1 - La découverte

20 6 2
                                    

Omniscient

Janvier 1424 - Tayonne

Macaria, la mère de Freya, fulminait. Ses yeux sombres, chargés de colère, lançaient des éclairs tandis qu'elle arpentait la grande salle du château, son long manteau de velours pourpre effleurant le sol à chaque pas. Le silence pesant de la pièce était brisé par le claquement sec de ses talons contre le marbre froid, répercutant une tension palpable dans l'air. Les lourds rideaux de brocart rouge étaient tirés, laissant la pièce baigner dans une lueur crépusculaire, où les ombres dansaient le long des murs tapissés de portraits ancestraux.

– La prochaine fois que je la vois, je jure que je lui fais trancher la tête, gronda Macaria, sa voix vibrante d'une fureur contenue. Depuis toujours, elle a été une incapable. On aurait dû la bannir dès le jour de la cérémonie.

Ses poings serrés, blancs de rage, trahissaient une frustration accumulée depuis des années. Elle se tourna brusquement vers Herumor, l'empereur, qui, bien que massé dans son fauteuil en cuir noir, semblait minuscule face à la tempête émotionnelle qui agitait son épouse. Les flammes vacillantes des chandelles disposées dans la pièce projetaient une lumière vacillante sur son visage, révélant un mélange de fatigue et de résignation dans ses yeux gris cernés.

– Ne t'énerve pas à ce point, mon amour, répondit-il avec un soupir lourd, sa voix teintée d'une lassitude évidente. Nous savons tous les deux qu'elle reviendra tôt ou tard. Elle possède peut-être un arc, mais elle ne ferait pas de mal à une mouche.

La nouvelle de la disparition de la princesse Freya avait éclaté comme un coup de tonnerre dans le royaume, se répandant tel un incendie incontrôlable dans les rues pavées de Tayonne. Chaque habitant, du plus humble paysan au plus noble seigneur, avait désormais les yeux tournés vers le château, où la tension montait à chaque minute qui passait sans qu'aucune nouvelle ne parvienne.

Certains murmuraient que Freya ne méritait pas de porter le nom des Sylvaine. Comment une princesse sans pouvoir, pensaient-ils, pouvait-elle prétendre à la grandeur qui coulait dans leurs veines ? D'autres, plus compatissants, chuchotaient qu'elle avait sans doute été enlevée, même si l'idée qu'elle puisse avoir fui de son propre chef semblait tout aussi plausible. Après tout, pourquoi une princesse quitterait-elle le confort du palais pour se perdre dans la boue du monde extérieur ?

– Tu es drôle, toi, Herumor, mais en tant qu'empereur, c'est mal vu de perdre sa fille simplement parce qu'elle est en crise d'adolescence, reprit Macaria. La voix tremblante de mépris tandis qu'elle s'affaissait légèrement dans son fauteuil. Elle fait honte à notre famille.

Le regard de Macaria s'assombrit encore davantage, tandis qu'elle fixait un point invisible devant elle, comme si elle pouvait, par la seule force de sa volonté, ramener sa fille à l'ordre.

– S'il vous plaît, ne dites pas ça, elle fait de son mieux. Ce n'est pas elle qui a choisi de ne pas avoir de pouvoir ! intervint Jona, sa voix douce, mais ferme résonnant dans la salle. Elle se tenait droite près de la cheminée, la chaleur des flammes faisant briller ses cheveux dorés.

Macaria tourna lentement la tête vers sa cadette, son regard dur perçant le masque d'inquiétude de Jona.

– Tu es bien gentille de défendre ta sœur, mais comme un grand homme a dit : il n'y a que la vérité qui blesse, répondit-elle froidement, ses mots tranchants comme un rasoir.

La grande salle du château, autrefois lieu de rires et de réjouissances, était maintenant plongée dans une ambiance morose. Les fêtes somptueuses et les réceptions fastueuses des Sylvaine, qui attiraient jadis des invités de tout le royaume, n'étaient plus que des souvenirs lointains. La richesse et le bonheur autrefois exhibés avec fierté semblaient s'être évanouis depuis la cérémonie, révélant l'absence de pouvoirs chez Freya. Chaque semaine, des mages venus de tous les coins du royaume se succédaient au château, leurs espoirs d'éveiller en Freya un potentiel caché s'éteignant les uns après les autres. Finalement, la famille avait tourné le dos à la jeune princesse, plaçant leurs espoirs en Jona, l'enfant prodige.

– Je vais partir la chercher moi-même, mère. Mais promettez-moi que si je la ramène, vous ne lui ferez aucun mal, déclara Jona avec une détermination inébranlable, ses yeux marron acier brillant d'une résolution nouvelle.

Macaria, surprise par l'audace de sa fille, laissa échapper un soupir avant de déposer un baiser rapide sur le front de Jona.

– Si tel est ton souhait, alors vas-y, ma fille, murmura-t-elle avec une tendresse rare, bien que son regard restât dur.

Jona s'inclina légèrement, puis tourna les talons, ses bottes résonnant sur le marbre tandis qu'elle se dirigeait vers l'écurie. Le ciel à l'extérieur était teinté d'une nuance violette, signe que la nuit tomberait bientôt. Elle monta à cheval, l'animal noir comme l'ébène piaffant d'impatience sous elle, avant de s'élancer à travers les portes massives du château, sa silhouette se fondant rapidement dans l'obscurité naissante.

Herumor se leva lentement de son fauteuil, ses mouvements trahissant une fatigue qui n'était pas seulement physique. Il se rapprocha de Macaria, qui restait silencieuse, fixant la porte par laquelle Jona venait de disparaître.

– Chérie, murmura-t-il en posant une main réconfortante sur son épaule. Ne t'en fais pas pour notre fille. Je suis sûr qu'elle est bien entourée.

Macaria ne répondit pas, se contentant de hocher la tête, ses pensées visiblement ailleurs. Finalement, chacun prit congé de l'autre, le cœur lourd, tous deux attendant des nouvelles de leurs filles dans ce royaume en proie à l'incertitude et à l'inquiétude croissante.

Le vent soufflait à travers les couloirs du château, emportant avec lui un air de mélancolie. La nuit tombait sur Tayonne, enveloppant le royaume dans un voile de mystère et de peur. Tandis que les étoiles commençaient à scintiller faiblement dans le ciel, comme autant de petites lueurs d'espoir perdues dans l'immensité de la nuit.

Les secrets du royaume [Réécriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant