Entre Ombres et Lumières

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Les premiers rayons du soleil pénètrent dans la chambre, chassant les ombres de la nuit. Je me réveille, encore sous le choc du vol et des événements de la veille. Le sommeil m'a fui, et mes pensées tournent en boucle. Les mots de Cheryl et Phillip résonnent dans ma tête : "On doit vérifier tout ce qu'on peut."

Je me lève avec une lourdeur dans le cœur, sachant que la journée sera difficile. L'angoisse du vol laisse place à une détermination désespérée. Je dois agir vite pour retrouver l'argent et sauver Marc Arthur. Le quartier a besoin de savoir ce qui s'est passé, mais je redoute le moment où nous devrons tout révéler.

En attendant, je décide de me rendre à la maison de Tantie Solange pour lui donner des nouvelles de l'avancée de la collecte. Je suis encore déprimée, mais j'espère que cette visite me donnera un peu de réconfort et me permettra de faire le point sur la situation.

À mon arrivée, Tantie Solange est assise sur le banc devant sa maison, le regard perdu dans le vide. Ses traits sont fatigués, mais elle se redresse lorsqu'elle me voit.

« Maureen, ma chérie, je suis si contente de te voir. Comment ça s'est passé avec la kermesse ? » demande-t-elle, un sourire fatigué aux lèvres.

Je prends une profonde inspiration avant de lui expliquer. « Tantie Solange, nous avons réussi à organiser la kermesse et à recueillir une somme importante. Mais il y a eu un problème... »

Je lui raconte le vol, en omettant certains détails pour ne pas l'inquiéter davantage. Sa réaction est celle d'une profonde inquiétude et d'un désespoir partagé. « Oh, ma pauvre enfant, quel coup dur. Nous avons déjà tant de difficultés, et maintenant cela. »

Nous passons un moment à discuter de ce que nous pouvons faire. Tantie Solange suggère de faire appel à la communauté pour tenter de retrouver les billets volés. Elle propose également de contacter les autorités pour signaler le vol.

Le commissariat se dresse comme un bloc de béton austère au milieu de la rue. Dès que nous franchissons les portes, nous sommes accueillis par le tumulte habituel : des téléphones qui sonnent, des policiers qui s'affairent, et une chaleur oppressante.

Nous nous dirigeons vers le bureau d'accueil, où une femme aux lunettes épaisses et à l'air fatigué est assise derrière une pile de dossiers. Elle lève les yeux à notre arrivée, nous regardant avec un mélange de curiosité et d'indifférence.

« Bonjour, nous venons signaler un vol », dis-je, essayant de rester calme malgré le stress.

Elle nous fait signe d'attendre et nous invite à patienter. Après ce qui semble une éternité, un policier en uniforme nous appelle. Son regard est perçant et, bien que professionnel, il dégage une certaine froideur. Nous le suivons jusqu'à une petite pièce aux murs jaunis, avec un bureau en bois, une chaise métallique, et un fauteuil dépareillé. Une fenêtre haute et étroite permet à peine de voir l'extérieur.

« Dites-moi ce qui s'est passé », ordonne le policier, posant une liasse de papiers sur la table.

Je prends une profonde inspiration et explique en détail le vol survenu chez nous. Je décris la boîte où l'argent était gardé, comment nous avons découvert le vol, et le montant exact manquant : 1 200 000 francs CFA. Le policier écoute attentivement, prenant des notes tout en jetant un coup d'œil distrait à l'horloge au mur.

« Vous avez dit que la boîte était verrouillée », dit-il en regardant ses notes. « Vous avez une idée de comment les voleurs ont pu accéder à l'argent ? »

Je secoue la tête. « Non, je ne sais pas. On a verrouillé la boîte la veille au soir, et personne d'autre n'avait la clé. »

Le policier soupire, visiblement peu impressionné. « Bon. On va voir ce qu'on peut faire. Mais les enquêtes prennent du temps. Et avec ce qu'on a, c'est pas gagné. »

Il se lève, nous demande de le suivre dans une autre pièce. Cette fois-ci, c'est un petit bureau encombré avec des piles de dossiers éparpillées. Un autre policier, plus jeune, semble plus attentif. Nous lui expliquons encore une fois les faits. Pendant ce temps, je remarque que l'odeur de tabac froid envahit la pièce, et les murs sont couverts de vieux posters de prévention routière.

« Vous avez des suspects en tête ? » demande le policier jeune, d'un ton plus engageant.

Je réponds honnêtement. « Non, aucun. On ne sait même pas comment les voleurs ont pu entrer dans la maison. »

Le policier prend des notes avec application, mais ses gestes semblent peu assurés. Le plus vieux des deux policiers, qui reste dans un coin, regarde distraitement par la fenêtre. Une conversation entre eux commence, chuchotée, comme s'ils discutaient de quelque chose que je ne comprends pas.

Après un long moment, le plus âgé revient à nous. « On va envoyer quelqu'un vérifier votre maison. Mais je dois vous prévenir, ça peut prendre du temps. Et avec la situation actuelle, on n'a pas beaucoup de moyens. »

Nous acquiesçons, déçus mais résignés. Nous sortons du commissariat, l'esprit accablé. Tantie Solange me prend le bras, et nous marchons en silence. Le chemin du retour semble interminable, et la chaleur du jour n'aide en rien.

Les jours passent, et l'enquête semble stagnante. Les policiers ne reviennent jamais nous donner de nouvelles concrètes. Les rares fois où nous les contactons, nous recevons des réponses évasives. « On est sur le coup, mais c'est compliqué. » Cette phrase devient notre refrain insupportable.

L'absence de progrès, le manque de ressources, et l'apparente indifférence des policiers rendent l'enquête presque inutile. On entend des rumeurs de corruption et de népotisme dans les couloirs du commissariat. Certains disent que sans relations ou argent, il est presque impossible d'obtenir justice. Nous en faisons l'expérience douloureuse.

Les semaines passent, et malgré nos efforts pour suivre les pistes et contacter les autorités, l'affaire semble se perdre dans les méandres du système. Les espoirs de récupérer l'argent diminuent à mesure que les jours passent. L'enquête, censée nous apporter des réponses, ne fait qu'alourdir notre sentiment d'impuissance.

La réalité de notre situation s'impose lentement : les affaires de vol dans notre quartier ne se résolvent pas facilement, surtout quand on n'a pas de poids dans le système. Les paroles de Tantie Solange, pleines de désespoir, résonnent encore dans ma tête : « On doit avancer malgré tout. »

Mais comment avancer quand on est bloqué dans un système qui ne rend pas justice ?

DJOROKAOù les histoires vivent. Découvrez maintenant