14 | Cher Papa, Chère Maman, Adieu.

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MAUD
Cinq heures après le décollage de l'avion à Paris, 25 octobre 2023, 12h07. Los Angeles, Californie, Etats-Unis.

La brosse à dent entre mes doigts, je la fais mouvoir frénétiquement contre mes dents tandis que mes yeux s'attardent sur ma propre représentation reflétée dans le miroir. Je me scrute si longuement à travers le miroir que je remarque correctement le dentifrice qui s'échappe des confins de mes lèvres ainsi que les cernes qui habillent délicatement mes yeux.

La pièce, plongée à moitié dans l'obscurité, voit seule la lueur du miroir s'animer, me refusant la clarté nécessaire pour scruter adéquatement mon corps si impur. Et pourtant, j'aime ça.

Ma peau est si sale. J'ai beau la laver des milliers de fois, je demeure toujours hanté par cette sensation traîtresse des mains de Jacob qui ont parcouru l'étendue de ma chair, m'arrachant tout le contrôle sur mon propre corps. Il appartient à Jacob et je ne peux envisager quiconque d'autre le revendiquer. Pas même moi. Ce corps lui est et demeurera incontestablement sien.

Je m'observe, me voyant mordre ma lèvre inférieure face à cette vision de moi-même.

Cependant, ce goût amer dans ma gorge, où ne subsiste que la saveur infâme du fer, s'efface lorsque l'une des pattes de Gus se pose lourdement contre mon ventre. Il me miaule dessus quand mes yeux rencontrent les siens. Assis près du lavabo, il me scrute si profondément, examinant chacun de mes faits et gestes possibles. Alors d'une main vacillante, je caresse soigneusement le haut de sa tête, entre ses oreilles. Un doux ronronnement émane de lui par la suite.

Sans plus tarder, je ne me donne pas le temps de me maquiller que j'attrape uniquement mon correcteur et mon mascara avant de les appliquer avec parcimonie sur ma peau apaisée loin de tapoter à l'aide d'un Beauty Blender. Mes iris semblent concentrés, à un tel point où je n'aperçois que le détail minutieux de mes cils noirs et de ma main tremblante lorsque j'applique sérieusement mon mascara. Il vient les teinter si sombrement qu'ils se montrent noirs comme l'ébène.

Après coup, je sursaute.

Je sursaute si violemment à la sonnerie de mon téléphone portable qu'un souffle fâcheux s'abandonne de mes lèvres.

Néanmoins, je ne me retourne pas immédiatement, mais suffisamment pour apercevoir une notification illuminant l'écran. Alors d'un pas languissant, je me dirige vers la machine à laver où repose ce dernier avant de le prendre. L'écran s'anime sous mon toucher.

Ainsi, lorsqu'une photo de Gus se montre en fond d'écran, je me vois lire un message d'Aaron. Encore. Comme chaque matin.

« Descends dans vingt minutes. »

Il me faut quelques secondes pour comprendre avant de reposer le téléphone portable sur la surface de la machine à laver. Je ne sais pas trop quoi en penser, à vrai dire. Il disparaît du jour au lendemain, sans laisser de traces, laissant Ava jouer le rôle de chauffeur, sans omettre son mensonge à elle et de son copain sur son absence. Et puis, qui vais-je voir arriver devant mon immeuble aujourd'hui ? Aaron ou Ava ? Toutefois, la réponse m'importe peu.

Alors, sur une grimace cocasse, je m'enfuis de cette pièce, me réfugiant dans ma chambre, avec Gus à mes pieds.

Une fois dans ma chambre, je n'ai pas vraiment le temps de constater le bazar qui y trône que je saisis promptement les habits que j'avais soigneusement préparés la veille, enfilant immédiatement un jean noir en guise de bas et un pull à capuche bleu marine comme haut après m'être délaissé de mon pyjama.

Vêtu, je me laisse conduire vers ma cuisine, cette fois-ci sans l'accompagnement de Gus. Celui-ci avait trouvé un havre de paix sur un amas de vêtements au sol.

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