Chapitre 12

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Terrifiée, je restai debout un long moment, les yeux fixés sur cette tâche de brûlé. L'air sentait de nouveau le pourri, mélangé à des épices. Quand le faisceau d'une lampe torche se braqua dans ma direction, mon cerveau repassa en mode survie. Sans réfléchir, je me mis à courir. Avant même de réussir à mettre de l'ordre dans mes pensées, je franchis la porte de la maison des Psi. Je me pris les pieds dans le tapis de l'entrée et m'étalai par terre. Quelques têtes intriguées apparurent dans l'encadrement du salon, et Vanessa se dressa brusquement, devant-moi.

— Kendra ? Tout va bien ?

— Je... je ne sais pas, je...

Je tremblais encore de tout mon corps. Songer à cette affreuse bête sur le campus me broyait les organes. Est-ce que c'était ça qui avait tué Jennifer ? Sûrement.

Vanessa s'agenouilla devant moi et m'observa, inquiète. Elle remarqua le sang sur mes vêtements, donna quelques ordres aux filles qui se dispersèrent à travers la maison, et glissa une mèche de mes cheveux derrière mon oreille.

— Tout va bien, Kendra, on va s'occuper de toi. Tu es blessée ?

— Non.

Pourtant, j'avais été mordue. Comment ma plaie avait-elle pu guérir aussi vite ?

— Viens, m'entraîna-t-elle avec douceur en direction de l'escalier.

L'adrénaline continuait d'affluer dans mes veines, raison pour laquelle je ne hurlais pas de terreur, même si j'en avais envie. Quand j'arrivai devant une porte marquée d'une plaque dorée affichant mon prénom, mon cœur se calmait et je ne frissonnais presque plus. J'avais survécu. Mieux encore, j'avais battu cette créature.

Tout allait bien. Enfin, presque. Me répéter cette phrase m'aidait à accuser le coup.

— Ce devait-être une surprise, mais puisque tu es là ce soir, m'annonça Vanessa en ouvrant la porte, tu es ici chez toi si tu le désires.

La chambre, essentiellement dans les tons roses et blancs, me tira une grimace. Elle débordait de féminité, peut-être un peu trop. J'aimais porter des boots noirs couverts de piques argentés, ainsi que des vêtements sombres. Je jurais franchement avec la déco. Les murs arboraient des étagères remplies de livres et quelques bibelots, tandis qu'un grand miroir ovale trônait au-dessus d'une coiffeuse. Des rideaux roses légèrement ondulés encadraient la fenêtre. Un lit grand avec une couverture assortie décoré d'une tonne de coussins moelleux me suppliait de me rouler en boule dessus. Je repérai un bureau, un ordinateur portable, un écran de télé accroché sur un mur...

— On prévoyait de te montrer ta chambre après la cérémonie d'intégration, mais vu les circonstances... tu veux me dire ce qui s'est passé ? Tiens, assieds-toi, tu trembles encore comme une feuille.

Je n'arrêtais pas de visualiser les yeux rouge sang de cette affreuse créature, de revoir ses crocs, me déchiqueter le bras. Et son odeur nauséabonde... je m'installai au bout du lit en essayant de contrôler ma nausée. Vanessa m'aida à ôter ma veste en cuir déchirée et je la laissai observer mon bras.

— À qui est ce sang, Kendra ? me questionna-t-elle.

— J'ai... été mordu par un chien.

Un chien, quelle blague.

— Tu n'as aucune marque, Kendra.

Je sentis des larmes couler sur mes joues. Je les essuyai en prenant de grandes et lentes inspirations. Ça m'aidait à mettre de l'ordre dans ma tête.

— Je sais, je ne comprends pas.

Quelqu'un frappa à la porte et Vanessa se leva pour ouvrir. Quelques secondes plus tard, elle me tendit une tasse de thé bien chaude.

Zel : plumes de chaos (t3) - sous contrat d'édition chez HachetteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant