14. Matilda

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Le soleil est déjà levé, mais je ne bouge pas. Allongée dans mon lit, je fixe le plafond en me repassant les images de la veille. Hier soir en me couchant, j'étais certaine d'avoir maitrisé la situation et gérer au mieux. Mais ce matin, je n'en suis pas si sûre.

« Parce que si tu as besoin d'inspiration, tu n'as pas besoin de câliner des poteaux. Pas quand la source d'inspiration la plus canon de toute l'Amérique du Nord est à portée de main »

Oh ! Mon ! Dieu ! Je veux mourir là, dans l'instant, pour ne plus jamais avoir à me trouver face à lui. À moins que je ne reste enfermée dans ma chambre jusqu'à leur départ. Je suis convaincue que Jean accepterait de m'apporter de la nourriture en douce si je le lui demandais gentiment. Ou Dante. Mais quelles sont les probabilités qu'Effie me laisse rater son mariage ? Minces, j'en ai peur.
À côté de moi, Dante ronfle doucement.

Hier soir, quand Clark a enfin consenti à me reposer sur le sol, mes yeux ont croisé ceux de son petit frère qui a tout de suite deviné que quelque chose me contrariait. Aussi, pendant que Beckett distribuait les cartes, sa main a trouvé la mienne et l'a pressée trois fois. Notre code pour « tout va bien ? », j'ai serré une fois en retour. « Non ». Du doigt, il a tracé un C sur le dos de ma main et j'ai serré la sienne deux fois en retour. « Oui ». Puis j'ai levé les yeux vers lui et pendant qu'il me dévisageait, j'ai dessiné un petit tourbillon dans sa paume. « Plus tard ».

Le plus tard est arrivé après une heure et douze parties de cartes, toutes remportées par Effie, au moment d'aller nous coucher. Clark nous a jeté un drôle de regard quand Dante s'est glissé dans ma chambre, mais pour une fois, je n'ai pas eu envie d'essayer de comprendre ses moindres faits et gestes.

Cette discussion avec Clark sur le fait que je me suis inspirée de lui pour créer mon héros fait surement partie de celles que j'ai le plus imaginées dans ma tête. Mais dans aucun de mes scénarios il n'en faisait un sujet si désinvolte, une source d'amusement.
Dante allongé sur mon lit m'a ouvert les bras et je m'y suis blottie sans me faire prier.

— Est-ce que je dois lui casser la gueule ? a-t-il demandé en déposant un baiser sur mon front.
— Tu ne voudrais pas plutôt prendre un oreiller et nous étouffer ma honte et moi. Je laisserais un mot pour dire que c'était ma volonté et tu n'iras pas en prison, promis.
— Et me passer d'une petite Tilda dans ma vie ?! Jamais ! Et puis à moins que l'euthanasie n'ait subitement était dépénalisée, mot ou pas, je pourrais quand même me retrouver en cabane. Je suis sûr que ce n'est pas si grave que ça. Raconte-moi tout, ma puce.

Je me suis un peu plus lovée contre lui et j'ai enfoui le nez dans le col de son tee-shirt, prise soudain d'une envie de pleurer que je ne m'explique pas bien. Ensuite, je lui ai tout déballé. Dante a eu la gentillesse de ne pas rire quand j'ai évoqué le passage de la position compromettante.

— Vous n'en avez jamais parlé ?
— De ?
— De tes livres, d'Ansel.

Ma question au marché et le visage mal à l'aise de Clark me sont revenues en mémoire et j'ai secoué la tête.

— Non et ça n'arrivera pas. Il me taquine déjà suffisamment comme ça, pas la peine de lui donner des munitions supplémentaires, merci bien.
— Tu as raison. Quel crétin ce type, je me demande bien qui pourrait avoir le mauvais goût de tomber amoureux d'un imbécile pareil.

En représailles, je l'ai mordu, fort, lui arrachant un glapissement de douleur.

— Attends un peu, espèce de petit vampire ! Tu vas voir !

Il a fallu une main sur mes cotes et deux minutes à Dante pour que je m'étouffe de rire en suppliant. Après m'avoir fait promettre de ne plus jamais le faire, avoir chanté ses louanges et demandé pardon, le supplice a cessé et mon meilleur ami m'a attirée à nouveau contre lui.

Boys in books are betterOù les histoires vivent. Découvrez maintenant