Chapitre 33 (Adrian)

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 Me massant les tempes, le bruit de ses ongles tapotant le cuir du siège me rendait fou. D'un rose vif assorti à sa tenue, ils étaient à son image, vulgaires.

— Arrête avec tes ongles Natalia, c'est en train de me rendre fou.

— Arrête de te plaindre. Je suis obligée de t'accompagner à cette soirée débile, tu pourrais au moins être reconnaissant.

Cela faisait des années que je n'avais pas eu à ramener Natalia à ce genre d'événement, un privilège qui venait de s'arrêter ce soir. Rien n'était plus immonde pour moi que de lui apporter de l'affection, rien n'était plus humiliant qu'elle qui prétendait m'aimer. Malgré mon envie d'être en phase avec celui que j'étais réellement, j'allais devoir reporter ce masque une nouvelle fois. Elle allait une nouvelle fois être témoin de tout ce qu'elle méprisait chez moi.

Avançant d'un pas déterminé en direction de l'entrée du bâtiment, mon cœur tambourinait si fort que la main de Natalia accrochée à mon bras me semblait inexistante. J'avais vu son nom sur la liste des invités, un choc autant qu'une aubaine. J'allais tenter de la récupérer accompagner de ma femme, cela ne pouvait être que la folie d'un homme amoureux.

La porte poussée, mes yeux ne mirent que quelques secondes avant de la repérer, adossé au bar et vêtu d'une robe sublime que j'avais déjà pris grand plaisir à lui ôter. Sans réfléchir, je traînais presque Natalia par le bras pour me diriger dans sa direction.

— Bonjour Garry. Bonjour Kaycee. Je vous présente ma femme, Natalia Volkov.

Mes yeux, voulant à tout prix la regarder sous tous les angles possibles, eu du mal à se retenir tant mon envie était forte. Je ne pouvais enlever mon masque si vite, il fallait être patient, même si j'avais l'impression que mon cœur avait attendu ce moment toute son existence.

— Excusez-moi, vous êtes ?

— Je suis Kaycee Neal, je travaille au service Marketing. C'est moi qui ai géré la promotion de la dernière feature d'Éros.

Ma main, enroulée autour du poignet de Natalia, se serra instinctivement. Peu importe la portée de sa question, il était hors de question qu'elle lui parle, qu'elle la souille de ce poison putride qu'elle produisait à chaque mot.

— Oh le marketing, comme c'est intéressant. lança t-elle en détournant immédiatement le regard dans notre direction, ayant compris mes intentions plus que perceptibles.

Les mots de Gary s'enchainèrent alors que mes yeux luttaient toujours plus pour ne pas la contempler. Après tout, qu'est-ce qui m'empêchait de l'embrasser maintenant ? Pourquoi ne pouvais-je pas juste ignorer le monde qui nous entourait pour enfin dévoiler ce que je ressentais ?

— On va commencer le discours sur scène. Tu nous accompagnes Kaycee ? lui demanda Garry, son sourire niais habituel aux lèvres.

— Bien sûr.

Nous dirigeant vers l'estrade au coin de la salle, je pouvais entendre les bruits de ses talons cogner contre le sol. Ne voyant aucun moment propice ou discuter seuls, la frustration me gagnait. Je ne pouvais arranger les choses devant tant de monde, mais je ne pouvais non plus me résoudre à passer un seul instant supplémentaire sans lui offrir mon cœur.


Enchaînant les éloges grotesques pour tous les énormes portefeuilles présents dans la pièce, Garry arrivait à exceller dans ce qu'il savait faire de mieux, faire semblant. Je pouvais repérer son sourire factice à des kilomètres tant il ressemblait au mien. Je n'étais sûrement pas le seul à le remarquer, tant l'art de mentir devait être maîtrisé par l'ensemble de l'auditoire. Après tout, l'unique point commun entre tous les gens dans la salle n'était peut-être pas l'argent, mais l'art de dissimuler notre humanité.

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