Treizième chapitre

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Enfin les vacances. Voilà bien longtemps que je n'ai pas désiré fêter Noël. Le 24 au soir, nous restons toutes les deux avec ma mère, elle n'a même pas évoqué l'idée que mon père se joigne à nous, elle savait très bien comment j'allais réagir. Et c'est très bien ainsi. J'ai donc acheté pour ma mère, une magnifique broche avec un oiseau, un petit livre sur les plantes médicinales et un coffret de parfum. J'ai emballé tout ça dans un jolie papier cadeau aux couleurs de Noël et je les ai glissé sous le sapin. L'après-midi, nous avons fait des biscuits au chocolats et nous avons voulu tester le lait de poule. Mais après un demi verre, nous l'avons jeté, c'était immonde et cela nous a bien fait rire. Je passe un merveilleux moment, très complice avec ma mère. Et puis voilà l'heure du repas. Je file m'habiller. J'ai acheté le week-end dernier, une très jolie robe en velours vert foncé. Je l'accommode comme il faut, puis, me coiffe. J'essaye tant bien que mal de faire quelque chose de jolie avec ces cheveux fins et courts. J'attache derrière ma tête, avec une pince très mignonne, deux petites mèches qui me tombent sur les yeux. Ensuite, je me les maquille légèrement et ça y est, je suis prête. Je descends en même temps que ma mère, et je souris. Elle est très en beauté. J'ai le cœur léger en cette fin d'année particulière.

La soirée se passe à merveille, chapon et pommes de terres confites. Et en dessert, une bûche divinement bonne. Je pense soudain à mes grands-parents. Ceux du côté de ma mère, je ne les ai jamais connus, trop occupée à insulter leur fille sur les origines de son époux. Qui aurait pu croire que des gens méprisaient les hongrois ? Et puis mon père ne travaillait pas dans une immense entreprise à son nom. En ce qui concerne mes grands-parents paternels, ma grand-mère est décédée quand j'avais dix ans et mon grand-père l'a suivie, ne pouvant vivre seul sans elle. Une magnifique preuve d'amour. C'est dans ces moments comme Noël qu'ils me manquent le plus. Me retrouver si seule il y a un an et demi a été tellement douloureux, ma mère comme seul alliée. Pas de famille et plus d'amies. Tante Timea et oncle Balint, je ne les ai pas vu depuis cinq ans, après leur départ pour la Chine. Ma cousine Eszter les a suivis. Et puis, la Hongrie ce n'est pas la porte d'à côté. Nous y sommes allées, après tout ce cauchemar, ma mère m'a fait visiter des endroits magnifiques, mais le souvenir de mon père dans ce pays était trop important. Alors nous sommes parties en Italie quelques mois. Pendant un an, voyager m'a permis d'oublier. De l'oublier. Et de m'oublier au passage... Je sors de mes pensées quand j'entends ma mère crier à tue tête :

— Oh merci ma chérie, j'adore, il est super !

Apparemment le livre lui plaît. Moi, j'ouvre mon premier cadeau : Un pyjama en satin jaune. Il est superbe. Un album photo, avec un petit mot : «pour ta nouvelle vie». Je souris. Un sac à main pour aller me balader en ville avec mes nouvelles copines. Et en dernier, un livre, comme un carnet, vierge. Sur la première page il y a juste marqué : «Mon histoire». Et ça devient mon cadeau préféré. Une sorte de journal intime pour raconter ce qui m'est arrivé. Je suis très touchée et j'enlace ma mère en laissant couler une larme. Nous passons le reste de la soirée à danser sur des musiques de Noël et à regarder des films dans le même esprit. Je suis heureuse, très heureuse. Vers une heure du matin, je file me coucher. Et je m'endors en rêvant à des milliers de choses fantastiques.

Le lendemain, nous sommes invitées à passer le repas de Noël chez les parents de Camille. J'ai d'ailleurs été très étonné quand ma mère m'a annoncé ce dîner. Apparemment, elle s'entend très bien avec Félicia, la mère de mon amie. Vers 13h00, nous arrivons. Camille m'attrape par le bras et nous montons dans sa chambre à toute vitesse. Elle me montre ses cadeaux de Noël, et entre autres, le somptueux fauteuil qui trône désormais dans sa chambre. Nous papotons un long moment avant de descendre déjeuner. Ce repas se passe à merveille, je rigole à n'en plus finir et ma mère sourit à belles dents tout le long. Et c'est alors, en voyant ses yeux s'humidifier légèrement, en observant les parents de Camille, que je pense à mon père. Dans ce moment de fête, d'esprit de Noël, j'hésite à écouter ce qu'il a à me dire. Juste l'entendre, et après, passer à autres choses. Je suis piégée dans un énorme dilemme : parler à mon père ou trahir ma promesse de ne plus jamais avoir à faire à lui. C'est sur ces pensées que je finis ma dernière bouchée de bûche aux framboises...

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