Chapitre 12

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    Trois longues semaines passèrent durant lesquelles ni l'agence des détectives armée, ni la mafia portuaire n'entendit parler des anges en décomposition. Ce qui inquiéta grandement Dazai. Il attendait chaque soir l'arrivée de Chûya avec impatience, mais il ne vint jamais. Les cernes de Dazai grandissaient, tout comme sa mauvaise humeur et son angoisse. Il avait commencé à imaginer tout un tas de choses, comme la potentielle mort de Chûya. Il était presque devenu incompétant, il n'arrivait plus à faire aucune mission. Si bien que Mori lui avait laissé quelques jours de repos forcé, qu'il utilisa pour chercher Chûya. Ryûnosuke était passé une fois en début de semaine, mais Dazai ne lui avait même pas ouvert.
    Il n'était sorti de son appartement qu'aujourd'hui, alors qu'il avait reçu un message étrange de Mori. Ryûnosuke était tombé, soudainement et sans explication, et il ne se réveillait plus à présent. Un peu plus tard dans la journée, ils avaient appris qu'il était arrivé la même chose à Atsushi. Alors, les détectives de l'agence étaient venus et Yosano et Mori avaient essayé par tous les moyens de réveiller Ryûnosuke et Atsushi. Mais rien n'y faisait, ils restaient toujours inconscients, comme plongés dans un coma.
    À présent, Dazai faisait les cent pas dans son appartement. Il était fatigué, inquiet et apeuré pour ceux qu'il aimait. Mori lui avait interdit de rester au travail, prétendant qu'il avait encore besoin de repos, et Fukuzawa avait été d'accord. Sur le coup, il s'était senti énervé, mais il comprenait finalement leur décision. Ils avaient besoin de calme pour trouver une solution. Or, Dazai était totalement paniqué et intenable à cet instant précis. Alors, il s'était résigné à rester dans son appartement.
    De nombreux coups se firent entendre contre la porte de son appartement. Dazai soupira et se leva. Il ne savait pas qui venait le voir à cette heure aussi tardive, mais il n'était pas d'humeur. Lui aussi avait besoin de calme au fond, et surtout, il avait besoin de trouver une solution. Il s'étira rapidement avant d'aller ouvrir la porte. Son regard se posa alors sur la silhouette de Chûya. Il était habillé d'un jean noir plutôt serré et d'un gros sweat à capuche. Ses vêtements semblaient déchirés à certains endroits et il y avait quelques tâches de sang. Son visage était caché par ses cheveux roux, qui lui tombaient sur le devant de la tête, Dazai ne pouvait donc pas voir son visage. Encore une fois, il n'avait pas son chapeau sur la tête.
    Une goutte de sang coula avec lenteur sur la peau laiteuse de Chûya, et lorsqu'elle arriva au niveau de sa mâchoire, elle tomba sur son sweat. Dazai fronça les sourcils.
    – Chûya, tu...
    Il n'eut pas le temps de finir sa phrase que Chûya se jeta presque dans ses bras, entourant son corps de ses bras avec faiblesse. Il tremblait violemment contre lui. Chûya se cala confortablement, le serrant contre lui. Il inspira sa douce et agréable odeur, la tête enfoncée contre son torse. Il ferma alors les yeux, profitant de cet instant de douceur. Dazai fut d'abord surpris, mais après cinq longues secondes il rendit son étreinte et commença à lui caresser le dos.
    Un poids lourd tomba sur les épaules de Dazai, qui paniquait. La réaction de Chûya était étrange, et puis il était persuadé d'avoir vu du sang sur son menton. Son cœur battait rapidement, et sa respiration s'accéléra alors qu'il pensait à tout ce qui aurait pu lui arrivait.
    De son côté, Chûya se sentit plus léger, plus apaisé. Il avait fermé les yeux afin de profiter pleinement de ce câlin, dont il avait affreusement besoin. Il s'en fichait de qui venait cet étreinte, il en avait juste besoin. Il ne souhaitait pas parler, du moins pas maintenant. Dazai semblait l'avoir compris, car il ne prononça aucun mot. Il ne voulait pas brusquer Chûya après tout.
    D'un léger coup de pied, il vint fermer la porte d'entrée avant de s'adosser contre le mur, le gardant dans ses bras. Ils restèrent dans cette position un long moment.
    Après de longues minutes, il sentit le souffle de Chûya se faire de plus en plus haletant. Il baissa alors le regard afin de le regarder. Ce fut à ce moment-là qu'il aperçut le visage de Chûya. Il était très pâle. Sa pommette gauche était surplombée d'un petit pansement, ses lèvres avaient quelques égratignures et du sang s'écoulait en petite quantité de son crâne. Un bandage épais et imbibé de sang recouvrait son œil droit. La panique prit place dans tout son corps. Il vint prendre le visage de Chûya avec une grande délicatesse dans ses mains. Ses yeux brillaient de crainte. Chûya évitait son regard.
    – Qu'est-ce qu'il s'est passé, demanda-t-il d'une voix mal assurée.
    – C'est... C'est rien. C'est juste... Je suis désolé, murmura Chûya d'une faible voix en essayant de contenir ses sanglots.
    – Hey... tu n'as pas à t'excuser, mon Chûya, déclara Dazai en déposant un baiser sur sa tempe. Si tu ne veux pas en parler, c'est pas grave ! Tu veux qu'on fasse quelque chose ? Tu as faim ? Ou, tu veux peut-être qu'on aille se reposer ? Tu as besoin que je te soigne ?....
    Chûya haussa les épaules et soupira, laissant quelques larmes couler sur ses joues. Ses larmes se mélangèrent à son sang et tombèrent sur ses vêtements, il ne prit même pas la peine de les essuyer.
    – Peu importe je crois, tant que je suis avec toi.
    Dazai vint lui ébouriffer les cheveux. Puis, il lui prit la main et entrelaça leurs doigts. Ils se dirigèrent dans le salon et s'installèrent dans le canapé, côte à côte. Ils continuaient de s'étreindre avec douceur et tendresse, Chûya semblait en avoir grandement besoin.
    Chûya n'avait rien dit sur son état physique. Il continuait d'ailleurs de garder la tête baissée, comme s'il essayait de cacher son visage du mieux qu'il le pouvait.
    Mais, après encore de longues minutes, Dazai posa une question qui lui brûlait les lèvres.
    – Ils ne te font aucun mal, hein, demanda-t-il avec inquiétude.
    – Comment ça ?...
    Chûya releva la tête avec lenteur et finit enfin par le regarder.
    – Fyodor, les anges... Ils ne te font pas de mal ?
    Chûya esquissa un sourire quelque peu triste et secoua négativement la tête, mais Dazai resta toujours aussi inquiet. Il avait un mauvais pressentiment.
    – Absolument pas !.... Ce sont mes amis, ils ne me feraient pas de mal. Et surtout pas Fyodor. C'est juste que j'ai eu..... On a eu.... Il s'est passé un truc, disons. C'est pour ça que je n'ai pas pu venir plus tôt d'ailleurs... J'ai à peine trouvé le temps de dormir et de manger, soupira-t-il en venant reposer sa tête contre l'épaule de Dazai.
    Dazai déglutit et il resserra inconsciemment ses bras autour du corps de Chûya. Pour la toute première fois, il ne réagit pas négativement à ce contact. Dazai aurait aimé que ce soit pour une bonne raison. Mais il se doutait que cela venait du fait qu'il était exténué.
    – Qu'est-ce qu'il s'est passé, demanda-t-il.
    Cette question fut suivie d'un très long silence, durant lequel Dazai se demanda s'il avait bien fait de poser cette question. Après tout, il se trouvait dans le camp ennemi. Il eut envie de se fracasser le crâne contre un mur face à son manque évident de tacte. Mais, contre toute attente, Chûya lui répondit.
    – Il y a eu un problème, parmi les anges... Une dispute.
    – Entre qui ?
    Chûya lâcha un soupire et se redressa correctement afin de regarder Dazai dans les yeux. Son regard bleu brillait de terreur et de tristesse, comme si ces trois semaines avaient détruit toute joie.
    – Entre Fyodor et Fukuchi... Fukuchi n'a pas les mêmes projets que Fyodor, et... Deux camps se sont créés. Fyodor, Sigma, Nikolaï et moi, contre Fukuchi, Tetchô et Teruko... Il y a eu... Des sortes de fusillades, si je peux dire ça comme ça, et... Et il y a eu des blessés, c'était... Un vrai carnage. On a dû se replier et fuir. C'est vraiment la merde. Même s'ils n'étaient que trois, ce sont de vrais monstres... On a plus rien, tout est resté entre les mains de Fukuchi. Je me demande même si cet enfoiré n'avait pas tout prévu depuis le début...
    Dazai écarquilla les yeux et, alors qu'il écoutait ce qu'il lui disait. Il se souvint soudain de ce qu'il s'était passé un peu plus tôt dans la journée du côté de la mafia et de l'agence.
    – Atsushi et Ryûnosuke... Ils sont tombés dans le coma, murmura-t-il en réfléchissant à toute allure. En même temps ! Mori n'a rien pu faire, pas même Yosano...
    – C'est Fukuchi, rétorqua Chûya en soupirant. C'est avec lui que Victor Hugo est. Alors, il a certainement usé du don d'Hugo, sachant qu'il avait le contrôle sur les esprits de Ryûnosuke et Atsushi.
    – Donc c'est bel et bien à cause de son pouvoir... Putain !!
    Chûya baissa la tête d'un air honteux. Dazai ne le laissa pas faire et il prit son visage en coupe. Il le regardait avec inquiétude.
    – Tu es blessé ? Je veux dire, gravement ?
    – Un peu, mais ça va. Sigma a essayé de me soigner avant que je ne vienne ici.
    – Je vais quand même te soigner !
    Il n'attendit pas de réponse et se leva. Il se précipita dans la salle de bain avant de revenir auprès de Chûya avec une trousse de secours. Il s'installa en face de lui et commença à l'ausculter. Chûya se laissa totalement faire, fatigué.
    Il commença par son œil. Il retira son bandage avec délicatesse et le posa sur la table basse. Il se pinça les lèvres en voyant la blessure de Chûya.
    – Je... Teruko m'a planté un couteau dans l'œil, se sentit-il obligé de préciser.
    – Si je la croise, je l'égorge, répondit Dazai avec sérieux. Je vais faire au mieux, mais ça risque de piquer.
    Chûya acquiesça lentement et Dazai commença à le soigner. Une fois bien désinfecté et plus ou moins soigné, il lui fit un bandage tout neuf. Il prenait son temps et faisait très attention à chacun de ses mouvements. Puis, Il passa à une autre des blessures de Chûya.
    – Et les autres, ils vont comment, demanda-t-il après de longues minutes de silence.
    – Fyodor a perdu un bras... Fukuchi le lui a tranché, soupira Chûya avant de se pincer un instant les lèvres. Nikolaï n'a que des blessures superficielles, comme moi, et Sigma a une cheville cassée. Mais, à part ça, on est en vie. Je suppose que c'est le principal...
    – On peut peut-être vous aider, proposa-t-il en posant un coton imbibé de sang.
    – Justement... C'est principalement pour ça que je suis venu, annonça alors Chûya avec sérieux. Je viens en tant que membre des anges en décomposition, du camp de Fyodor. On a besoin que tu fasses passer ce message à Mori : demain, à vingt heure, on viendra avec un drapeau blanc. On aimerait parler à Mori et à Fukuzawa. On sera là sans armes, évidemment.
    Dazai se pinça les lèvres et acquiesça vivement. Il lui caressa avec douceur la joue avec douceur.
    – Je leur dirai, je préparerai tout ça.
    Chûya lui fit un petit sourire et Dazai vint coller son front contre le sien. Après quelques minutes sans avoir bougé, Chûya leva l'un de ses bras et vint placer une mèche de cheveux de Dazai derrière son oreille, faisant rire ce dernier. Il esquissa un petit sourire et fit glisser son index sur la peau de Dazai. Il passa sous l'oreille pour rejoindre le coin de sa mâchoire. Il glissa jusqu'à son menton avant de remonter afin d'effleurer ses lèvres, puis son nez. Pour finir, il déposa délicatement sa main sur sa joue et il entrouvrit ses lèvres.
    – Tu m'as manqué, murmura-t-il. Mais crois pas que je suis incapable de vivre sans toi, hein.
    Dazai esquissa un sourire, amusé.
    – Mais maintenant tu es là, avec moi... Et je suis tout à toi.
    Sa voix suave fit frissonner Chûya, qui se mordit légèrement l'intérieur de la joue en le regardant. Il était bien trop fatigué pour réellement s'énerver contre lui. Et puis, il était perdu. Mais c'était à cause de la fatigue, non ? Il acquiesça lentement, et cette fois-ci ce fut Dazai qui prit la parole.
    – Tu m'as aussi manqué, mon Chûya... J'étais terriblement inquiet, et je le suis toujours, à vrai dire.
    Il finit de le soigner et il rangea son matériel médical. Puis, il reprit Chûya dans ses bras.
    – Mh... Oublions ces trois semaines, oublions ce qu'il se passera demain, murmura Chûya. Et profitons simplement de notre soirée ensemble.
    Un sourire se dessina sur le visage de Dazai, et Chûya ne put réprimer un sourire, lui aussi.
    – C'est une merveilleuse idée, répliqua-t-il alors en venant frotter son nez à celui de son compagnon. Qu'as-tu en tête pour nous ?
    – Je ne sais pas trop, je me laisserai bien aller... Et toi ?
    – Comme tu l'as si bien dit tout à l'heure : peu importe, tant que je suis avec toi.
    Chûya lâcha un ricanement passer ses lèvres et il baissa le regard sur ses lèvres.
    – Embrasse-moi, foutu Dazai... Embrasse-moi avant que je ne change d'avis.
    – Avec plaisir...
    Alors, il fondit avec amour sur Chûya, qui répondit sans se faire prier. Leurs lèvres se mouvaient à l'unisson avec sensualité et lenteur. Les deux jeunes hommes firent passer toutes leurs émotions au travers de ce baiser : amour, tendresse, passion, envie. La chaleur monta lentement entre eux, se laissant peu à peu consumer par l'envie. Ils prenaient leur temps, profitant simplement. Chûya passa ses mains autour de sa nuque et se rapprocha un peu plus de lui dans le but d'approfondir leur échange langoureux. Dazai sourit contre ses lèvres alors qu'il vint placer ses mains sur ses joues avec délicatesse.
    Ils se séparèrent après quelque temps. Il vint déposer ses lèvres sur le cou de Chûya. Il commença à embrasser sa peau laiteuse. Chûya soupira de plaisir et laissa sa tête tomber en arrière. L'envie grandissait encore et encore, leurs corps se rapprochaient un peu plus et la chaleur grimpait en flèche dans la pièce. Pourtant, lorsque Dazai passa une main sous son gros pull à capuche, touchant du bout des doigts sa large cicatrice, il se figea soudainement. Il se crispa et attrapa la main baladeuse de Dazai avec fermeté. Il repensa à Fyodor...
    – Non. S'il te plaît...
    La plainte de Chûya était faible et lorsque Dazai l'entendit, il se stoppa instinctivement. Il planta son regard dans celui de Chûya, inquiet. Chûya avait perdu toute assurance. Ses lèvres tremblaient, son souffle était rapide, son œil semblait être embrumé de larmes et sa poigne sur le poignet de Dazai était toute tremblante.
    – Qu'est-ce qu'il y a ? Je t'ai fait mal, demanda-t-il avec appréhension.
    Dazai pensait déjà à tout ce qu'il aurait pu faire pour le blesser, son cœur battait rapidement. Chûya secoua négativement la tête avant de baisser le regard, tout penaud.
    – Je... Je ne suis pas prêt à aller plus loin, murmura-t-il. Je peux accepter certaines choses... Mais pas ça, c'est encore trop tôt.
    Dazai retira sa main de sous son vêtement et vint prendre ses mains dans les siennes. Chûya releva le regard vers lui, timidement, et il lui offrit un sourire tendre et doux.
    – Il n'y a aucun problème à ça, ne t'en fais pas, d'accord ?
    Chûya acquiesça lentement. Toute joie, même infime qu'elle soit, semblait avoir disparu de son visage.
    – On n'est absolument pas obligé d'aller plus loin !
    – Vraiment ? Ça ne te dérange pas ?...
    – Mais oui, ça ne me dérange absolument pas ! Le plus important, c'est que je sois avec toi, ajouta-t-il en venant déposer un doux baiser sur ses lèvres. Le plus important, c'est que tu te sentes bien.
    Chûya sourit doucement et revint poser sa tête sur son épaule. Il semblait rassuré. Il se blottit contre Dazai, qui déposa un doux baiser sur le haut de son crâne. Son torse se soulevait au rythme de ses lourdes respirations et des battements effrénés de son cœur. Ils se câlinèrent avec amour.
    – Je t'aime, mon Chûya, annonça-t-il soudainement.
    Chûya ne répondit pas tout de suite. Il se pinça les lèvres avant de soupirer. Il ferma les yeux.
    – Je crois que... Je crois que je t'aime aussi, saloperie de Dazai...

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Et voilà le second chapitre d'aujourd'huiiiii 👀🙈

Pauvre Chuchu... 😢

A demaiiiinnnnn!

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