Samedi 26 août 2023, Down-Town, Modros, Californie, États-Unis d'Amérique.
Le Farfalla se caractérisait par un bar central circulaire. Au milieu se dressait une colonne d'étagères réalisée sur mesure pour accueillir une partie du stock d'alcool du bar-restaurant. Le bois massif dans lequel on avait taillé la colonne et le comptoir tirait vers un miel chaud. En contraste, le marbre qui habillait le bar était d'un noir veiné de filaments argentés.
L'ambiance y était chaleureuse, avec la scène musicale calée au fond de la salle et qui accueillait des groupes amateurs le week-end ou les soirs de semaine. Des tables et chaises hautes meublaient la zone près du comptoir pour plus de convivialité. Si c'était l'intimité que l'on recherchait, des boxes accueillaient des tables accompagnées de banquettes à l'assise de cuir craquelé.
Le Farfalla n'était pas un établissement de toute jeunesse. Son propriétaire, Antonio Amati, avait dépassé la soixantaine. Son bar-restaurant était quasiment aussi âgé que le nombre d'années qu'il avait passées à Modros en tant qu'Italien expatrié au début des années 80.
Alors, quand sa nièce lui avait demandé s'il pouvait accueillir son fils pour la saison estivale, il avait accepté sans trop réfléchir. Un peu de sang neuf ne ferait pas de mal à Farfalla : l'équipe n'était pas non plus toute jeune et la fréquentation du bar tendait à évoluer avec les années. Les habitués de Farfalla, la plupart des immigrés italiens qui venaient déguster le café de leur pays d'origine et chantonner leur langue natale, laissaient de plus en plus place à des jeunes qui appréciaient les concerts amateurs. Même les lycéens de l'établissement privé du coin envahissaient ses tables lors du service de midi.
Son petit-neveu n'avait aucune expérience dans la restauration quand il avait débarqué au début du mois de juillet. Mais il avait l'énergie de ses seize ans, l'orgueil de prouver à ses parents qu'il pouvait payer son matériel de musique par lui-même et il parlait italien. Un dernier point qui s'était révélé essentiel alors que les habitués du Farfalla avaient décidé que la langue devenait l'idiome national – au moins dans l'enceinte du bar.
Jeremy astiquait les verres à bière avec un chiffon propre quand son collègue quitta la machine à expressos pour lui donner un léger coup de coude.
— Eh, c'est pas ton pote, E.J. ?
L'adolescent grogna de mécontentement en se tournant vers son responsable. Sans s'émouvoir de la trogne renfrognée de Jim, Archer Nicholson lui adressa le sourire éclatant qu'il réservait d'habitude aux jolis minois qu'il tendait de séduire le temps d'une soirée. À vingt-et-un ans, bien qu'agent pour S.U.I, le jeune homme travaillait à temps partiel au bar pour arrondir ses fins de mois. Accessoirement, Archer était l'ancienne Recrue d'Ethan.
— M'appelle pas comme ça, ronchonna Jeremy en reposant le verre qui brillait à présent sous le halo des plafonniers de style industriel.
— Ethan Junior, ça te plaît pas ?
L'adolescent se contenta de rouler les yeux en bousculant son collègue.
— C'est super chiant, le contra Jim en s'emparant d'une caisse remplie de verres propres à ranger. T'imagines si je t'appelais Archie tout le temps ?
— Je te planterais une fourchette dans l'œil, souffla Archer avec un sourire carnassier.
— Psycho, marmotta Jeremy avant de se retrouver nez-à-nez avec Ryusuke.
À vrai dire, le bar les séparait toujours, mais Ryu s'était penché pour voir ce qu'il fabriquait derrière le comptoir. Une fois certain qu'il n'allait pas lâcher sa caisse de surprise, Jeremy la reposa sur le plan de préparation avant de tendre le poing. Ryusuke y frappa le sien puis se hissa sur l'un des tabourets. Il avait noué ses cheveux sombres pour éviter qu'ils collent à sa nuque mouillée de sueur.
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S.U.I - Tome 2 : Black & White
AçãoAprès un an et demi aux côtés de son oncle à la Ghost Society, une porte de sortie s'ouvre enfin pour Jeremy. Lors de sa première présentation officielle en tant qu'Elias Sybaris, une collègue de son père parvient à l'extirper de cette soirée symbol...