ASMA AIDARA

4.

Salam aleykoum

Certains voit le bonheur loin,  alors que celle-ci se trouve dans l'appréciation des petits détails de la vie.

Mon cœur a littéralement tenté de se suicider. Il a sauté, tapé ma gorge, puis a redescendu en mode toboggan ventral.

— PUTAIN Nafi tu m'as fait peur !, ai-je soufflé en chuchotant aussi fort qu'un cri d'otarie en détresse.

— C'est toi qui m'as fait peur ! Et elle me scanne de haut en bas. Mais... pourquoi tu sors comme une voleuse ? Et t'es habillée comment là ? On dirait Beyoncé en cavale !

J'ai tenté un sourire innocent, mais même mes fossettes m'ont trahie.

— Je... bon, je vais à une soirée. Voilà. T'es contente ?

— Mouni ?! Elle écarquille les yeux. Asma, est-ce que tu serais pas en train de devenir complètement folle ? Elle plisse les yeux, Sherlock dans son élément. Attends... tu voulais sortir en douce, c'est ça ? T'as perdu la tête ma parole !

— C'est juste une fête chez Kira ! J'en peux plus, je négocie comme si j'essayais d'acheter un rein au marché noir. Je reviens avant 2h. Promis, juré, si je mens je... je rate mes exams.

— Chez Kira ?!

— Oui. Et tu sais que je suis en sécurité avec elle. Elle a des principes ! Enfin... des fois. Bon allez Naf—

Des pas. Approche. Dangereux. Masculins.

ALERTE ROUGE.
Je plonge derrière le mur de la cuisine, mode caméléon activé. J'aspire mon âme dans mon ventre. Je me colle tellement au mur qu'on aurait dit une fresque.
Et bien sûr, ma main droite couvre ma bouche. Comme si ça allait empêcher mes pensées de crier.

— Rassoul ? Qu'est-ce que tu fais là ?, demande Nafi, voix douce. Trop douce. Elle prépare une dissimulation de niveau 3000.

— Je pourrais te poser la même question. J'ai entendu du bruit. On aurait dit... une alarme humaine.

JE SUIS L'ALARME HUMAINE. JE LE SAIS.

— Ah... Non, j'étais juste venue remplir ma carafe. Elle était vide. Et... je suis tombée sur Asma.

JE L'AVAIS DÉJÀ DÉSAVOUÉE EN PREMIÈRE LIGNE. ELLE VIENT DE ME LIVRER.
J'écarquille les yeux dans le noir comme une chouette possédée.

— Asma ?

Je me contracte, me recroqueville, fusionne avec l'ombre. Je ne suis pas là. Je suis un mirage. Un courant d'air. Une illusion collective.

— Oui. On s'est cognées, on a eu peur. Rien de grave.

— Mais... elle faisait quoi ici ? insiste-t-il.

Moment critique. Dernier round. Tout repose sur Nafi maintenant.

— Elle avait faim. Tu sais comment elle est. Toujours en train de grignoter. Là, elle est remontée.

YES. ELLE. EST. REMONTÉE.
Asma : 1 – Vie sociale : 0 – Karma : suspendu.

Je suis restée collée là, sans respirer, le cœur en train de faire un dab toutes les 3 secondes

— Ah d'accord.
Rassoul s'apprêtait à remonter.
— N'oublie pas d'éteindre la lumière de la cuisine.