18. A la vie, à la mort

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Trahir ou périr ?

Bom Bom. Bom Bom. Bom Bom.

Elle l'avait sous-estimé. Elle ne l'imaginait pas capable de la retrouver, et encore moins de se téléporter d'un claquement de doigts devant elle. De la main du vicomte, partit en fumée un parchemin à l'origine de l'exploit. Pour ce qui était du reste, le mystère demeurait entier.

Leurs regards s'affrontèrent dans une tension palpable. Tous deux affichaient un calme apparent, mais aucun n'était dupe. Ils se tenaient prêts à défendre leurs intérêts respectifs de toutes les manières nécessaires. Adren Heleyra fut le premier à briser le silence.

— Rentre au château avec moi, ordonna-t-il avec une douceur mêlée de fermeté.

— Vous et moi savons très bien ce qui m'attend si je reviens. Je n'ai pas l'intention de me diriger vers ma propre mort, refusa-t-elle.

Elle ne s'embarrassait plus des règles de bienséance.

— Rentre avec moi sans faire d'histoire, et cette entorse au règlement restera entre toi et moi.

Elle le jaugea, longuement. Adren priait pour qu'elle rentre avec lui, sans quoi il ne s'abaisserait pas à faire une telle proposition. Il semblait sincère, pesait ses mots tout autant qu'elle. Aucun d'eux ne savait comme cette histoire se terminerait, mais une chose était sûre : rien ne serait jamais plus comme avant.

— Je ne rentrerai pas, conclut-elle. Je connaissais les risques encourus en quittant le château, et ma décision est prise. Je ne reviendrai pas.

— Tu es ma gardienne. Tu as un devoir envers moi. Tu m'as prêté allégeance, Edelone, gronda-t-il.

— Je romps mon serment. Vous n'aurez aucun mal à trouver un autre gardien au sein du monastère. Vous n'avez pas besoin de moi.

— Ça ne fonctionne pas ainsi, cracha-t-il. Tu es liée à moi. Je ne peux pas simplement choisir une autre personne, une seule à la fois peut porter la marque.

Edelone rit amèrement. Elle perdait patience.

— Le monastère est rempli de moines qui ne demandent qu'une chose : vous servir. Alors fichez-moi la paix et laissez-moi partir. Vous n'aurez aucun besoin de leur apposer cette marque pour qu'ils vous obéissent. Vous êtes vicomte, non ? Vous avez toujours fait ce qu'il vous plaisait, qu'est-ce qui vous empêche de le faire une fois de plus ?

Le Ki d'Adren s'agita de colère, mais il n'en fit rien. Il lui coûtait tant d'efforts de garder son calme face aux paroles de sa traîtresse.

— Tu n'as donc pas l'intention de respecter ta promesse ?

Devant le regard interloqué d'Edelone, Adren ferma les yeux et lança une incantation. Des images apparurent dans la tête de la demi-elfe. Elle et le vicomte, s'enlaçant tendrement dans les quartiers de son seigneur. Sa tête enfouie dans le creux du cou de la gardienne.

« Tu peux me juger, me mépriser. Il m'est même tolérable que tu me haïsses. Mais ne m'abandonne pas »

« Ça n'arrivera pas »

« Promets-le »

« Je vous le promets, Sir »

Edelone eût envie de vomir. Ses tripes se tordaient sur elles-mêmes. Elle ne put retenir un éclat de rire caustique. Une chauve-souris s'envola. Elle comprit qu'au moment de souvenir, il savait déjà. Il savait déjà qu'il demanderait en mariage Vaelin', et qu'il infligerait un châtiment insoutenable à sa gardienne. Évidemment.

Au service de l'absurde - La GrueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant