Chapitre 9

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Il n'était pas loin de vingt heures quand le lourd véhicule éclaira toute la zone avec ses phares. Je le vis faire plusieurs manœuvres, puis il s'immobilisa. J'attendis que le conducteur vienne frapper à ma vitre. Prudemment, j'abaissai mon carreau, révélant mon sauveur. Ses cheveux sombres étaient plaqués contre son crâne à cause de la pluie, l'eau ruisselait sur son visage aux mâchoires carrées. La vision de cet homme d'une beauté ténébreuse me coupa le souffle. Son regard couleur caramel, ourlé de longs cils noirs, était fixé sur moi. Des tatouages ornaient son cou et ses bras puissants. Le tee-shirt gris qu'il portait épousait son corps musclé, soulignant une silhouette athlétique. Je n'avais jamais vu quelqu'un d'aussi éblouissant, d'aussi... obscur.

— Montez à l'avant de la dépanneuse, je vais m'occuper de votre voiture, lança-t-il sans même un bonjour.

En vitesse, je m'exécutai. En quelques secondes, je fus trempée jusqu'aux os. Je me précipitai dans l'habitacle du véhicule, frigorifiée. Le mécanicien monta Marty sur une plateforme en acier, sécurisa son intervention, et grimpa dans la dépanneuse. Si moi je me plaignais d'avoir été trempée, lui... semblait sorti tout droit d'un fleuve en colère.

— Désolée, lâchai-je involontairement.

— Bah, je suppose que c'est mon boulot.

Il se mit en route. L'odeur de son parfum masculin, si délicieux, se mêla à celle plus sauvage de la pluie. Je me surpris à l'apprécier jusqu'au plus profond de mon être, et surtout à fermer les yeux pour en profiter au maximum. Pendant que le conducteur allumait le chauffage à fond, il lança :

— Alors comme ça, tu connais Adam ?

Sa manière de me tutoyer directement me surprit, puis je réalisai qu'on avait le même âge. Mais plus important encore... que j'avais la sensation de l'avoir déjà vu.

— On est à l'université ensemble.

— Je vois.

— Et vous... travaillez dans un garage depuis longtemps ? questionnai-je, curieuse.

Il me lança un bref coup d'œil, même si depuis tout à l'heure, je remarquai qu'il faisait tout pour ne pas me regarder. Ses lèvres s'étirèrent en un sourire moqueur.

— Environ un an à Raven Hill, mais je me suis formé ailleurs.

Il se mura ensuite dans le silence. Je n'arrivais pas à me concentrer sur la route, mon attention étant perpétuellement attirée vers lui. Je surveillai l'heure sur mon téléphone, et soupirai.

— Un rancard ? ricana le conducteur.

— Non. Dans une heure, la fac ferme ses portes, et un truc me dit que vous n'allez pas réussir à réparer Marty d'ici là... d'ailleurs, je suppose que vous allez vous y coller seulement demain, non ?

— Ouais. On ne s'occupe pas des réparations en astreinte.

Je m'en doutais. Zut. Il continua de sa voix étrangement grondante et sensuelle :

— Ce n'est pas si compliqué de passer au travers des mailles du filet de la police du campus.

— C'est exactement ce que déclarerait un le tueur de cette pauvre fille qui s'est fait assassiner.

Il grimaça sans ajouter quoique ce soit.

— Vous êtes au courant de ça ? questionnai-je un peu gêné. Adam vous en a parlé ?

Il sembla hésiter, puis avoua :

— J'étudie là-bas également, sauf que je rentre chez moi le soir. Ça me permet de bricoler, entre autres choses.

Zel : plumes de chaos (t3) - sous contrat d'édition chez HachetteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant