Speedrain [Terminer]

Chapitre 33 : Vrille.

La faille. Où mon cœur noir et sombre en pleine explosion. Un raz de marée, où un tremblement de terre. Une tempête sans fin et incontrôlable qui m'anime et ne me lâche pas... Je ne suis plus rien, sans elle. Mais j'ai vrillé de la plus lamentable des façons possibles et je le sais. Je dois m'éloigner d'elle, car je l'ai déjà bien assez détruite comme ça... Mon père et Mickaël ont raison. Je suis un raté. Un putain de raté incapable de la rendre heureuse. Elle avait besoin de plus que ça. Plus qu'une vie minable dans un appart pourri en train de se filmer dans des courses de merde. Et c'est tout ce que j'ai à lui offrir, parce que je refuse de faire mieux, et que je n'arrive pas à évoluer dans le monde que je voulais nous ouvrir.

J'en ai rêvé mille fois, de cette popularité. Cette gloire où je nous voyais déjà, elle et moi, sur le podium des meilleurs comptes. En train de vloger nos sorties où nos vacances à l'autre bout de monde. À rider sur la route 66 sur une Harley Davidson qu'on aurait partagé. Putain oui, j'en ai rêvé... Mais tout ce que je lui ai apporté, c'est de la violence, des menaces, de la peur... Un monde dans lequel je refuse de l'emmener. Un monde où les seringues se battent avec les litres de vodka bon marché, et où les murs son semblable aux déchets de la société qu'on est. Mais on ne les voit même plus, tant la dose injectée est forte. Voilà où on en est. Où j'en suis et où je sais qu'elle ne me pardonnera jamais et elle aura raison. Je dois partir, et la laisser déployer ses capacités, car je sais à quel point elle est exceptionnelle et talentueuse.

J'ai pleuré, en voyant la facilité déconcertante avec laquelle elle a gagné cette course de niveau A, tout en enfumant ses concurrents de plusieurs mètres. Et je suis devenu fou, en voyant les pros l'approcher. Je me suis sauvée pour regagner un squatte que j'avais déjà repéré sans jamais sauter le pas. Les joints me suffisaient, mais maintenant, il m'en faut plus. Et j'en ai tellement honte que je préfère m'en cacher. Assis, perdu sur ce siège de voiture trouée, amorphe... Je joue avec les débris restants au sol alors qu'une autre dose m'appelle déjà. Je veux crever, pourrir ici avant de devenir comme eux. Avant de devenir aussi violent qu'eux, car j'ai peur de m'en prendre à elle, qui représente tout pour moi. Dans cette famille, l'ensemble des hommes sont des monstres.

Je pensais que mon demi-frère était un ange, au vu de l'accueil qu'il m'a fait, lorsque je l'ai retrouvé, un soir dans une ancienne usine désaffectée ici, à Atlanta. J'avais découvert son existence dans le bureau de mon père, avec un curieux dossier qui portait son nom. Quelques photos y trônaient, et des annotations qui m'ont vite fait comprendre que mon père avait eu une vie avant ma naissance... Avant Lise, ma mère.

J'ai 23 ans et lui en a 31. 8 ans nous séparent. Ses années où mon père a vécu une vie de débauche avec cette femme, Ally. Avant qu'il ne l'abandonne à l'annonce de cette grossesse non désirée. Et qu'il décide de rester avec Lise, ma mère qui lui offrait une vie de sécurité et un foyer chaud pour masquer des démons.

Ce frère qui semblait être un ange pour moi, et qui répondait pourtant présent que lorsque j'avais besoin de m'enterrer un peu plus dans mes ténèbres... Qui a vrillé lorsque j'ai voulu suivre Kiara, ma lumière et que je lui ai dit que lui aussi, pourrais trouver la sienne. Qu'il n'était pas obligé d'être dans les dangers constants qu'apportent la vente de drogues et les règlements de compte. Mais lui, c'est ça qui le fait vibrer.

Exercé un foutu pouvoir presque maladif sur la ville et nous, les déchets dont je fais partie. J'ai voulu le sauver en même temps que moi, mais lui as voulu m'enterrer un peu plus profondément et il a fini par réussir, aujourd'hui. Tout ce que j'ai fait, c'est refuser de lui servir de tueur foudroyant. Il souhaitait profiter de mes talents sur la route pour pulvériser ses ennemis, d'une balle invisible, élancé et perdu dans la circulation. Mais je ne suis pas un putain de meurtrier et je ne le serais jamais.