#include <Un livre doit être la hache qui fend la mer gelée en nous ; voilà ce que je crois. FRANZ KAFKA>
TIME / Hiver 2052 / "Présent" +757 jours /
— Tu aimes les livres ?
// La question arrive soudainement. Sans réflexion, sans arrière-pensée. Une interrogation, pure à la fraîcheur singulière et reposante.
/ Je lis beaucoup. De manière compulsive même. Je trouve dans ces réalités de papiers une échappatoire inespérée à la matérialité. Mais est-ce que je lirais si ma vie me suffisait ? Est-ce que je lis par contrainte ? Dans ce cas, est-ce que j'aime vraiment lire ?
— Ça dépend du livre.
/ Comme toujours, Natsumi se met à fixer le ciel. Il est lagon. Il est 12h45. Il est l'heure de ma pause et il m'a semblé important d'en profiter pour emmener Natsumi une nouvelle fois au parc. Il est beau, ce parc. Natsumi est lumière.
— Moi, j'aime tous les livres. Pas toutes les histoires, mais tous les livres. Ils sont reposants. Ils ne font pas de bruits. Ils sont juste là à attendre qu'on les découvre. Et une fois qu'on les ouvre, ils sont capables de te faire quitter ta vie.
/ Elle se tourne vers moi, la boîte de biscuits irisée brille sur son torse. Son visage est illuminé par la pureté des cieux. Le pull que je lui ai donné est NOIR, ça ne lui va pas. Le mien est BLEU, le même exact BLEU que ses yeux. Je l'ai acheté hier. Pour qu'elle me voie en couleur. Mais ça me met mal à l'aise. Très mal à l'aise de visualiser soudain mon corps dans mon champ de vision, comme si je m'étais déshabitué de sa présence.
— Tu me fais penser à un livre, Bilal.
/ L'herbe étincelante est tachée de mon ombre. J'ôte mon bonnet par satisfaction de découvrir les boucles aléatoires de mes cheveux se découper VERT FONCÉ sur VERT CLAIR. Reposant. C'est un beau compliment. Une tiédeur passe sur mon cœur.
— Et moi, qu'est-ce que je t'inspire ?
/ Ce n'est pas du narcissisme. Peut-être même pas de la curiosité. Elle n'espère aucune réponse. Elle ne s'attend à rien, je le sais. Je ne me suis jamais posé cette question, elle le sait. Elle fait naître la spontanéité en moi. Elle fait naître la beauté. C'est par pure bonté. Pure gentillesse. Questionnements après questionnements, elle m'élève.
/ Je lui souris.
— L'air frais.
/ Pas celui de l'hiver. Pas celui du frigidaire. Pas celui de la bruine ni du dentifrice. Pas la fraîcheur du métal ou celle des mains froides. Pas le sorbet sur les gencives. Pas le courant d'air. Pas le vent qui glace, mais le vent qui rafraîchit. Celui qui surgit du brasier de l'été pour caresser la peau. Celui qui cambriole les fenêtres pour assainir l'oxygène. Celui qu'on respire les yeux fermés de bonheur. Celui du matin. Celui qui sent la rosée et l'ORANGE de l'Aurore. Celui qui sent l'herbe coupée et les roses écloses. Celui qui porte le chant des oiseaux et le murmure des arbres. Celui qui traverse l'esprit face à la beauté. La brise de vie qui anime l'existence.
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Les Anges ne vont pas en Enfer
Science Fiction❊ Ce n'était qu'un droïde semblable à cent mille autres. Mais j'en ai fait mon amie, et elle est maintenant unique au monde. ❊ En l'an 2050, la mode est aux...