônait fièrement devant nous, rempli de mets délicieux. Les sandwiches soigneusement préparés étaient enveloppés dans du papier ciré, prêts à être dévorés.

J'avais aidé Sophie à tenir sa salade colorée, mélangeant avec précaution les saveurs sucrées des fruits frais et la fraîcheur des légumes croquants, lui offrant chaque bouchée avec tendresse. Les verres en cristal brillaient à la lumière du soleil, attendant d'être remplis de notre boisson préférée.

J'avais versé avec attention un peu de jus de fruits dans le verre de Sophie, veillant à ce qu'elle puisse en profiter sans se fatiguer davantage. Le parfum des fleurs sauvages caressait délicatement nos narines, ajoutant une touche de douceur à l'atmosphère. Les abeilles bourdonnaient autour des fleurs, ajoutant une symphonie naturelle à notre intimité partagée.

Alors que nous savourions chaque bouchée, les regards de Sophie et les miens se rencontraient, transmettant un amour et une gratitude silencieuse. Les conversations étaient douces et intimes, mêlées de rires complices. Nos mains se trouvaient, unissant nos forces et notre amour malgré les épreuves.

Après le repas, Sophie se reposait doucement contre moi, exténuée mais heureuse. J'admirais la prairie, me perdant dans la beauté qui nous entourait. Les oiseaux chantaient avec une ferveur renouvelée, tandis que le ruisseau voisin fredonnait une mélodie apaisante.

Le pique-nique se prolongea jusqu'à ce que le soleil commence à se coucher, baignant la prairie d'une lumière dorée. Nous nous sommes enlacés tendrement, profitant de chaque moment précieux passé ensemble. Le ciel se parait d'un manteau étoilé, annonçant l'arrivée de la nuit.

Sophie s'était blottie contre moi, cherchant ma chaleur et mon réconfort. Nos mains se sont entrelacées, créant un lien indestructible d'amour et de soutien. Dans cette étreinte, je sentis le souffle de Sophie devenir de plus en plus faible, son cœur battre de plus en plus lentement. Ayant compris ce qui se passait, je resserrais notre étreinte, cherchant à mon tour un maximum de chaleur et de réconfort.

Et c'est dans cette nuit magique que Sophie rendit son dernier souffle, paisiblement, au creux de mes bras.

Les larmes embuèrent mes yeux alors que je sentais son esprit s'envoler vers d'autres horizons. Sa maladie avait été un fardeau trop lourd à porter pour son corps épuisé. Le temps sembla se figer alors que je restais là, étreignant son corps inerte, sentant le poids de ma peine écraser mon cœur.

La prairie silencieuse était témoin de notre amour, de notre perte et de mon chagrin déchirant. La nuit tomba, enveloppant notre tristesse dans son manteau sombre. Le ciel était rempli d'étoiles, mais je ne voyais que Sophie. Les étoiles veillaient silencieusement, éclairant mon chemin solitaire.

J'avais caressé doucement les cheveux de Sophie une dernière fois, lui murmurant des mots d'amour, lui promettant de la garder toujours dans mon cœur.

Ce pique-nique, qui avait commencé dans l'innocence et la douceur de notre amour, prit fin avec une tristesse déchirante. Mais au milieu de cette obscurité, je savais que notre amour ne disparaîtrait jamais. Il brillerait comme les étoiles au-dessus de moi, guidant mes pas et me rappelant la beauté de notre histoire.

1102 mots,
Tracy Franck.

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