Chapitre 9

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Gabriel rentra seul dans ses quartiers. Il était complètement perdu. D'abord, il apprend par le Président lui même que son compagnon de longue date l'a trompé il y a deux jours. Et ensuite ce même Président finit par l'embrasser presque sous les yeux de sa femme. Qu'est ce qui se passait en ce moment bordel ? 

Et le pire dans tout ça, c'est que Gabriel n'avait pas été surpris par ce baiser, comme si au fond de lui il l'attendait. Son corps n'avait même pas tenté de résister et avait répondu aux caresses d'Emmanuel. 

Il ne savait plus quoi en penser. 

Emmanuel, lui, soit avait honteusement profité de la situation pour obtenir des faveurs de Gabriel, soit il ressentait vraiment quelque chose. Dans les deux cas, Gabriel n'avait rien fait pour le ralentir ou même le dissuader. 

Il s'en voulait d'avoir apprécié ce moment quand 10 minutes avant il s'était retenu d'étrangler Stéphane pour sa tromperie. Il n'était franchement pas mieux que lui. 

Cette nuit là, il ne parvint pas à trouver le sommeil. 

La présence de Stéphane lui manquait mais il n'arrivait pas à s'enlever Emmanuel de la tête. Dès qu'il fermait les yeux il revoyait la scène en boucle, comme si quelqu'un là haut essayait de le narguer. 

Après deux bonnes heures à se tourner et se retourner dans son lit, Gabriel estima qu'il n'allait jamais pouvoir dormir, alors autant rentabiliser son temps. 

Il se leva brusquement, enfila un costume qui sortait tout droit du pressing, ramassa quelques dossiers dans le salon, son ordinateur et se rendit directement à son bureau au palais. Il était peut être 3 heures du matin mais sa journée avait commencé. Son équipe ne serait pas debout avant 6h, il allait rester seul un bon moment. 

Tant mieux, il avait vraiment besoin de travailler dans le calme, sans qui que ce soit autour de lui pour le déranger ou le déstabiliser. Ces derniers temps, il n'avait jamais pu avoir un tel cadre. Il y avait toujours une merde pour tout foutre en l'air. 

Il s'attela au travail pendant des heures, il avançait bien et vite, c'était là une de ses qualités, il aimait travailler, il pouvait rester des heures entière sur un dossier et ne dormir que quelques instants. Tant mieux, en politique il n'y avait pas de temps mort, le travail passait avant tout et ne dormir que deux ou trois heures par nuit ne le dérangeait pas le moins du monde. 

Surtout quand ces derniers temps ça l'empêchait de rentrer et de croiser Stéphane. Ou toute autre personne qui pourrait rôder dans les couloirs. 

– Gabriel ? Déjà levé ? 

Marie avait passé une tête souriante dans son bureau. C'était l'une de ses collaboratrices, qui avait du être surprise de voir la lumière allumée à cette heure là. Même si Gabriel était un monstre de travail, il n'arrivait jamais à ces heures là d'habitude, puisqu'il passait généralement par le bureau présidentiel pour le petit déjeuner ou simplement un rapport. 

Ces derniers temps Emmanuel l'avait beaucoup sollicité, en plus de ses réunions, en bref il n'arrivait pas bien tôt à son bureau le matin. 

– Bonjour Marie, oui je suis en forme. Je travaille sur le dossier du lycée à Bordeaux, répondit-il sans toutefois lâcher son ordinateur des yeux. 

Il avait beau avoir délégué "son" ministère de l'Éducation à son successeur, il ne lâchait pas le sujet pour autant. L'éducation était une priorité centrale, si ce n'est la plus importante, il avait été nommé ministre pour cela à la base et il voulait que dans quelques années les gens louent son bilan. Il faisait donc de ce sujet son cheval de bataille. 

– Bien, je vous ai mis sur l'intranet tous les dossiers à ce sujet. Votre discours est déjà prêt, on l'a relu l'autre jour mais si vous voulez corriger quelque chose, vous me dites. 

Gabriel hocha la tête. Ses collaborateurs faisaient certes une grosse partie du travail mais c'était ensuite à lui de tout valider et d'appuyer sur certains points. Son discours était excellent, Marie avait un véritable don pour l'écriture, pas la peine de revenir dessus. 

Il était plutôt occupé à se faire une fiche de chiffres clés pour faire face à la presse. 

– Au fait, j'ai croisé Brigitte il y a cinq minutes, elle vous invite à déjeuner. J'ai donc décalé le rendez vous de 13h pour le mettre à 14h, rajouta Marie avant de s'installer à son bureau. 

– Merci 

Brigitte avait visiblement peu dormi elle aussi, ou alors elle était partie faire une séance de sport matinale, pour qu'elle croise Marie à cette heure là. Quoi qu'il en soit, on ne refuse pas un déjeuner avec la première dame. 

Et encore moins compte tenu des évènements de la veille. 

Au fil des heures, les bureaux jouxtant le sien se remplissaient et l'Élysée reprenait un rythme de vie normal (qui ne s'arrêtait pas souvent à vrai dire). 

En quelques heures à peine, les couloirs vides et calmes étaient envahis par toute une armée de collaborateurs qui passaient dans les allées du palais, quelques ministres qui venaient pour des réunions ou encore deux ou trois députés qui n'avaient rien de mieux à faire que traîner ici.

Heureusement, depuis 2017, le Président avait viré la presse et les avait plantés dans un local au fond de la cour. Ils ne venaient plus souvent emmerder les élus, au risque de se faire retirer définitivement les accès. C'était un point positif. 

Gabriel sortit de son bureau pour rejoindre Brigitte, avec tout de même une mauvaise impression. Le simple fait d'évoquer avec elle la soirée d'hier ne l'enchantait pas du tout. Mais elle avait raccompagné Stéphane, alors peut être qu'elle avait quelque chose d'important à lui dire. 

Au final, ce ne fut pas le cas. 

Brigitte l'accueilli comme d'habitude, chaleureusement et ils déjeunèrent de bon coeur. Elle était très impliquée dans la cause de l'école et du harcèlement scolaire et elle voulait lui faire un rapport de son entretien avec diverses personnalités de l'Éducation Nationale qu'elle avait rencontrés, et d'autres. 

Elle n'évoqua ni Stéphane, ni leur vie de couple, ni la soirée d'hier soir, pour le plus grand soulagement de Gabriel. Quand ils se quittèrent, elle l'étreignit tout de même avec un sourire désolé et compatissant. 

Cela suffisait à Gabriel, une discussion sérieuse l'aurait profondément gêné. 

Le reste de la journée passa lentement, le déplacement fut chaotique, le transport long et la visite peu intéressante. Mais Gabriel dut faire bonne figure, dire un mot à chaque personne qu'il rencontrait et faire comme s'il était pleinement préoccupé par la perte d'un proche ou autre. Lorsqu'il rentra le soir aux alentours de 23h, il était complètement épuisé. 

Il n'avait pas vu Emmanuel aujourd'hui. Bien sûr ils avaient parlé dans des discussions en commun et quelques mots en privé mais rien de personnel, plutôt des directives strictement professionnelles et Gabriel se serait même inquiété d'un silence radio. Le pays doit continuer à tourner malgré tout et la simple hypothèse où le Président et le Premier ministre se boudent serait catastrophique. 

Lorsqu'il tourna la clé dans son appartement, il fut surpris de voir que la porte était déjà déverrouillée. 

Risquant un pas dans le couloir, il tomba nez à nez avec Stéphane. 

Stéphane, la mine fatiguée, le visage creusé orné de cernes et la chemise froissée, avait aussi à ses pieds deux énormes valises qui avaient l'air d'être sur le point d'exploser.

Il voulait visiblement foutre le camp en douce en pensant que Gabriel ne serait pas là avant des heures. 

Mais il avait été pris la main dans le sac. Regrettable. 



TENTATIONS - Emmanuel Macron x Gabriel AttalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant