Chapitre 2

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Trois jours après l'épisode de la chambre d'hôtel, Maggie avait enfin trouvé quelqu'un pour racheter la montre. Entre-temps, elle avait également découvert que cette montre, une Audemars Piguet, édition limitée, pouvait lui rapporter un peu plus de trente mille livres. Cette information l'avait à la fois effrayée et excitée. La montre était synonyme de risques et d'ennuis, mais aussi de rêves inavoués. Avec cet argent, elle pourrait changer de pays, comme cela avait longtemps été son plan, et commencer une nouvelle vie. Posséder un objet aussi luxueux était dangereux, il fallait qu'elle s'en débarrasse le plus rapidement possible.

Son voisin de palier — qui lui avait parlé du site d'Escort quand il avait appris qu'elle avait des problèmes d'argent — avait un ami qui dealait de la cocaïne et revendait des voitures volées. C'était auprès de lui qu'elle pourrait régler cette histoire de montre. Néanmoins, avant de pouvoir jouir de cette somme, Maggie devait gagner son pain.

Elle enfila la longue robe vert émeraude, réservée chez Liberty par Bernard, son nouveau client et aspergea son chignon de laque bon marché. Ses yeux gris clair étaient mis en valeur par un trait de khôl noir et sa bouche par un rouge à lèvres sanguin. Elle vérifia qu'elle n'avait rien de coincé entre les dents et soupira bruyamment. Se déguiser en Escort commençait déjà à la fatiguer.

Come on, girl. Tu peux le faire, c'est peut-être le dernier client de ta vie. Elle ne se doutait pas qu'après cette soirée elle ne pourrait jamais revenir en arrière.

Comment en suis-je arrivée là ? se demanda Maggie, à genoux par terre alors qu'elle tentait d'éponger le sang qui jonchait le sol avec une des serviettes de bain gracieusement fournies par l'hôtel. Il y en a trop. Son regard se porta sur le corps inanimé de Bernard. Sa main dans ma culotte. Son avant-bras appuyé contre ma nuque. Mon visage enfoncé dans le lit. Puis plus rien. Elle lui avait fracassé le crâne avec le réveil en métal chromé qui siégeait sur la table de chevet. Tout avait été très rapide. C'était de la légitime défense. Mais une petite voix dans sa tête lui murmura : « Mais qui te croira, toi la catin avec les objets volés qui jonchent ton appartement et avec ta famille dégénérée ? Lui c'était un homme, riche et respecté par sa communauté, ses proches ne feront qu'une bouchée de toi ».

Désormais, elle contemplait la scène avec un regard vide. Plus aucune émotion ne la traversait. Elle avait l'impression d'agir mécaniquement. Frotte, frotte Cendrillon, tu n'es pas prête de retourner au bal.

Quelqu'un frappa à la porte.

Maggie se leva lentement et se vit dans le reflet de la baie vitrée. Elle était recouverte de sang et des éclaboussures teintaient ses joues.

— Qui est-ce ? demanda-t-elle d'une voix morte.

— Room-service.

— Non merci, nous avons tout ce qu'il nous faut.

Ce petit échange eut le même effet qu'une piqûre d'adrénaline. Elle reprit instantanément contact avec la réalité et courut dans la salle de bain. Bernard ne connaissait pas son vrai nom, il ne l'avait donc pas présentée sous sa véritable identité. Personne n'arriverait à la retrouver. Il fallait qu'elle trouve un moyen de sortir sans se faire remarquer.

Maggie plongea sous la douche de la salle de bain attelée à la chambre. Le sang dégoulinait le long de ses membres et s'évacuait doucement par le conduit. Elle tourna le mitigeur au maximum, laissant l'eau brûler sa peau.

Qu'ai-je fait ?

Elle sortit de la douche et s'enveloppa dans une des dernières serviettes qui restaient. On frappa une nouvelle fois à la porte. Maggie sentit son cœur exploser dans sa poitrine.

Hunter [Dark Romance]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant