𝐇𝐚𝐮𝐧𝐭𝐞𝐝 𝐇𝐞𝐚𝐫𝐭𝐬

𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟓

Académie de Magie, 35ème jour de l'Automne.

Après notre dernier cours, je décidai d'aller chercher Orion dans le manoir. Il ne devait pas être très loin : les portes étaient généralement verrouillées, et d'après les registres d'Elijah, personne n'était entré ou sortit à l'exception de certains professeurs. J'avais fait presque tout le tour, mais aucun résultat n'est positif.

Je me dirigeai alors vers le dortoir, et une fois arrivée, je passai d'abord par ma chambre afin d'y déposer mes affaires et de me changer. Cet uniforme était confortable, mais il n'y avait rien de plus relaxant qu'un t-shirt oversize et un short de pyjama. Je détachai également mes cheveux pour les laisser tomber en bas de mon dos. Je gardai mes chaussettes basses blanches et enfilai des chaussons.

Je ressortis de ma chambre et toquai à celle de mon supposé voisin. Après cinq longues minutes, il n'y avait toujours pas de réponse, alors je décidai de rentrer. Je plaçai un enchantement sur la poignée pour décoincer sa serrure et enclenchai le tout. La porte s'ouvrit facilement, comme je l'espérais.

Sa chambre était similaire à la mienne, en revanche, à ma grande surprise, elle était bien mieux rangée. Les murs en pierre étaient foncés, la grande fenêtre donnait sur la forêt sombre, tout comme la mienne. Le mobilier était le même, mais la décoration y était beaucoup plus sobre. Sa bibliothèque était également bien plus fournie ; je rêvais d'avoir autant de livres. Je passai le doigt sur la reliure de chacun des livres posés sur l'étagère et lis leur titre. Il s'agissait de sujets qui parlaient de sortilèges interdits, de thèmes sombres, de magie noire et de créatures terrifiantes.

Je remarquai enfin que mon livre était posé sur sa table de nuit. Je le pris dans mes mains et continuai ma petite inspection. Je vis qu'à côté de mon livre se trouvait un petit cadre. Sur la photo, je vis une femme, grande et mince, accompagnée d'une adolescente blonde, et d'un petit garçon brun. Je distinguai que le garçon possédait une ressemblance troublante avec Orion. Je supposai que ce groupe est la famille d'Orion, sa mère et sûrement sa sœur.

Orion

Quand j'arrivai dans les dortoirs, je remarquai que ma chambre était entrouverte. Je me souvenais pourtant l'avoir fermé il y a quatre jours, quand j'étais parti. Je m'approchai doucement, prêt à me défendre, et balayai l'intérieur de la pièce du regard. Je vis la nouvelle, face à ma table de chevet, dos à moi.

Putain qu'est-ce qu'elle foutait là ?

Je m'approchai d'elle en vitesse, mais elle sursauta et recula rapidement. Je pris fermement le haut de son bras, et la tira en dehors de la chambre. Elle se débattait en criant, je ne l'écoutais pas. Malgré le fait que j'avais la mâchoire contractée de colère, je n'arrivais tout de même pas à lui en vouloir. Je n'hésitais pas à la traîner jusqu'à sa chambre.

- Lâche-moi... Dit-elle apeurée.

Elle arrêta de se débattre et me regarda avec des yeux remplis de larmes. Elle qui d'habitude ne laissait jamais la moindre faiblesse paraître sur son visage... je ne comprenais pas sa réaction.

Malheureusement, elle n'avait pas assez de force pour détacher la main de l'homme, qui écrasait son bras. En revanche, sa détresse avait réussi à le déstabiliser en quelques secondes. Il ne s'attendait pas à la voir aussi désemparée avec lui. Même si ses propos disaient le contraire, Orion ne trouvait rien de plus fascinant, à ce moment-là, que la tenue que portait Reyna. Celle-ci arma un sort entre ses doigts, et les pointa sur le jeune homme.

- Je domine à ce genre de jeu, ne m'oblige pas à utiliser une autre sorte de force. Dit-elle en le fusillant du regard.

Elle avait les yeux remplis d'un mélange de larmes de rage et de culpabilité. Au fond d'elle, elle savait très bien que c'était sa faute, mais l'effort de l'assumer était une épreuve bien trop difficile.

Reyna

Il fixait l'énergie qui se déplaçait entre mes doigts. Je vis qu'il la craint, mais il ne bougeait pas d'un millimètre. Je soupirai et abandonnai le concours de regard. Je baissai ma main tandis qu'il enleva enfin la sienne de mon bras. Je me dirigeai vers mon lit, jetai le livre de botanique, et me laissai tomber, assise sur ma couette.

- Je suis désolée d'être rentrée dans ta chambre. Je lui dis en fixant le sol.

Mais en remarquant qu'il ne comptait pas répondre, j'étais redressée.

- Écoute, je sais que tu as l'air de me détester, mais je peux au moins connaitre la raison ?

- Tu parles trop. Dit-il en regardant le sol et mettant ses mains dans ses poches de pantalon.

- Si je ne parle pas, tu ne le feras encore moins Orion.

Il frissonna à l'entente de son nom. Je forçais alors la discussion.

- J'essaye juste de comprendre pourquoi tu es comme ça. Je ne te demande pas de m'apprécier, juste d'être respectueux.

Il redressa la tête et plongea son regard dans le mien.

- Je n'ai pas envie d'en parler et je vais encore moins m'excuser, mais sache que ce n'est pas toi le problème.

- Alors qui ? Ou quoi ?

- Arrêtes de poser des questions ! Je te l'ai déjà dit tu parles beaucoup trop...

- Et ta petite amie pense le contraire... Dis-je en marmonnant.

C'est dommage, visiblement, il n'avait pas l'air d'avoir entendu ma dernière phrase. Il se remit à fixer le sol. Ces dalles vieilles de plus de 100 ans étaient-elles vraiment plus intéressantes que moi ? 

- Tu es mort ? Lui dis-je sur un ton sarcastique.

Il sorti brutalement de ses pensées et me fixa étrangement. Son regard s'arrêta sur mes lèvres. Il avait l'air perdu. Je senti une vague de chaleur traverser mes joues pour s'arrêter dans ma poitrine. J'essayais tant bien que mal de ne pas penser à son regard intense, mais en vain.

Comme si une tempête était passée, en quelques secondes, l'état du brun changea, et se remit à fixer, pour ne pas dire admirer, les yeux de la jeune sorcière. Il ne s'en rendait pas compte, mais Reyna était déstabilisée, tentant de planter son regard de côté.

- Estime-toi heureuse qu'ils t'aient donné une chambre de délégué. Déclare-t-il froidement.

Reyna hocha la tête. Il quitta la pièce rapidement sans autres explications, la laissant en totale incompréhension.