Never get me [Romance mafia]

Chapitre 14

Reed

Je regarde Levinski entrainer Donovan à l'étage depuis les vidéos de surveillance et putain cette vision me fait dangereusement bouillir. Si je le savais dingue d'elle, je ne pensais pas que cela serait réciproque. Je devrais m'en foutre, mais le possessif en moi prend le dessus. Les femmes que je fréquente couchent avec des tas d'autres hommes et ça ne me fait rien. Je n'ai pas eu l'occasion de la toucher et mon cerveau me crie d'aller l'arracher d'entre les mains de son collègue. Des questions fusent dans mon cerveau : depuis combien de temps ils fricotent ensemble ? Est-ce sérieux ? Est-ce qu'elle prend son pied au lit ? Je veux en avoir le cœur net. J'active la caméra de sa chambre et je les vois sur son lit, à moitié nus à s'affairer aux préliminaires. J'essaie de distinguer un tressaillement de sa part mais elle a l'air pleinement consentante.

Un doigt vient presser sur mon écran, mettant en pause la vidéo.

-Envie d'un peu de voyeurisme ce soir, p'tit frère ?

Je réponds d'un grognement.

-Ou purement jaloux ?

Sa raillerie me fait d'autant plus rager et je dois serrer le poing pour ne pas lui en coller une.

-Qu'est-ce que tu me veux ?

-Le daron arrive.

Comme chaque fin de mois, notre père nous rend visite pour faire un point sur les affaires. Même parti à la retraite, c'est plus fort que lui, il veut garder un pied sur son ancienne entreprise. La porte s'ouvre sur le cinquantenaire à la peau bronzée et ridée par le temps, suivi de deux de ses hommes.

-Ah mes poussins, dit-il en ouvrant grand les bras.

Il claque une bise à son fils biologique avant de venir me faire une accolade. Il n'a jamais caché sa préférence envers moi, quand bien même il n'a fait que me recueillir quand j'étais gosse. Notamment lorsqu'il a décidé de me laisser les rênes de son royaume quand Adan a été assigné comme mon bras droit. Si mon frère affirme qu'il s'en satisfait, je sens bien que son amour-propre en a pris un coup.

-Servez-moi un verre et racontez-moi tout ! Comment se porte notre nouveau bébé ?

-A merveille, assure mon frère. Le demi-million a déjà été atteint.

-Oh rien que ça ? nous félicite-t-il.

Mon père s'assoit sur un de mes fauteuils tandis que Cynthia, qui nous a rejoint avec un plateau de whisky, lui serre son verre. Son œil pétille de fierté et de complaisance lorsque mon frère lui montre les comptes. Quand bien même, je sens la bombe venir.

-Et la côte Ouest ?

Qu'est-ce que je disais... Adan et moi nous nous regardons. Jamais une visite n'arrive sans que Cameron Reed ne mentionne mon échec : celle d'étendre notre réseau sur tout le territoire irlandais. Lorsque nous avons ouvert une maison close à Galway, celle-ci ne nous ramenait aucun client et plusieurs de nos sirènes et de nos hommes de main se sont fait agresser ou ont reçu des menaces de mort. Nous avons été contraints de la fermer. La faute à un seul homme... Borowski.

-Virez-moi ce fils de chien, qu'on n'en parle plus, rouspète mon père.

Plus facile qu'à faire. Le rival derrière notre incapacité à nous étendre est un homme de l'ombre. Il est introuvable et nous ne sommes toujours pas parvenus à mettre un visage sur ce fantôme. A l'époque, il détenait une partie de Dublin mais suite à une histoire sordide de meurtre et de trafic de mineurs, sa tête fut mise à prix par la justice puis il a disparu du paysage. Pour autant, il n'a jamais cessé son business si j'en crois mes employées qui ont travaillé sous son joug. Si moi je ne suis pas un ange, ce type est de la pire espèce et je rêverai de le rayer moi-même de la carte. Je sais que l'occasion se présentera rapidement. Mes hommes sont formels, ils ont reconnu ses sous-fifres rôder autour du Ritz le jour de son ouverture. Depuis, je n'attends qu'une chose : qu'il se manifeste pour négocier je ne sais quel bout de terrain.

-Je suis dessus, affirmé-je à mon père.

Il me regarde de ses yeux perçants mais n'insiste pas. Il connait mes méthodes de travail et sait parfaitement que je ne rentre pas dans le tas sans avoir élaborer une bonne stratégie au préalable. J'anticipe tout et je n'attaque jamais avant d'avoir considéré tous les obstacles.

-Bien... J'ai également un mot de la part de votre mère.

Mon père sort son portable et récite, dépité :

« Dis à mes fils ingrats que je me languis de mes journées et qu'il est grand temps qu'ils me fassent des petits-enfants. Ce n'est pas comme s'ils n'avaient pas le choix, même si je préfèrerais évidemment une femme peu volatile et aux instincts maternels approuvés par mes soins, bien sûr. Je vous laisse encore un an avant que mon cœur ne cède à l'ennui et la frustration. Vous avez assez profité comme ça, vous avez dépassé la trentaine, il est grand temps de vous stabiliser. Bises, votre mère qui vous aime. »

Adan me regarde en roulant des yeux, un sourire en coin.

-Bon, lâche notre père, ce n'est pas que je ne suis pas d'accord avec elle, priorité aux affaires hein. Mais il est vrai qu'il est temps de penser à la suite, j'avais 30 ans quand je t'ai eu Adan et 35 quand je t'ai adopté, Mack. Vous avez quel âge maintenant, 32, 33 ?

-31 et 34, papa, précise Adan.

-Oui, bon, peu importe. N'y a-t-il pas une sirène qui fait battre votre cœur de brutes ?

Une certaine rouquine m'apparaît mais je la chasse de mon esprit.

-Il y en a beaucoup, c'est bien le problème, répond Adan.

-Et bien, faites votre choix, et vite, d'accord ? Votre mère me harcèle tous les jours à ce propos !

Adan me regarde en coin. Lui plus que moi n'est absolument pas enclin à faire des mômes. Je ne m'imagine déjà pas changer des couches et supporter des cris à longueur de journée et lui encore moins. Je mets fin à ce débat et invite mon père à se restaurer mais il refuse, m'affirmant qu'il veut retourner ce soir auprès de sa femme. Incroyable... malgré sa carrière, depuis qu'il a rencontré notre mère 25 ans plus tôt, jamais il ne s'est laissé tenter par une autre femme.

Daniella Swan était danseuse étoile et performait le lac des cygnes à l'opéra de Londres lorsque mon père en est tombé amoureux. Il a demandé à la voir, ce qu'elle a refusé catégoriquement avant qu'ils ne se recroisent à un gala organisé par un ami en commun. Ma mère nous raconte toujours à quel point elle détestait ce « personnage grossier et impétueux » jusqu'à ce qu'elle lui donne sa chance.

Est-ce quelque chose que je vivrais un jour ? Peut-être. Est-ce que j'en ai envie ? Le doute m'assaille et pour la centième fois ce soir, le visage de Levinski m'apparaît. Il faut que je fasse quelque chose. Si baiser sa sosie ne me la fait pas sortir de la tête, je dois la baiser tout court. C'est ça... juste une fois et mon obsession pour elle s'évaporera. Mais pour ça, il me faut un plan et vite. Je saisis alors mon portable et envoie un message à Donovan.