Vingt-et-unième chapitre

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— Il s'appelait Charles. C'était mon petit ami.

Hugo m'écoute sans m'interrompre. Il me regarde avec beaucoup d'inquiétude. Je suis prête à tout lui révéler.

— Il est arrivé dans mon lycée en seconde. Nous étions dans la même classe, continuai-je, j'ai tout de suite craqué pour lui. Il était mystérieux et très froid. Bizarrement, j'adorais ça.

J'aperçois un léger sourire sur son visage. Oui, j'ai beaucoup changé.

— Nous nous sommes très rapidement mis ensemble. Il est alors né entre nous, une relation secrète. Je savais que mes amies auraient jugé cette histoire trop rapide, alors, je ne leur ai rien dit, au début.

Soudain, Hugo m'arrête.

— Tu l'aimais?

— Je crois, oui, jusqu'à toi.

Il y eut un moment de silence avant que je ne reprenne mon récit.

— Tout allait bien, je vivais une histoire d'amour intense et dangereuse. Mais au bout d'un moment, j'ai reçu une première lettre. Je m'en souviens encore: «Quelle belle robe rouge». Ce jour là, je portais effectivement une robe rouge. Qui était-ce? Aucune idée. Je n'étais pas très trouillarde, alors je l'ai jetée dans la poubelle.

Je reprends mon souffle. Pour le moment, j'arrive à placer mes mots et à parler. Mais, ce n'est que le début de toute mon histoire.

— Le soir, quand je rentrais chez moi, j'avais cette impression que quelqu'un me suivait. Mais à chaque fois, personne. Quand je fermais mes volets, près du lampadaire, j'apercevais une ombre. Homme ou femme, aucune idée. De plus en plus, cette simple lettre me rendait folle.

— Tu l'as montrée à ta mère ? Me demande Hugo calmement.

— Non, à chaque fois, elles disparaissaient. Quand tout ça a commencé, j'en recevais très peu. En ce qui concerne ma mère, elle s'est renfermée sur elle-même après le divorce avec mon père. Puis, cette situation devenait de plus en plus flippante et sordide. Je voyais des choses étranges, par exemple, ma fenêtre qui était grande ouverte alors que je l'avais fermée. L'eau qui coulait dans la baignoire alors que je n'ouvrais pas le robinet. Les lumières qui s'allumaient et s'éteignaient sans cesse et d'autres visions.

Pendant que je parle, Hugo me regarde. Il m'écoute avec sagesse. C'est à ce moment là que je me rends compte de ce que je fais. Je me mets à nu devant lui. Je me dévoile totalement. Comme il l'a fait avec moi dans ce bar...

— Cette fois, j'en ai parlé à ma mère. Elle m'a ri au nez en prenant pour excuse que je travaillais trop et que mon cerveau me jouait des tours.

Hugo reste ébahit devant cette réaction.

— Ce fut le tour des lettres tachetées de sang. Du sang de porc. Bien sûre, ma mère n'était jamais là quand je les recevais. Après, elles avaient disparu. J'avais vraiment l'impression de devenir folle. Je continuai mon discours la gorge de plus en plus nouée.

— Tu ne l'as jamais soupçonné? Me demande-t-il.

— Après mon séjour à l'hôpital, une amie et moi avons essayé de le piéger.

— Ton séjour?!

— Oui, ma mère m'a fait interner dans un hôpital de psychiatrique. Mais en ce qui concerne Charles. Il était très présent, il me rassurait, j'avais l'impression d'être en sécurité près de lui. Je suis restée une longue et interminable semaine là-bas. J'aurais voulu y rester. Je me sentais bien, je n'avais plus ces lettres, ces cauchemars, ces images... Après tout ça, j'ai tout raconté à mon amie Jude, elle m'a crue sans hésiter. Ca m'a fait du bien que quelqu'un me croit.

— Trina, ta mère t'as fait interner? Elle est complètement folle.

Hugo s'énerve, ses joues deviennent rouges, ses sourcils se froncent. Il est en colère contre ma mère, contre tout le monde, mais surtout contre Charles.

— Oui.

Je ne sais pas quoi dire d'autre. Jamais je ne lui avais parlé de ce fameux moment de ma vie où je me suis sentie plus seule que jamais. C'était trop dur de lui dévoiler ce moment si difficile pour moi. J'ai perdu le fil de mon monologue.

— Hugo, laisse-moi finir s'il te plaît.

— Pourquoi tu ne m'en as pas parlé avant ? C'est très important tu sais ? Ta propre mère ta fait interner dans un hôpital de fou !

— Hugo, s'il te plaît...

Je vois bien qu'il essaye de se calmer, je vois bien qu'il essaye de me sauver, de me venger. Mais c'est trop tard. Beaucoup trop tard. Ce n'est pas de sa faute, mais de la mienne ou plutôt de celle de Charles. Mon petit ami se ressaisit tant bien que mal.

— Nous avions essayé de le démasquer, mais il était trop vicieux pour se permettre une simple erreur. Et moi, je l'aimais, j'avais confiance en lui, je me sentais protégée.

Je reprends ma respiration.

— Mais, durant mon séjour à l'hôpital, je n'ai eu aucune nouvelle de lui, alors quand je suis sortie, je l'ai envoyé balader. Charles n'a pas aimé que je le quitte. Il m'a même menacée, mais je n'avais pas peur, je ne voulais seulement plus de lui dans ma vie.

Je baisse le regard, déboussolée mais libérée d'un poids énorme.

— Mais j'ai eu un déclic à ce moment là. Comme une évidence, tout s'est assemblé dans ma tête. Dès qu'il a posé ses mains sur ma gorge et que j'ai vu son regard changer, ce jour là... J'ai compris...

— Il a ensuite été arrêté par la police. Avec ma mère, nous sommes parties très rapidement. Je ne pouvais plus rester ici, tout me rappelait Charles. Puis il a été en prison. Et j'ai cru que c'était la fin.

Hugo relève délicatement mon menton et me sourit. Moi, j'ai pratiquement les larmes aux yeux.

— Merci Trina. Merci beaucoup pour ce que tu viens de faire.

D'un seul coup, je le prends dans mes bras et le serre fort contre moi. Plus aucun mensonge, plus aucun secret entre nous.


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⏰ Dernière mise à jour : Nov 18 ⏰

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