Sur le chemin du retour, les garçons me demandent régulièrement si je vais bien, débâtant sur ce que chacun aurait fait à ce type si on ne le les avait pas arrêtés et comment ils aimeraient se venger avant de divaguer sur la violence des hommes et les travers de la jeunesse dorée de paris.
Je reste silencieuse, riant parfois aux interventions loufoques de Doums et aux moqueries des garçons. Ken se tient près de moi et je sens une proximité naturelle entre nous, même dans ce silence que nous nous accordons.
Nous arrivons devant une espèce de parfumerie étrange devant laquelle un homme se tiens assis en fumant. Il se lève immédiatement à notre approche et commence checker les garçons un à un avant de me lancer un petit hochement de tête et de s'écarter à notre passage. Je suis le groupe, un peu intriguée par l'endroit et nous pénétrons dans l'arrière-boutique qui s'avère être un bar dansant caché. Doums me sourit :
« T'as bien choisi tes partenaires ma belle on va te montrer le tout Paris ici. »
Une femme se lève alors du comptoir, vêtue d'un jean taille basse baggy et d'un top tout droit sorti des années 2000. Elle s'approche de nous et enlace les garçons, leur offrant à chacun un petit surnom affectueux. Ken, toujours à mes côtés me présente :
« Noa voici Safwa notre sœur à tous, Safwa c'est Noa, la docteure qui bossait avec Vanessa pour le gala la semaine dernière.
- Je savais qu'on allait se rencontrer un jour, j'adoooore les médecins, me dit-elle en faisant claquer ses créoles contre mes boucles d'oreilles, une main sur chacune de mes épaules en guise de salutation chaleureuse.
Les garçons rigolent
- Non mais sérieusement, continue-t-elle, parfois je rentre juste dans les hôpitaux pour voir le mouvement de dingue qu'il y a à l'intérieur et les odeurs, je te jure que les odeurs de l'hôpital c'est quelque chose, enfin tu dois savoir mieux que moi...
- Euh oui, enfin, oui. Lui dis-je un peu perdue et amusée à la fois
- Safwa t'es vraiment une tarée sérieux. T'inquiète Noa, elle bosse toute la journée avec des cailloux et des os donc forcément le soir au bar elle se lâche et parle trop mais on s'y fait vite t'inquiète. Me rassure Mekra en m'attrapant par l'épaule.
- Oh qu'est-ce que tu fais dans la vie ? lui demandais-je intriguée
- Je fini mon doctorat en archéologie. Me dit-elle fièrement, je ne suis pas souvent là alors dès que je peux je rends visite à mes enfoirés préférés. D'ailleurs ça fait 2 heures que je vous attends les gars vous abusez sérieux. Se plaint-elle.
- 30 minutes Safwa j'ai bien regardé ton message d'arrivée c'était y a 30 minutes. Lui dit Ken en riant
- Mais 30 minutes seule sans vouuuuus. Dit-elle en écartant les bras pour les enlacer tous. »La soirée se passa merveilleusement bien. Chacun avait sa petite anecdote sur la découverte de lieux surprenants à Paris à raconter pendant que la mienne était en train de se créer. Je commençais petit à petit à me sentir à l'aise avec ce groupe de personnes que je connaissais à peine, aidée par le côté taquin des garçons et leur liberté à faire des blagues sans se prendre la tête ou réfléchir à la réaction de l'autre. L'esprit léger, je me laissait aller et ne réfléchissait plus aux soucis de l'extérieur. Une vraie soirée de lâcher prise après un tsunami d'émotions.
La musique fit de plus en plus d'effet à Safwa qui insista pour que nous allions danser ensembles sur la piste déjà remplie de personnes accolées les unes sur les autres. J'adore danser et c'est donc libérée et joyeuse que j'ai volontiers accompagné Safwa bras dessus bras dessous. Après quelques minutes intenses et amusantes, elle se pencha vers moi et me dit :
« Alors avec lequel tu couches ?
Bouche-bée, je la regardais les sourcils froncés en signe d'incompréhension.
- Aller ces mecs ne s'ouvrent quasiment jamais à des filles, si c'est le cas c'est que tu couches avec l'un d'entre eux, tu peux me le dire je t'aiderai en te donnant des secrets pour le charmer. Me dit-elle en me faisant un clin d'œil.
- Aucun je les connais à peine.
- Roh aller tu peux me le dire je les connais tous par cœur. Tiens d'ailleurs je suis sûre que c'est Mekra. Dit-elle en riant et en tapotant son index sur son nez.
- Non vraiment dis-je un peu gênée, je t'assure, je ne couche avec personne. Je me suis faite emmerder à une soirée qu'on avait en commun et comme on s'est déjà vu au gala ils m'ont proposé de changer d'air ici.
- Oh merde, désolée meuf je ne pensais pas. Désolée vraiment.
- T'inquiète mais sincèrement je ne couche avec personne, on se comprend entre doctorantes, y a trop de choses à gérer à côté. Dis-je en souriant.
- Oui tu m'étonnes, mais fais attention à eux tout de même, ça a déjà causé des tensions dans le groupe des histoires de cul, je ne voudrais pas recoller encore les morceaux.
- Je comprends, mais ne t'inquiète pas je sais me tenir même face à 4 beaux gosses du genre. La rassurais-je. »La soirée touchait à sa fin et le bar se vidait progressivement. Safwa repartit avec Doums invitant Mekra et Framal à les suivre laissant Ken et moi plantés devant la parfumerie.
« Tu veux marcher un peu ? me demanda-t-il les mains dans les poches presque gêné.
- Seulement si tu es à côté de moi et pas à me suivre à 3 mètres derrière comme tu sais si bien le faire. Répondis-je en souriant.
- Vous paraissiez pressée de rentrer je ne voulais pas vous accaparer trop longtemps mademoiselle.
- Pressée je le suis constamment vous vous en rendrez vite compte très cher.
- Cela implique de vous revoir à nouveau et j'ai peur que notre quota rencontres fortuites arrive à terme. Dit-il amusé
- Jamais deux sans trois dit-on.
- J'ai une confidence à te faire. Dit-il ralentissant le pas devenant assez sérieux.
- Ah oui ? Je suis intriguée, mon cœur s'emballe, les phrases annonciatrices d'informations croustillantes et évasives sont une torture douce pour moi.
- Pour moi c'est la 3e fois, je t'ai déjà vue avant.
- Ah oui chez Julie je sais, je t'en avais parlé l'autre jour. Répondis-je un peu déçue qu'il ne se soit pas souvenu de notre conversation.
- Non, dans le métro, la 7, il y a quelques jours, je t'ai vu émue et tu as capté mon attention, on ne voit pas souvent des gens exprimer autre chose qu'une gueule de six pieds de long dans les transports. »
Je sais exactement quand était ce moment. Je le sais parce que je ne lâche que très rarement prise, et que c'est arrivé car je ne tenais plus. Mon esprit était embué et épuisé.
Je laisse alors couler un léger silence mais lourd de sens.
« Désolé je ne voulais pas être intrusif, c'est un peu étrange de ma part excuse-moi. Me dit-il tout penaud.
- Non ne t'inquiète pas, c'est assez touchant que tu observes les gens en fin de compte. C'est une date difficile pour moi mais qui a permis que tu assiste à ce gala par exemple. Je ne sais pas pourquoi je tends une perche pour me livrer à lui. Mais j'ai envie de raconter un peu mon histoire pour une fois.
- Comment ça ?
- J'ai perdu ma petite sœur d'un cancer il y a 5 ans, au beau milieu de mes études de médecine. J'en ai gardé une haine contre moi et contre la maladie que j'ai cultivée. Je me suis battue contre et c'est en partie pour ça que j'ai fondé cette association caritative.
- Quelle horreur, je suis désolé. Dit-il marquant une pause. Une haine contre toi-même ? Comment tu peux ressentir une chose pareille ?
- J'étais étudiante en médecine et je ne savais rien faire, normal me diras-tu en 4e année on ne connait rien encore. Mais je n'ai pas su gérer la situation, elle avait 17 ans... Je sens l'émotion monter, ma voix tremble un peu alors je décide de me taire pour ne pas m'effondrer.
- Je pense que tu le sais évidemment mais ce n'étais pas de ta responsabilité, tu ne pouvais rien faire, la vie a été cruelle mais ce n'est malheureusement la faute de personne, j'imagine que c'est difficile de n'avoir personne à blâmer.
- Oui c'est exactement ça, le deuil est très difficile quand le sort est si injuste et que les solutions n'existent pas pour le contrer...
- Je te comprends... Mais regarde-toi aujourd'hui, tu es une femme incroyable. C'est vrai que je ne te connais que très peu mais tu sembles forte, la tête haute. Lorsque l'on te voit on est inspiré et tu as su user de ce traumatisme pour faire de grandes choses. Tu formes un modèle de courage pour beaucoup de gens, vraiment.
- Dis donc, tu ne serais pas auteur toi pour si bien choisir tes mots ? lui dis-je pour alléger un peu la conversation et détourner l'attention de mes joues qui s'empourprent face à ce flot de compliments.
- Et encore tu ne m'as pas vu jouer du piano. Dit-il comprenant que j'ai envie de changer de sujet
- Non, tu joues du piano ?
- Non. Je laisse un peu de chance aux autres mecs d'être aussi irrésistibles que moi quand même. Me dit-il en me faisant un léger clin d'œil.
- Tu es un modèle de modestie pour beaucoup de gens, vraiment. Dis-je en riantNous arrivons alors sur le pas de ma porte. Tous deux probablement déçu que le chemin ait été aussi court.
« Je prends congé de vous mademoiselle, votre mari n'aimerai pas nous voir ensembles à une heure si tardive. Me dit-il en prenant ma main pour y déposer un léger baiser
- Dieu soit loué que ce mari n'existe que dans mes rêves dans ce cas. » Dis-je troublée mais tentant de garder la face. Je n'arriverai jamais à me faire à ses allusions et n'arrive pas vraiment à en comprendre le sens exact.
Il sourit malicieusement puis pars. Seigneur qu'il est beau.

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Tout avoir
General FictionNoa est une jeune étudiante en médecine, championne de natation, elle vit à 100 à l'heure en essayant de suivre le rythme et d'y ajouter du temps pour la famille, quelques amis et les sorties. La pièce manquante à cet univers presque plein à craquer...