Chapitre 9

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C'était fou l'impact qu'une bonne nuit pouvait avoir. Je me sentais revigorée le matin suivant, prête à prendre à bras-le-corps la suite de mes enquêtes. Juste après mon départ de la banlieue nord de Simargue, je m'étais arrêtée à la première cabine téléphonique venue pour joindre Doniel. J'étais tombée sur son répondeur et lui avais fait part de ma découverte du jour. Il aurait plus de facilité que moi à déterminer l'identité de cette « Delcour » que j'avais suivie.

Comme quoi, faire partie de la maison, ça aide quand même...

N'ayant pas de nouvelles dans la matinée, je présumais qu'il n'estimait pas avoir besoin de me contacter. J'aurais pu rester près de chez moi pour guetter le téléphone, mais ça ne me ressemblait pas. Ce faisant, je choisis de poursuivre ma surveillance. Après tout, qui sait ce que Maxime Chappelle dissimulait d'autre ? La scène de la veille était sans équivoque, il y avait une relation d'ordre sentimental entre ces deux personnes. Et mon petit doigt me soufflait que cette fille fréquentait l'université de Simargue.

Là, ça devenait tout de suite plus croustillant.

Les histoires entre prof et élève étaient vieilles comme le monde, mais elles exhalaient souvent un parfum de scandale, notamment en raison de la différence d'âge qui existait entre les deux.

Il était encore trop tôt pour tirer des conclusions, toutefois la piste paraissait intéressante. Elle permettrait certainement de mettre au jour un pan de la vie de Maxime Chappelle qu'il n'était possible d'observer qu'en le filant de près.

Néanmoins, mon enthousiasme fondit au fil de la journée, qui s'écoula sur un rythme semblable à celui de la veille. Je passai plus de temps à poireauter autour de la fac qu'à suivre activement ma cible, sans jamais apercevoir la fille Delcour. En soi, ça n'avait rien de surprenant, l'endroit était si vaste que les chances de la croiser par hasard étaient faibles. J'appelai deux fois Doniel au poste, mais il devait être en vadrouille quelque part en ville.

Ce ne fut qu'à la troisième tentative, vers 17 h, qu'il décrocha le combiné.

— Major Fulgrace à l'appareil, j'écoute.

— Don, c'est moi.

Il marqua un temps d'arrêt, puis répondit à voix basse :

— Ah, tu tombes bien. J'ai mené ma petite enquête et j'en sais plus sur le nom que tu as trouvé hier. Où es-tu ?

— À ton avis, gros nigaud ? Je suis dans une cabine à deux pas de l'université. Le neveu Chappelle est en plein cours, j'ai tellement de temps à tuer que je me suis dit que j'allais t'appeler pour tailler le bout de gras.

— Épargne-moi tes sarcasmes, merci. Chacun son boulot, le tien c'est de coller au train de cet homme.

Ouh là, il a pas l'air commode.

Plutôt que de lui rentrer dans le lard, je préférai jouer l'apaisement.

— Qu'est-ce qui t'arrive, Don ? m'enquis-je. Y a un truc qui va pas ?

— C'est rien, je t'assure.

— Hé, on me la fait pas, à moi. T'as pas l'air dans ton assiette, et j'aime pas ça.

Je l'entendis soupirer.

— Écoute, mêle-toi de ce qui te regarde, d'accord ? rétorqua-t-il sur la défensive. Restons concentrés sur Maxime Chappelle.

Il me renvoya dans les cordes et ça, j'appréciais encore moins. J'avais envie de comprendre pourquoi il était aussi ronchon. Que je le veuille ou non, une part de moi s'inquiétait pour lui.

Le prix du passéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant