Chapitre 8

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    Debout en face de la porte d'entrée de l'appartement de Dazai, Chûya souffla un coup. Son cœur battait si rapidement qu'il crut qu'il allait sortir de sa cage thoracique. Il se mordit un peu la langue, se demandant si c'était une bonne idée de venir ici ou s'il faisait une énorme bêtise. Il ferma les yeux quelques secondes, replaça correctement ses gants et son chapeau nerveusement. Puis, il prit son courage à deux mains et toqua contre cette satanée porte. Il ne fallut que quelques secondes avant que la porte ne s'ouvre et ne laisse place à Dazai.
    Dazai sourit en le voyant et se décala afin de le laisser entrer. Il lui fallut pourtant cinq bonnes secondes avant d'entrer, bien trop surpris de l'allure négligée de Dazai. Il portait des vêtements plutôt décontractés : un t-shirt large gris, avec un short de la même teinte. Il était plutôt simple de voir les courbes de son corps. Ses mollets fins étaient recouverts de bandages, tout comme ses avants-bras. Ses clavicules aussi étaient bien apparentes, même si elles étaient elles aussi surplombées de bandages. Mais ce qui marqua le plus Chûya fut le manque de filtre chez Dazai à cet instant précis. Bien que souriant, il ne prenait pas la peine de lui cacher sa fatigue évidente. Ses yeux ambrés étaient cernés et son sourire n'était pas aussi grand que d'habitude. Malgré tout, il semblait bien plus sincère, moins forcé, moins fier. Un vrai sourire heureux, comme si le voir le rendait heureux.
    Chûya en fut décontenancé. Lui qui s'était préparer à se retrouver face au Dazai hautain et joueur qu'il avait l'habitude de connaître, il avait l'impression de se prendre une claque. Cependant, il ne parvint pas à dire si ceci le rassurait ou l'inquiétait. Dazai avait-il besoin de repos et de prendre du temps pour lui ? Travaillait-il trop ? Ou bien, il venait peut-être de le réveiller ? Il se posa tout un tas de questions dans ce style. Mais il ne pourrait pas avoir de réponse, du moins pas maintenant.
    Une fois qu'il fut entré dans l'appartement, Dazai referma la porte derrière lui.
    – Je suis rentré d'une mission il y a une heure à peine. Je me suis douché et j'ai pris les premiers vêtements qui venaient. J'ai tout de suite voulu préparer à manger... Je n'ai même pas encore fini à vrai dire, lâcha Dazai avec un petit rire.
    – Tu as besoin de te reposer ? Si c'est le cas, je peux repasser demain et te laisser dormir, lâcha Chûya avec un regard soucieux.
    Dazai écarquilla les yeux avant de secouer la tête de gauche à droite avec énergie. Bon... Il était peut-être fatigué, mais il n'avait pas perdu son énergie débordante. C'était au moins ça, n'est-ce pas ? Dazai restait lui-même, et Chûya ne put que se sentir rassuré à cette idée.
    – Non, non, non ! Justement, je t'attendais avec impatience, s'exclama-t-il avec un sourire un peu plus franc.
    Chûya cligna des yeux, quelque peu bouche-bée. Puis, il se pointa du doigt, comme pour avoir une confirmation de ce que Dazai disait. Avait-il bien entendu ? Dazai ricana avant de lui prendre la main avec délicatesse. Ce contact fit se crisper Chûya, qui serra la mâchoire. Il ne se dégagea pas pour autant de son emprise.
    – Oui, toi ! Allez, viens !
    Dazai entraîna Chûya avec lui dans la cuisine et ne le lâcha que lorsqu'ils arrivèrent devant la gazinière. Il se remit alors aux fourneaux, d'où émanait une douce et agréable odeur d'épices et de tomate. De son côté, Chûya observait les lieux, les joues rougies. Il ne savait pas trop comment agir. Devait-il laisser Dazai faire ou devait-il le repousser ? Tout s'embrouillait dans sa tête. D'ailleurs c'était comme si son corps réagissait avant même qu'il ne prenne le temps de réfléchir. Néanmoins, cela ne le dérangeait pas tellement au fond. Agir sans réfléchir et se laisser aller étaient des choses qu'il ne faisait que peu. Il ne s'autorisait ceci qu'avec Fyodor ! Alors, pour une fois, il pouvait bien le faire avec quelqu'un d'autre, non ?
    Il tourna un peu sur lui-même, scrutant de ses prunelles bleues chaque petit détail de l'appartement. C'était un endroit plutôt sobre et sans grandes décorations à vrai dire. Mais l'endroit restait chaleureux.
    – Comment tu te sens, demanda finalement Dazai tout en cuisinant.
    – Mh... J'ai passé une dure journée, mais je dirai que ça va. Mh... Et toi ?
    – Comme je te l'ai dit, j'ai dû faire une mission. Je dois avouer que ce n'était pas de tout repos ! Malheureusement, je pense que tu comprendras que je ne peux pas t'en parler davantage. Nous sommes ennemis...
    Chûya ne put réprimer un sourire.
    – Je comprends, je comprends... Et, qu'est-ce que tu cuisines ?
    – Une bolognaise, s'exclama Dazai avec joie. J'avais tellement envie de manger ce plat, alors je me suis dit que ça serait sympa pour l'occasion !
    – Tu n'as pas encore mangé alors qu'il est déjà minuit ?
    – J'étais pas chez moi, et puis je voulais manger avec toi, s'exclama-t-il en haussant les épaules. Et toi ?
    Chûya sourit un peu plus et ses joues prirent des couleurs. Il secoua négativement la tête en guise de réponse. Cette situation semblait si naturelle, si... normale. Pour la toute première fois, Chûya n'avait pas l'impression d'être un terroriste. Non, il se sentait étrangement... Bien ? Un peu plus humain ? Comme si Dazai voyait au-delà du monstre, du terroriste ou même de l'arme qu'il était. Comme dans leur enfance. Il se sentit apaisé et vu à sa juste valeur. Encore une fois, ce n'était une chose qui n'arrivait qu'avec Fyodor.
    Soudain, il sentit que deux bras entourèrent sa taille et un menton se posa sur son épaule. Surpris, il sursauta et tourna légèrement la tête : ses yeux rencontrèrent les prunelles ambrées de Dazai, qui souriait. Il ne put que sourire faiblement.
    Cette situation était bien trop banale, trop normale. Il aurait pu s'y sentir bien, s'il ne se souvenait pas que Dazai l'avait abandonné. Il déglutit et serra les poings, ce n'était pas l'étreinte chaleureuse et rassurante de Fyodor, mais celle perturbante de Dazai. Malgré ça, il se sentait heureux. Il ne savait pas vraiment comment réagir.
    – À quoi tu penses, demanda Dazai avec douceur.
    – Rien... Rien. Ce n'est pas important.
    – Tout est important en ce qui te concerne, Chûya, déclara Dazai avec un sérieux sans faille.
    – Arrête ça, murmura-t-il en rougissant un peu plus. Et lâche-moi, bordel.
    Dazai ricana, et une douce chaleur grandit dans le bas ventre de Chûya. Il détourna le regard.
    – Tu ne m'as jamais interdit la drague...
    – Mh... C'est vrai mais...
    Chûya ne prit même pas la peine de finir sa phrase. Il soupira et tenta de cacher les rougeurs sur ses joues en baissant la tête. Dazai continua de l'observer un instant, le sourire aux lèvres, avant de lui déposer un doux baiser sur la mâchoire. Chûya fronça les sourcils.
   – Putain de merde, lâche-moi où je te crève les yeux, s'exclama-t-il avec agacement alors que son cœur s'emballait.
    Dazai ricana.
    – Oh oui ! Je serai ravi de me faire crever les yeux par tes magnifiques, délicates et douces mains, clama alors Dazai avec joie.
    Chûya lâcha un grognement et donna un coup de coude dans ses côtes. Il lui lança un regard sévère mais Dazai ne réagit qu'à peine. Il se tourna à nouveau vers la gazinière et ricana. Puis, il commença à servir leur plat.
    – Le repas est prêt !
    Il prit les deux assiettes, à présent remplies de pâtes bolognaises, et, avec un air charmeur, il regarda son invité.
    – Mon cher, si vous voulez bien me suivre.
    Chûya leva les yeux au ciel avant de le suivre. Ils allèrent dans le salon et Dazai posa les assiettes sur la table à manger.
    Le salon était bercé dans une douce lueur tamisée, avec un fond de musique plutôt faible, mais présent. Enfin, la table était parfaitement présentée, et une bouteille de vin rouge était posée dessus. Juste à côté se trouvait de magnifiques roses rouges. Chûya devait reconnaître que les efforts que faisait Dazai étaient touchants. Il n'aurait pas cru qu'il ferait tout ceci pour lui. Uniquement pour lui.
    – Tu peux t'asseoir, murmura Dazai en constatant qu'il ne bougeait pas d'un pouce.
   Chûya cligna des yeux avant d'acquiescer. Il s'installa en face de Dazai et regarda le plat, qui sentait particulièrement bon. Puis il releva son regard vers Dazai, qui le regardait toujours. Il souffla.
    – Arrête avec ce sourire, marmonna-t-il d'un air faussement embêté.
    – Je suis simplement heureux d'être avec toi Chûyaaaaa !
    Chûya leva les yeux au ciel.
    – J'espère que c'est bon, répondit-t-il simplement en montrant le plat afin de changer de sujet.
    Il mima une grimace et Dazai fit les gros yeux.
    – Tu doutes de mes compétences culinaires, s'indigna Dazai de manière théâtrale.
    Chûya le regarda, silencieusement. Il ne savait pas quoi répondre, alors il laissa sa question en suspens. Finalement, il prit ses couverts et toucha les pâtes avec.
    – Mh... Oui.
    – Oh mon Dieu !! Mais goûte, goûte ! Tu vas voir, c'est super bon !
    Lâchant un petit rire, Chûya prit ses couverts et commença alors à manger, sous le regard curieux et amusé de Dazai. Il prit une première bouchée et il eut une explosion de saveur. C'était réellement un délice ! Il prit alors une seconde bouchée et il vit le sourire de Dazai s'agrandir.
    – Alors ?
    – Espère d'impatient, marmonna-t-il avec froideur.
    – S'il te plaît Chûyaaaaaaaa ! Réponds-mooiiiiii, c'est important pour ma survie !
   – C'est mangeable, rétorqua-t-il avec un amusement non-dissimulé.
    Après ça, le repas passa plutôt rapidement et dans la bonne humeur. Les deux jeunes hommes discutèrent de tout et de rien. Ils évitaient les sujets comme la mafia et les anges. Ils apprenaient doucement à se redécouvrir l'un l'autre comme si les sept ans qui étaient passés n'avaient jamais existé. Ce soir-là, Dazai apprit que Chûya adorait la poésie, notamment celle des auteurs français, et qu'il pourrait en lire à tout moment de la journée. Quant à Chûya... Il apprit que cet idiot de Dazai avait tout un tas de phrases de drague particulièrement nulles, bien qu'amusantes, dans son stock. Ainsi qu'une imagination sans fin... Plus les minutes passaient, plus il buvait, plus il avait du mal à garder sa façade froide.
    Ils ne virent pas le temps passer. Une quarantaine de minutes plus tard et avec plusieurs verres de vin bus, les deux jeunes hommes s'étaient retrouvés à continuer leur longue et passionnante discussion dans le canapé. Le masque froid de Chûya était tombé, laissant place à sa sensibilité. Dazai en avait été surpris, mais il n'avait fait aucun commentaire. Ils étaient plutôt proches à présent, et c'était plutôt déconcertant. Dazai était mi-assis mi-allongé dans la longueur du canapé, les jambes tendues et le haut de son dos contre l'accoudoir. Chûya était installé sur lui, allongé, ses jambes de part-et-d'autre de sa taille, comme si le plus grand était son propre matelas. Ceci avait bien fait rire Dazai sur le coup. Leurs pupilles brillaient, et de grands sourires ornaient leurs visages. Dazai avait bien remarqué que Chûya était plus détendu : l'alcool y était très certainement pour quelque chose.
    – Et tu vois... Fyodor, il aime bien Nikolaï, Chûya lâcha un rire amusé, mais cet idiot ne le respecte même pas ! Pourtant il l'aime... Ducoup Fyodor attend. Il attend de savoir quoi faire. Il m'a dit qu'il ne voulait pas perdre Nikolaï mais qu'il se sentait emprisonné dans cette fausse relation... Ça me rend triste, très triste, et je ne sais pas quoi faire pour l'aider... Je ne veux pas le voir triste... J'aime son sourire.
    Il fit une moue adorable, et Dazai ne put s'empêcher de sourire encore plus. Il leva un bras et replaça avec délicatesse une mèche de cheveux rousse derrière l'oreille de Chûya.
    Il avait rapidement constaté, lors de leur repas, que Chûya ne tenait absolument pas l'alcool. Il n'avait fallu que quelques verres d'alcool, deux ou trois précisément, pour qu'il commence à divaguer. Et bien que cela amusait quelque peu Dazai, il lui avait strictement défendu de repartir. Il ne voulait pas que Chûya ait d'accident ou autre. Il faisait donc attention à lui, l'écoutant déballer tout un tas de petites choses plus ou moins importantes.
    – Ils me rappellent un peu toi et moi, finit-il par dire dans un murmure.
    Dazai fut surpris ; il pencha la tête.
    – Vraiment ? Pourquoi ?
    – Bah, tu vois... Quand on avait quinze ans, on était quand même vachement proche, même si on disait le contraire... Et j'ai toujours eu envie d'embrasser tes lèvres, de les goûter... Mais par fierté je n'ai jamais rien fait ! Et voilà là où ça nous a mené... Aujourd'hui je te déteste autant que je t'aime.... Je ne peux pas m'empêcher de me dire que ça pourrait arriver à Fyodor. Je veux juste le voir heureux... Il ne mérite pas de souffrir pour un idiot posséssif comme Nikolaï.
    Dazai entrouvrit les lèvres, médusé par les mots de Chûya. Il ne savait pas réellement comment réagir à ces mots. Il comprenait que Fyodor et Chûya étaient proches, mais il n'arrivait pas à voir toute l'étendue de leur relation. Cependant, il ne pouvait pas ignorer ce qu'il lui avait dit : il avait voulu l'embrasser. Un grand sourire se dessina sur son visage alors qu'une douce et chaleureuse sensation apparut dans son bas ventre. Euphorique de savoir que ses sentiments étaient partagés. Il effleura alors les lèvres de Chûya de son nez.
    – Aujourd'hui... On peut rattraper ça, non, proposa-t-il en ancrant son regard ambré dans celui de Chûya.
    – Je ne veux pas t'embrasser, marmonna Chûya en rougissant.
    Dazai ne pouvait s'empêcher de le trouver terriblement adorable à cet instant.
    Il se redressa afin de s'asseoir convenablement dans le canapé. Il posa ses mains sur ses hanches et le replaça correctement sur ses cuisses. Leurs lèvres se frôlaient et leur souffle se mélangeait. Leurs bassins étaient proches, très proches même... Trop proches. Pourtant, aucun des deux ne bougea.
    – Qu'est-ce qui te dit que je n'en ai pas envie, murmura Dazai d'une voix suave.
    – Je... Tu m'as abandonné...
    Ses yeux se mirent à briller de larmes. Dazai tenta de le rassurer en souriant.
    – Mais aujourd'hui, on est ensemble. Regarde, tu es là, sur mes genoux... Chûya, j'ai vraiment envie de t'embrasser.
    – Moi aussi... Mais je ne peux pas.
    – Pourquoi ?
    – Parce que tu n'es qu'un con... Et... Et...
    – Et ?
    Chûya se tut un instant et Dazai lui offrit un sourire taquin.
    – Putain, embrasse-moi idiot !
    Aussitôt, Dazai prit le visage de Chûya en coupe et plaqua ses lèvres sur les siennes avec passion, amour et envie. Chûya répondit sans perdre de temps, mouvant ses lèvres à un point qu'il pourrait lui faire perdre la tête. Il déposa ses mains sur les avant-bras de Dazai et s'y accrocha, alors que leur baiser devint de plus en plus torride et langoureux. Leurs langues se trouvèrent rapidement, dansant inlassablement ensemble. Sept ans qu'il rêvait de ce moment, qu'il pensait illusoire jusqu'à la semaine dernière. Et voilà que ce soir, il embrassait celui qui hantait ses pensées depuis le tout début. La chaleur dans son corps grandissait peu à peu, et Dazai rapprocha un peu plus son corps contre le sien. Ils s'embrassaient à en perdre haleine et ne voulaient pas se détacher du corps de l'autre. Ils se sentaient si bien, pourquoi se séparer ?
    Après un long et langoureux baiser, ils se séparèrent et reprirent leur souffle. Mais Dazai ne perdit pas de temps et vint embrasser la mâchoire de Chûya, descendant peu à peu sur son cou et ses clavicules. Il passa sa langue sur sa peau pâle et brûlante, la lui suçotant, la lui mordillant, faisant davantage monter la chaleur dans la pièce. Mais il ne réagit pas comme Dazai l'aurait pensé.
    – Dazai...
    Il s'arrêta dans son activité en sentant la poigne de Chûya se faire plus forte sur ses avant-bras. Il releva la tête vers lui : Chûya respirait fortement, sa poitrine se levait et descendait au rythme de ses respirations. Ses lèvres rosées étaient légèrement gonflées, à cause de leur baiser enflammé, ses joues étaient rougies et ses yeux bleus étaient larmoyants. Dazai ne parvint pas à déchiffrer son regard : était-il triste ou heureux ?
    – Me fais pas regretter ce que je vais te dire...
    Dazai entrouvrit la bouche afin de répondre, mais Chûya déposa ses lèvres sur les siennes avec douceur avant qu'il ne le fasse, l'empêchant ainsi de sortir un quelconque son. Puis, il se recula après quelques secondes.
    – Je t'aimais Dazai... Tu me rends fou depuis le premier jour. Et tu m'as fait affreusement souffrir. Peut-être sans le savoir, je n'en sais rien.
    Une larme coula sur sa joue et il l'essuya rapidement.
    – Je ne te demande qu'une seule chose : ne te moque pas de moi. S'il te plait.

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Bonjour, bonsoir !
Il y a le premier baiser Soukoku 🤭

Vous en pensez quoi, vous ? Ca m'intéresse de savoir ! 👀

A demaiiin 🤭

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