Chapitre 33 : L'asile abandonné

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À cet instant précis, nous étions seules dans la salle de classe, pas prêtes à ce qui allait nous attendre.

La page du journal de Sonoko mentionnait déjà quelque chose d'étrange. Il était fait référence à un "photographe démoniaque". Sur le moment, Ryoba et moi échangions un regard perplexe. À moins qu'elle envisageait d'écrire une fiction, pourquoi parler de la peur d'un photographe "démoniaque" ? Le problème était que c'était la seule chose écrite en anglais, et non en japonais. Heureusement, nous savions lire l'anglais.

"Pas de doute. "Evil" est utilisé pour dire démoniaque ou maléfique. Enfin, ce n'est pas un gentil mot," prononçais-je en me redressant. "Il faudrait que tu lui en parles maintenant."

-Bonne idée, répondit-elle en rangeant le journal. Je vais lui laisser un mot pour qu'elle me retrouve sur le toit.

Après cela, nous quittâmes discrètement la salle. Comme convenu, Ryoba laissa un mot de rendez-vous dans le casier de Sonoko.

La journée se passa tranquillement. Et quand vint l'heure de rentrer, c'est dans l'ombre que nous attendions que l'apprentie détective trouve le mot. Ryoba lui avait donné rendez-vous sur le toit à dix-sept heures trente.

Je me rappelais encore de cet idiot de membre du conseil des élèves qui nous avait précisé l'interdiction d'aller sur le toit au-delà de dix-sept heures. C'est pourquoi j'avais conseillé à Ryoba que le rendez-vous se fasse dans un endroit discret. Elle m'avait répondu qu'il aurait lieu derrière une espèce de grosse machine avec des hélices de ventilation. Pour éviter les soupçons, nous avions aussi décidé que je resterais loin de la conversation. Après tout, Ryoba n'avait pas besoin de moi.

Quand l'heure fut venue, je restai à l'académie. J'étais au deuxième étage, dans la cage d'escalier qui menait au toit. Les portes étaient grandes ouvertes, et je doutais que les deux filles fussent en train de discuter.

Il fallut attendre presque vingt minutes pour enfin voir Sonoko descendre et quitter les lieux. Son visage semblait empreint d'une certaine inquiétude, comme si la conversation l'avait profondément marquée. Elle s'empressa de partir.

"J'espère que Ryoba ne l'a pas menacée, ou quelque chose du genre..." marmonnai-je en la regardant partir.

Puis, ce fut au tour de Ryoba de descendre. Contrairement à l'apprentie, elle ne semblait nullement affectée.

"Alors ?" lui demandai-je en m'approchant d'elle.

Ryoba se contenta de secouer la tête avant de me faire signe de la suivre. Nous quittâmes l'école dans un silence pesant, sous un ciel orange et nuageux.

Nous marchions ensemble dans les rues, croisant quelques voitures. Mais à part cela, la rue était calme. Je détestais ce silence. Il fallut attendre une dizaine de minutes avant que la novice s'arrête et se tourne vers moi. Ses yeux semblaient vides, comme d'habitude. Cependant, j'avais freiné mon pas, fronçant les sourcils en croisant son regard.

"On est assez loin, je vais t'en parler," prononça-t-elle.

...

"Un asile abandonné... ?"

-C'est un asile qui se trouve à la sortie de la ville. Il est fermé depuis des années. D'après elle, le fameux photographe s'y trouve.

-Et ce type piège des jeunes filles pour prendre des photos compromettantes d'elles ?

-Sakanoue s'est fait avoir par lui. Et elle aurait vu des sacs avec plein d'appareils photo et des tirages. Elle n'était pas la première victime.

-Wow, quel fils de... Et donc, si j'ai bien compris, elle veut que les photos disparaissent ?

{ YS } Le NEW Double Jeu : 1989Où les histoires vivent. Découvrez maintenant