Chapitre 27 : Les confidences de la reine part 2/2

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Finoc m’interrompit, ses yeux écarquillés par la révélation. "Votre Majesté, ce que vous venez de décrire… c’est un Kludde. Une créature légendaire qui enlève les enfants éloignés de la protection de leurs parents pour les emporter dans un lieu qui n’appartient pas à notre monde. Certains disent qu’ils les dévorent, d’autres qu’ils les réduisent en esclavage."

Je le regardai, un frisson parcourant mon échine. "Je n’aurais jamais cru à ce croque-mitaine , " répondis-je d’une voix ferme. "Si les gardes et la gouvernante n’avaient pas confirmé la scène, j’aurais pu penser que mon fils soit devenu fou après son témoignage. Mais les faits sont là."

Je pris une profonde inspiration avant de replonger dans mon récit...

Revenue de la soirée, la reine de Davallion avait hâté le pas vers la chambre de ses enfants, espérant les trouver endormis. À sa surprise, elle avait découvert la gouvernante, les yeux embués de larmes, chantant une berceuse pour apaiser le petit Dylan, caressant doucement ses cheveux. Touchée par une telle dévotion envers son fils, Louisa s’était approchée discrètement, la gouvernante sursautant à son contact.

— C’est suffisant, vous pouvez disposer pour le reste de la soirée, avait dit doucement la reine, posant une main rassurante sur l’épaule de la servante.

Jessica, s’étant inclinée profondément devant la reine, avait éclaté en sanglots, implorant son pardon. Louisa, perplexe et le sourcil levé, n’avait pas compris la raison d’une telle détresse.

— Que se passe-t-il ? Pourquoi ces larmes ? demanda-t-elle, relevant le visage de la gouvernante pour plonger son regard dans le sien.

Les mots semblaient se perdre dans la gorge de Jessica, mais le poids de son silence était éloquent. Le prince Dylan, attiré par le tumulte, se précipita vers la reine en criant "maman", un sourire éclatant illuminant son visage à la vue de sa mère. Louisa, surprise par l’affection si spontanée de son fils, balaya du regard la chambre à la recherche de sa fille.

— Où est Audrey ? interrogea-t-elle.

Dylan, avec l’innocence et la sincérité propres à l’enfance, raconta alors l’histoire incroyable de l’étang mystérieux et du monstre qui avait emporté sa sœur dans les airs. Louisa refusait de croire à un tel conte, jusqu’à ce que la gouvernante, s’agenouillant devant elle dans un geste de supplication, confirma la vérité des mots du prince. Le cœur de la reine se figea, réalisant que l’impensable était arrivé.

Louisa, le visage pâle et les mains tremblantes d’incrédulité, donna l’ordre a l'un des protecteurs de la chambre des enfants, de rassembler immédiatement tous ceux qui avaient été témoins de l’incident. Lorsqu'il revint avec les gardes concernés, leurs visages graves et leurs voix basses confirmèrent l’histoire inimaginable, enveloppant la pièce d’un silence glacial, seulement interrompu par les sanglots étouffés de la gouvernante.

— Parlez ! Que s’est-il passé exactement ? demanda la reine d'une voix tremblante.

Les gardes échangèrent des regards hésitants avant de répondre.

— Votre Majesté, la créature... elle a emporté la princesse Audrey, dit l’un d'entre eux.

Les sanglots de Jessica redoublèrent, remplissant la pièce d'une tristesse palpable.

— Silence ! hurla soudain la reine, ses émotions débordants.

Louisa, submergée par la douleur et la colère, se tourna brusquement vers sa servante. Dans un geste emporté par la tempête de sa fureur, elle la gifla fortement, laissant une marque rouge sur sa joue. La gouvernante recula, stupéfaite et terrorisée, une main sur sa joue brûlante.

— C'est de ta faute ! gronda Louisa, les yeux flamboyants de rage.

Puis, sans un mot de plus, La reine quitta la pièce, sa démarche raide trahissant l'ampleur de son désespoir. Avant de partir, elle lança un ordre tranchant :

— Saisissez cette femme !

Les gardes s’avancèrent, et prirent la gouvernante par les bras. La pauvre femme, dont le destin venait de basculer dans l’abîme, se laissa entraîner, ses larmes se mêlant aux souvenirs des enfants qu’elle aimait tant.

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Le soleil s’était levé sur un royaume en deuil, et la vérité avait été tordue en un mensonge cruel par la voix de l’annonceur royal. Devant une foule silencieuse, il avait proclamé que la gouvernante avait commis l’acte le plus impardonnable : le meurtre de la princesse Audrey. La servante, entravée et réduite au silence par un bâillon, avait été traînée devant tous pour subir une exécution brutale.

Devant les sujets du royaume. Les montures de quatre cavaliers, imposantes et nerveuses, avaient chacune une corde attachée à leurs pieds, l’autre extrémité liée aux membres de la gouvernante accusée.

— Les chevaux s’agitent…avait murmuré un spectateur, sa voix tremblante trahissant sa peur.

Le bourreau, un homme doté d'un masque de fer en pique, de stature imposante, avait alors donné le signal. Un claquement sec avait retenti, et les chevaux, comme s’ils avaient compris l’ordre, s’étaient élancés dans des directions opposées.

Les cavaliers se déplaçants brusquement dans un élan qui avait écartelée l'accusée, déchirant son corps sous les yeux de la foule.
Le supplice de Jessica avait été d'une violence inouïe, l’horreur de l’acte avait marqué les esprits à jamais.

— Que la justice soit faite. avait déclaré un autre habitant, bien que son visage pâle montrait son dégoût.

— C’est tout ce que mérite cette chienne, tueuse d'enfant…avait conclu un jeune garde, bien que sa voix eût vacillé, trahissant son malaise.

La reine Louisa, debout, le visage fermé, avait observé la scène sans un mot. Son cœur, autrefois plein de compassion, semblait s’être transformé en pierre face à la cruauté de la sentence qu’elle avait elle-même ordonnée.

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Une fois mon récit terminé, je me tenais assise sur ma chaise, regardant le médecin s’éloigner dans le couloir sombre. "Finoc, " l’appelai-je d’une voix qui portait plus qu’un simple appel. Il se retourna, une question non formulée dans son regard.

"Vous savez ce que signifie le serment de confidentialité que vous avez prêté afin de devenir le médecin du royaume," dis-je, mon ton ferme mais empreint d’une supplique silencieuse. "J’espère que vous comprendrez l’importance de garder le secret sur… sur les circonstances particulières de la naissance de mes enfants."

Il aquiesca d'un discret hochement de tête avant de s'en aller.
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Petit rappel : Pour ceux qui ont oublié ou qui s'interrogent sur le médecin Finoc, ce n'est pas sa première apparition. Il était déjà présent au chapitre 15, tout comme la reine, son fils, ainsi que les frères Roy, au moment où Vassilo a accédé à son poste de commandant.

Funeste Origine - Tome 1: Des hommes et des monstresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant