Jeune femme de tout juste dix-huit ans, Melinoë est hantée pour le souvenir d'un homme qu'elle a vu assassiner son père onze ans auparavant. Ce fantôme de son passé ressurgira un beau jour pour lui sauver la vie. Un homme mystérieux, sans nom, qu'el...
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Assise sur le bord du lit, je scrutais cet homme qui m'avait hantée pendant si longtemps. Il portait toujours le même costume noir et son gabarit était resté inchangé en onze ans. La seule différence notable, maintenant que j'avais retrouvé mes souvenirs, était la longueur de sa chevelure et la légère barbe qui recouvrait ses joues. À l'époque, ses cheveux étaient bien plus courts et son visage était nu. D'ordinaire, j'avais constamment quelque chose à dire ou une insulte à balancer, ici, j'en étais tout bonnement incapable. Aïsha bougea enfin, se levant de son siège, elle marcha en direction du nouveau venu, le bruit de ses talons sur le sol se mêlant aux cliquetis du ventilateur au dessus de nos têtes. J'observais ses longues braids noires se balancer tranquillement dans son dos au rythme de ses pas. Elle portait constamment ce style de long manteau, bien que celui-ci fut pourpre au lieu de noir.
— Tu es sûr que tu veux que je te laisse t'occuper d'elle ? demanda-t-elle à l'homme en trois-pièces. Elle est vraiment difficile.
— C'est bon, ça ira, ne t'en fais pas, tu peux rentrer chez toi. Merci d'avoir veillé sur elle pendant tout ce temps. J'ai une dette envers toi, maintenant.
— Je t'en prie, ça n'a pas toujours été simple, mais j'ai été plutôt contente de le faire, au final. Je t'apporterai ces affaires au plus vite et si j'ai besoin de quelque chose un jour, je te le ferai savoir.
Je ne pus retenir un haussement de sourcil en entendant cela. Elle avait été heureuse de s'occuper de moi ? Ce n'était pas ce qu'elle avait laissé paraître durant cette dernière décennie. Je n'avais obtenu d'elle que de la froideur et du désintérêt. Pas un seul instant je ne m'étais sentie apprécie, même un peu, par cette femme glacée comme la morte elle-même. La femme noire marcha ensuite jusqu'à la porte avant que je ne l'arrête sur le pas de celle-ci en me redressant vivement de ma place.
— Tu vas vraiment me laisser ici avec un inconnu, Aïsha ?! T'es pas sérieuse ! Comment tu peux être sûre que je suis vraiment en sécurité avec lui ?!
— Nos chemins se séparent ici, j'ai rempli mon rôle, j'espère que tu pourras t'apaiser avec le temps. Au revoir, Melinoë.
Sur ces adieux distants, elle referma la porte derrière elle, me cédant à cet homme en costume sans hésitation. Mon sang bouillonnait dans mes veines. Quelques secondes plus tôt, elle annonçait avoir été heureuse de s'être occupée de moi et elle m'abandonnait aussi facilement ?! Comment voulait-elle que je puisse croire à ça avec une telle attitude. Elle avait beau sembler connaître ce type, moi, ce n'était absolument pas mon cas ! Rien ne disait qu'il n'allait pas me faire du mal après tout !
— Comment est-ce que tu te sens ? m'interrogea-t-il d'une voix posée.
— Ça va comme quelqu'un qui vient d'être abandonné avec un anonyme qui a buté son père onze ans plus tôt ! Et c'est vous qui m'avez changée et attachée au pieu ?!
