Lundi 5 mai 2025, Dourney, Modros, Californie, États-Unis d'Amérique.
Manuel Cross n'aurait pas été contre l'idée d'être plus vieux de quelques années. Il aurait pu prendre sa retraite. Éviter le rassemblement bruyant et désordonné qui se déroulait sous son regard acéré. Pendant quelques minutes, il s'était estimé satisfait du comportement des 7ème année S.U.I. : rangés en ordre sous le préau du bâtiment ouest, ils avaient su se tenir sans se disperser ni discuter trop fort.
Puis les étudiants du projet Réseau étaient arrivés. Deux cars remplis d'une vingtaine de recrues-Fantômes et d'une dizaine de Mino, les apprenties de la société-fille des Amazones. Dès lors, les élèves de l'École s'étaient agités de curiosité, d'esprit de compétition et d'impatience fiévreuse. Ils voulaient faire connaissance. Évaluer leurs chances. En découdre.
Manuel et Ethan s'étaient efforcés de les calmer avant de finalement se résigner. La journée avait été banalisée pour permettre aux étudiants des trois promotions de se rencontrer et d'échanger. La première épreuve ne commençait que le lendemain. En attendant, Manuel, Ethan, les cadres du projet Réseau et les professeurs des autres centres de formation avaient un tas d'informations et de documents à distribuer.
Depuis le banc d'une table de pique-nique, Manuel s'assurait que cette première rencontre se déroulait sans encombre. Planté nerveusement à côté de lui, Ethan surveillait la cour où s'agitaient près de soixante-dix adolescents formés pour devenir les agents de surveillance, d'intervention armée ou paramilitaires de demain.
Si Manuel était plutôt mitigé à propos de ce projet, une fantaisie des Sybaris, il en était presque désolé pour son collègue. Le projet Réseau était un véritable casse-tête pour Ethan. C'était une charge de travail supplémentaire pour un professeur encore jeune, mais aussi un défi à titre personnel. Affronter des membres de la famille qu'il fuyait depuis des années n'était plus contournable.
Comme le regard de son collègue s'éternisait en direction de l'attroupement de la Ghost Society, Manuel se redressa à son tour. Les recrues-Fantômes se comportaient avec discipline, plus que leurs propres élèves ou que les Mino. Manuel reconnut deux professeurs encadrants à leur attitude, Edward à la façon dont Ethan le dévisageait.
Son ancien élève ne tarda pas à les remarquer, malgré la protection du préau et des étudiants agités autour d'eux. Manuel était trop loin – ou ses yeux trop usés par les années – pour distinguer l'expression de l'homme. Il étudia celle d'Ethan à la place. Ses traits tendus et ses yeux ombragés arrachèrent un soupir à Manuel. Il n'y avait que sa famille pour casser ainsi sa façade avenante. Même avec les élèves réfractaires, les contraintes administratives ou les imprévus agaçants, Ethan parvenait à garder un masque obligeant et une attitude médiatrice.
Il ne cherchait pas à tromper qui que ce soit concernant ses sentiments envers son frère.
— Ça va aller ?
La question, posée avec sincérité, tira son collègue de son observation.
— Il faut. (Ethan soupira puis se rassit à côté de Manuel sur le banc.) Ce ne sera pas comme en mars, où il n'est resté que quelques jours pour régler les derniers détails. Cette fois, c'est un mois. Au moins.
— Et tu vas y survivre ?
La légère moquerie dans la voix de Manuel arracha un froncement de sourcils à son cadet. Après l'avoir considéré un moment, Ethan secoua la tête avec un petit sourire.
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S.U.I - Tome 2 : Black & White
ActionAprès un an et demi aux côtés de son oncle à la Ghost Society, une porte de sortie s'ouvre enfin pour Jeremy. Lors de sa première présentation officielle en tant qu'Elias Sybaris, une collègue de son père parvient à l'extirper de cette soirée symbol...