Quatorzième chapitre

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Je descends du bus et ferme mon manteau. Apparemment, le mois de Janvier va être glacial. Le portail du lycée devant moi, je m'engouffre dans la foule d'étudiants. Une nouvelle année, et c'est la première fois que j'ai envie de croire aux fameuses résolutions. Je me suis promise de devenir plus forte et de voir où ma relation avec Hugo m'emmènera. Je ne veux plus de cauchemars, de crises d'angoisse. Je veux vivre, je veux profiter et réussir mon bac. Je désire m'inscrire dans des écoles de tourisme et voyager. Bon, pour le moment, je claque des dents et marche dans des flaques d'eau, mais je suis très optimiste à partir de maintenant. Je rentre dans le hall et file devant ma salle de classe. Je rejoins Sacha assise par terre, les genoux repliés contre sa poitrine pour se tenir chaud.

— Sacré chauffage en panne !

Je la salue et m'assois à ses côtés. Soudain, je vois mon amie devenir rouge tomate. Je tourne le regard vers l'escalier, Hash vient de passer, je crois. Je rigole.

— Bon alors, tu as finis ton devoir maison de maths ? Demandais-je à Sacha.

— Pas du tout. Pourquoi fallait-il qu'il nous donne cent pages à faire pour les vacances de noël ?!

— Cinq en vérité, réctifiais-je.

La sonnerie retentit et dix minutes plus tard, le professeur arrive, nous souhaitant la bonne année. Je m'installe au fond de la classe, comme toujours en mathématiques. Sacha tente de venir s'asseoir à côté de moi, quand une voix la fait changer d'avis. Caché derrière elle, Hugo. Plus beau que jamais. Une doudoune noir, des cheveux ébouriffés et un sourire aux coin des lèvres. Il pose son sac sur la table et s'étale sur sa chaise en soufflant. Moi, je ne peux m'empêcher de le regarder. Ses beaux yeux croisent les miens :

— Cette année, j'ai pris de grosses résolutions.

Je le regarde étonnée.

— Lesquelles ?

— Venir m'asseoir à tes côtés à chaque cours.

Je ricane et je me sens rougir.

— Je t'ai laissé trop de liberté ma petite Tris chérie. Je vais te coller comme un chewing-gum à ta bottine.

Je lève les yeux au ciel. Mais c'est ce qui me fait rire chez lui, et toutes ses autres qualités bien sûre. J'ai décidé de me laisser aller avec Hugo. De ne plus me mettre autant de barrière qu'avant. Je crois que cet après-midi au lac m'a fait un électrochoc. Je ne peux pas me passer de lui. Son visage se rapproche lentement du mien, je louche sur ses lèvres. Sa main glisse dans ma trousse et attrape un crayon et vivement, il s'éloigne, sort une feuille de son sac et écrit dessus :

— Il faudrait peut-être que je commence ce devoir maison, enfin, plutôt devoir-de-cours.

Je souris et essaye de me concentrer tant bien que mal. Mais il me distrait. Quelle idée a-t-il eu de venir s'asseoir à côté de moi ? Et pour tous les cours ! Je ne vais jamais réussir à avoir mon bac avec Hugo à mes côtés. Je comprends assez vite que les maths ça le connaît. Il m'aide dans plusieurs exercices et le professeur nous interpelle deux fois car nous « ricanons trop » et que nous ressemblons « à deux enfants qui font des bêtises ».

A la fin du cours, Hugo s'éclipse avec ses amis et je fais de même. Les élèves essayent de se trouver une place dans le hall. Il fait tellement froid dehors que tout le monde souhaite être au chaud. Je glisse ma tête dans le col de ma doudoune et écoute Camille parler de... en fait je n'en sais rien. Mon regard est fixé sur Hugo. Lui, il arbore un air sérieux, très sérieux. Je crois qu'il est en plein débat avec Maxime. Adossé à la porte vitrée, il passe une main dans ses cheveux et je l'observe de loin. Sa mâchoire se contracte, ses lèvres dansent sensuellement et ses yeux sont remplis de joie. Il est beau. Terriblement beau. Pendant toute la pause, je l'admire. Et quand la sonnerie retentit à nouveau, Camille et moi nous dirigeons vers eux, pour prendre les escaliers et monter au deuxième étage. Je marche d'un pas assuré vers lui, son regard se lève enfin vers moi quand j'arrive à sa hauteur. Il me sourit. Mais mon regard se porte sur l'ombre derrière lui. Dans l'obscurité, essayant de se cacher derrière un poteau du préau. Noire, effrayante, glaçante et angoissante. Je n'arrive plus à respirer. Nos regards se croisent et je le reconnais entre mille. C'est Charles. J'en suis persuadée. Trop de fois j'ai cru qu'il était là. Lors de la soirée de Hash et dans la rue. Et maintenant ici. Je ne pourrais pas réellement dire que c'est lui car il est trop loin. Mais le vert de ses yeux me transperce brutalement, me glace le sang. Les mains dans les poches de son long manteau noir, il ne bouge pas. Il me regarde. Je le regarde. J'essaye de comprendre ce qui se passe. Si c'est Charles, ici, qui est en prison à sa place ? Mais cette ombre pourrait bien être un professeur qui était sorti fumer sa cigarette, ou le pion qui nous surveille mais qui ne veut pas entendre brailler dans le hall... Je sursaute violemment en sentant une main me toucher le bras. Je recule de quelques pas et respire beaucoup plus vite que je ne le devrais.

24h de surveillanceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant