The road is long, we carry on ¦ Joel x oc

14 - Drink Before the War / Partie 1

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"Vous avez eu de la chance de tomber sur nous."

Ce fut la première chose qu'on a dite à Andy après l'avoir traîné par les bras pendant plusieurs minutes, forcée de monter des escaliers qu'elle ne pouvait pas voir et sur lesquels elle trébuchait à chaque marche. Puis à attendre si longtemps qu'elle était prête à élaborer un plan d'évasion.

Mais il fallait se rendre à l'évidence, ses mains attachées dans une paire de menotte froide et les bruits du monde autour d'elle étaient un bon moyen de dissuasion.

Les mains qui lui emprisonnaient les bras finirent par la lâcher pour la laisser s'écraser au sol avec dureté. Bien qu'elle veuille le nier, son cœur s'emballa à l'idée d'être enfermé ici au milieu d'ombres qu'elle ne pouvait pas voir. Être privé de la vue la rendit si exposée qu'Andy chercha un angle pour s'y terrer comment un animal prit au piège.

Elle fit l'inventaire des possibilités dans sa tête. Comme d'habitude, elle était toujours armée de son fidèle canif, mais ne pouvait pas s'en servir pour se libérer. Les seuls bruits audibles étaient soit des pleures, soit des gémissements ou des supplications. Il y avait aussi des chuchotements, mais ils étaient trop loin pour qu'elle les entende et encore moins les comprenne. Elle réussit toutefois à compter au moins une dizaine de personnes qu'elle imagina comme des fantômes dans le noir qui l'entourait.

Un instant, elle pensa à appeler le nom de Joel, mais abandonna vite l'idée. La dernière chose qu'elle a vue de lui était son corps inconscient étendu au sol. Elle avait confiance en lui et surtout en sa résistance. S'il avait survécu jusque là, ce n'est pas un coup sur la tête qui allait l'achever. Pourtant une partie d'elle plus importante qu'elle ne voulait l'admette s'inquiétait. Andy refusa de décider tout de suite si c'était par intérêt ou par sincérité.

Elle ne savait pas combien de temps cela faisait qu'elle était là assise au sol, les genoux repliés sur son torse. Ses tremblements de peur avaient cessé pour ne laisser place qu'à l'attente et à une tension qui la rendait prête à toute éventualité.

Après un moment, le cri de quelqu'un à plusieurs mètres d'elle, ordonnant de le laisser sortir, confirma qu'ils étaient bien plusieurs prisonniers ici. Andy tenta de retirer le sac sur sa tête puis abandonna rapidement, d'une part, car ses mains attachées dans son dos l'empêchaient de pouvoir se mouvoir à sa guise, de l'autre, car une voix plus forte que les autres s'éleva entre tous.

"Bien maintenant que nous sommes au complet."

Elle aurait pu ne pas écouter l'intervention de cet inconnu, qu'Andy aurait quand même su qu'elle ne venait pas de quelque prisonnier. Le ton était imposant, autoritaire, mais surtout habitué. Comme si le discours qu'il s'apprêtait à prononcer ne sortait pas de sa bouche pour la première fois.

"Bienvenue à Cleveland."

On dégagea le tissu de son visage d'un coup sec et, alors qu'elle s'attendait à faire face à un endroit sombre entouré d'une vingtaine de personnes, il n'y eut qu'un paysage à couper le souffle. L'immense lac (qui pourrait faire croire à n'importe qui qu'il était une mer) s'étendait à perte de vue par les baies vitrées brisées à travers lesquelles l'air autumnal s'engouffrait.

"Si vous êtes ici, c'est que vous avez pénétré sur notre territoire."

Son attention se dirigea vers celui qui monologuait en leur intention. C'était un homme qui n'était pas plus vieux qu'elle. Une immense cicatrice barrait son visage, lui donnant ce regard qu'abordent ceux qui savent exactement où est leur place dans le monde.