🍂 PROLOGUE 🍂

568 59 34
                                    

Les journalistes locaux furent les premiers sur les lieux afin de quadriller la zone bien avant que les premiers véhicules de la police n'arrivent à leur tour. Tous avaient déjà la tête aux gros titres, se battant pour essayer de gratter le petit truc en plus qui pourrait alors tout changer sur cette affaire sans avoir conscience qu'il n'y avait pas grand-chose à se mettre sous la dent. Pas plus cette fois que pour les fois précédentes. Après tout, ce n'était que le septième corps que l'on retrouvait sans explications, comme si, à cette saison, les cadavres s'étaient subitement mis à sortir tout seuls de terre, à l'exemple des carottes arrivant à maturité.

De toute évidence, ce n'était pas un spectacle plaisant à voir, car les vers, toujours au rendez-vous pour ce genre de festin, avaient encore une fois fait des merveilles en rendant le travail d'identification ardu et certains petits brigadiers prenaient d'ores et déjà les paris quant à savoir combien de temps cela prendrait cette fois. Une semaine ? Deux peut-être ? Un mois ? C'était bien la seule chose qui allait alimenter les discussions pour la journée, au grand damne du commissaire Kylian, à peine plus frais aujourd'hui qu'il ne l'était la veille. Tout le monde au poste savait qu'il buvait et qu'il entretenait une relation toute particulière avec la bouteille, peu importe sa forme et son contenu, du moment que cela lui brûlait l'œsophage.

– Est-ce que l'on en sait plus sur les causes du décès ? demanda-t-il en s'accroupissant à hauteur du légiste en plein travail.

– Difficile à dire. Les vers et autres asticots ont savouré chaque petite partie de ce pauvre homme et je n'en saurais plus qu'à partir du moment où j'aurais amené cette pauvre âme sur ma table.

– Donne-moi quelque chose à dire à ces vautours qui attendent là-bas. Eux aussi ont faim.

– Je ne suis pas magicien, Kylian. Ne peux-tu pas te contenter de dire ton charabia habituel ?

Si seulement cela pouvait suffire et contenter ces messieurs les journalistes. Il fallait dire qu'en l'espace de trois mois, c'était déjà le septième corps retrouvé dans la région et certains esprits éclairés avaient, depuis longtemps, compris qu'il se passait quelque chose d'étrange dans le coin. Certes, des gens disparaissant dans la région, ce n'était pas ce qu'il manquait : des randonneurs faisant fi des mises en garde et des interdictions, des amateurs d'urbex, des touristes constamment à la recherche de lieux atypiques. Bref, des idiots pareil, la police en comptait à la pelle et il était fort probable que le "glaçon" ici présent en faisait partie, toutefois il y avait dans ce cas quelque chose d'étrange.

– Tu crois vraiment qu'ils vont se satisfaire de cela ? siffla le commissaire.

– Utilise donc ton charme naturel pour... Charmer cette bande de vipères, plaisanta le légiste en lui faisant de grands signes de tête, A ta place, je me dépêcherai, ils ont l'air avides de détails bien morbides !

– Je ne comprends même pas comment on peut vivre sur le dos du malheur d'autrui, pesta Kylian en se redressant. Ils se nourrissent de ça.

Ce n'était pas tant l'affaire qui fascinait l'assemblée de journalistes réunis, mais plutôt l'histoire qui l'entourait et la légende qui en naissait à chaque nouvel article sur le sujet. Retrouver un corps au beau milieu de la montagne, c'est une chose merveilleuse. Un corps que l'on ne peut identifier, une chose fascinante. Mais le septième d'une série ? Voilà un mystère qui valait bien la une et l'attention de tous. D'autant plus quand celui-ci se trouvait être le septième malheureux que l'on retrouvait non loin du manoir de Castelroc.

Le manoir étant tout ce qu'il restait d'une grande tragédie.

Tout ce qu'il resteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant