𝐇𝐚𝐮𝐧𝐭𝐞𝐝 𝐇𝐞𝐚𝐫𝐭𝐬

𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟐𝟎

Couloirs, 8ème jour de l'Hiver 

Le soleil était déjà levé lorsque je fus réveillée par des voix lointaines. Il me fallu quelques instants pour me situer, reconnaissant les voûtes du plafond en pierres beiges de l'infirmerie. Des voix s'élevaient légèrement dans le couloir à l'extérieur du grand dortoir. J'étais presque certaine de les connaître, et ma curiosité fit bouger mes jambes avant que mon cerveau puisse être raisonnable.

Je me levai du lit et me dirigea vers la grande porte de l'infirmerie, qui donnait sur un palier sombre. Les meurtrières qui lui servaient de fenêtres étaient trop fines pour laisser la lumière du jour entrer, rendant l'espace obscure et presque sinistre.

J'entendis les voix de nouveau, et je fus enfin persuadée de leurs propriétaires. Je gravis discrètement les escaliers qui s'imposaient devant moi, et qui pourraient me diriger vers les deux fugitifs. Après avoir grimpé plusieurs marches, j'aperçus Orion et Rose, qui étaient en pleine discussion, tout en gravissant les marches eux aussi. Je restais intentionnellement au niveau d'en dessous, tout en ayant un infime visuel sur eux. Je ne voulais pas être vue. Mon odieuse curiosité va finir par me compromettre... 

Je pris quelques secondes immobile pour les observer. Orion semblait préoccupé, presque tourmenté. Je le voyais à l'expression qu'il avait dans ses yeux. Il évitait le regard de Rose, qui, elle, cherchait inéluctablement son attention. La brune suivait sans succès son regard, et elle en était ennuyée, même énervée.

Ils continuèrent à monter les escaliers, jusqu'à ce qu'ils soient au dernier étage du manoir. Ils avaient l'air pressés, ils étaient rapides et inquiets, comme s'ils avaient quelque chose à se reprocher.

Je continuais à les suivre en douce, cachée par des colonnes, des murs et derrière des statues. Ma conscience me criait de renoncer à cette excursion, mais ma curiosité presque malsaine prenait le dessus. Ils accéléraient et j'eus du mal à les suivre.

J'en avais presque oublié les évènements de la veille, ma blessure et l'effet des anti-douleurs. L'effort que je produisais avait réveillé un tiraillement désagréable au niveau de mon abdomen.

- Par là. Chuchota Orion en prenant un nouveau couloir.

Je reconnus leur chemin à présent. Je l'empruntais très souvent. Si je les suivais, ce que j'allais faire, on se retrouverait à l'Observatoire. Ils s'y dirigeaient sans aucun doute. 

Une fois à l'intérieur, je les regardais s'adosser sur les étagères qui entouraient l'énorme télescope. Le plafond vitré laissait passer la lumière de la nuit. Un ciel hostile sans Lune s'étendait au-dessus de nous, les étoiles uniques témoins de mon intrusion. La teinte froide et bleuté de la pièce me fit frissonner, je ne remarquai que maintenant que je n'avais pas de vêtement chaud. La voix de Rose me surprit et me coupa dans mes pensées.

- Tu comptes t'y prendre quand exactement? se fâcha-t-elle, en posant sa main sur la joue du brun devant elle. Il ne réagit pas, ennuyé.

- Tu attends quoi de moi? demanda-t-il, d'un ton monotone.

- Je veux que tu arrêtes. Tu sais très bien de quoi je parle. Murmura-t-elle d'une voix douce.

Une vague d'inconfort, d'énervement m'envahit, sa voix douce sonnait si fausse, qu'elle en était presque hypocrite. Elle s'avança davantage vers Orion, et lui posa un léger baiser au bord des lèvres. Le corps du brun ne réagit toujours pas, mais son regard la toisa avec dépit.

- Pense à ta mission. Dit-elle en s'humectant les lèvres.

- Rose...

- Non Orion. Ça fait des semaines que tu l'ignore, tu te caches, tu ne nous donne même plus de nouvelles ! Tu n'es plus le même qu'en début d'année, tu étais vraiment déterminé... Si tu as besoin d'aide je-