𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟐𝟑

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˚⊱ Le gruau stagnant de mes synapses anémiées, dont se repère mon esprit vorace.⊰˚




IFE


Je me suis réfugiée dans le parc de la ville, comme je le faisais souvent lorsque j'étais enfant. Mais cette fois-ci, tout est différent, quelque chose vient de se fissuré et plus rien ne sera jamais pareil.

Un silence pesant enveloppe le parc désert, seulement brisé par le léger grincement des chaînes de la balançoire et le craquement occasionnel de la neige sous mes pieds.

J'ai l'impression d'être destiné à porter le fardeau de ma propre existence afin de permettre aux autres de vivre pleinement la leur.

Le monde autour de moi est si vibrant, si plein de vie, et pourtant, je me sens détaché, comme une ombre errant dans une réalité qui ne m'appartient plus.

Après ce qui semble être une éternité d'introspection, je décide de me lever. Je récupère mon sac qui était à mes pieds, puis reprend ma route. L'hiver a récemment pris ses quartiers, recouvrant tout d'un épais manteau blanc. Les dernières traces de l'automne sont visibles sous forme de quelques feuilles jaunies. Tout comme elles, les habitants de ce quartier tombent un par un, emportés par le vent qui véhicule l'odeur du néant.

— Eh mais c'est pas la petite Hemming ? Crie une voix gâter par la drogue.

— Non, tu rêves !  D'après ma source sur elle est partie chez les Bourges jamais elle ne remettrais un pieds ici. Lui répond une autre encore plus désagréable.

Je baisse aussitôt la tête, accélérant le pas comme si de rien n'était.

Ils ne sont pas méchants, ce sont des teneurs de murs habituels qui passent leur temps à se droguer et à sécher les cours. Le plus jeune d'entre eux a 14 ans, je le connais bien parce que c'est le petit frère d'une fille que je considérais comme mon amie. Mais elle n'a pas hésité à me tourner le dos quand son crush de l'époque, que j'avais recalé, s'est mis à m'humilier quotidiennement pour se venger.

Quand il a commencé à faire courir des rumeurs insensées sur moi, elle n'a rien dit pour me défendre, bien qu'elle connaissait parfaitement la vérité.

En parlant du loup, on en voit le museau. La voilà qui arrive, poussant une poussette contenant un bébé endormi. Dans sa main gauche, elle tient son sac de cours, tandis que dans la droite, une cigarette à peine entamée se consume lentement. Les flocons de neige tombent doucement sur son afro qu'elle arbore fièrement, tandis que sa peau ébène est mise en valeur par la lumière chaude des lampadaires.

— Clark, on rentre ! hurle-t-elle . Maman nous attend... Oh Ife, t'es revenue à ce que je vois !

—    Ça va Faith ? Demandé-je

—   T'as pas duré longtemps chez les Blancs ou ils se sont rendus compte que tu étais une salope, crache-t-elle avec toute la haine qu'elle a pour moi. T'as sucé combien de queues là-bas, ou laisse-moi deviner, t'as encore fait ta sainte pour attiser la pitié ?

C'est quand même très grave la capacité que l'être humain a de se convaincre que les mensonges qu'il raconte sur les autres sont vrais, juste pour ne pas assumer qu'il a merdé et qu'il est mauvais.

CARELESSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant