46 - Les sentiers de l'oubli

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Freya

Lendemain - Drales

En entrant dans Drales, je fus immédiatement submergée par le tumulte qui régnait dans les rues. Le voyage jusqu'au vieux sage m'avait laissé épuisée, mais le désordre qui m'accueillait ici ne me laissait aucun répit. Je sentais une pression grandissante sur mes épaules, celle d'un peuple désorienté, cherchant un guide que je n'étais peut-être plus capable de devenir.

Raymondin marchait à mes côtés, silencieux, observant chaque détail avec cette froideur qui lui était propre. Son regard glissait sur la foule agitée, les visages tendus des villageois qui semblaient pris dans une spirale de désespoir. J'essayais de capter l'attention de quelques personnes, des hommes et des femmes que je reconnaissais parmi les notables de la ville. Je me dis que si je pouvais discuter avec eux, les convaincre de mon engagement, cela pourrait suffire à restaurer une partie de ma légitimité.

Je quittai Raymondin sans un mot, me dirigeant vers la maison d'un marchand influent que j'avais connu autrefois. Mes pas me menèrent dans les ruelles étroites du quartier commerçant, où l'agitation n'était que plus palpable. Les cris des marchands essayant de vendre leurs derniers biens, le bourdonnement des conversations inquiètes... tout cela formait un bruit de fond constant qui semblait peser sur la ville comme une chape de plomb.

Lorsque j'arrivai devant la demeure du marchand, je pris une profonde inspiration avant de frapper à la porte. Une servante m'ouvrit, son visage marqué par la fatigue et l'angoisse. Elle me regarda avec surprise avant de m'annoncer. Le marchand, un homme corpulent à la moustache grisonnante, apparut bientôt dans l'embrasure de la porte, son expression neutre.

– Freya, dit-il simplement en s'inclinant. Que me vaut l'honneur de votre visite ?

Il y avait dans sa voix une distance que je n'avais jamais entendue auparavant. J'essayai de ne pas laisser paraître ma gêne.

– J'ai besoin de parler avec vous, dis-je en essayant de paraître aussi autoritaire que possible. La situation à Drales est critique, et j'ai besoin de l'appui des citoyens influents pour rétablir l'ordre.

Il m'invita à entrer d'un geste, mais son accueil restait froid. Nous nous installâmes dans son salon, un endroit autrefois richement décoré, mais qui semblait maintenant dépouillé, comme si la prospérité avait quitté cet endroit en même temps que la ville.

– Les temps sont difficiles, répondit-il après un silence. Les affaires déclinent, les gens sont inquiets... et beaucoup se demandent si le pouvoir en place est capable de redresser la situation.

Je fus surprise par son ton direct. Il n'y avait plus cette déférence habituelle dans sa voix. Je compris alors que le soutien dont j'avais besoin ne serait pas facile à obtenir.

– Je comprends vos inquiétudes, dis-je avec sincérité. Mais c'est précisément pour cela que je suis ici. Nous devons unir nos forces pour restaurer la confiance et l'ordre. Si nous travaillons ensemble, nous pouvons inverser la situation.

Il me regarda avec un mélange de scepticisme et de fatigue.

– Beaucoup ont déjà entendu ce discours, Freya. Mais les promesses ne suffisent plus. Les gens veulent des actes, des résultats. Et vous savez aussi bien que moi que les paroles ne remplaceront jamais la stabilité que tout le monde attend.

Je sentis mon cœur se serrer. Il avait raison. Les paroles n'étaient plus suffisantes, mais que pouvais-je offrir d'autre en ce moment ? Les mains vides, sans réel pouvoir, je devais néanmoins continuer à essayer.

– J'ai besoin de vous, insistè-je, ma voix tremblante d'une émotion que je ne pouvais plus contrôler. Je ne peux pas le faire seul.

Il me regarda longuement, comme s'il pesait mes paroles, cherchant à voir au-delà de mes mots. Finalement, il soupira.

Les secrets du royaume [Réécriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant