La crise

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La nuit était tombée, enveloppant le CHU de Cocody d'une obscurité oppressante. L'attente était devenue insupportable. Dans la salle d'attente, l'air était lourd, chargé de tension et de désespoir. Les murmures des familles autour de nous se mêlaient aux bips des machines, créant une cacophonie presque étouffante.

Marc Arthur, jusque-là calme, commençait à montrer des signes de malaise. Son visage, autrefois serein malgré la douleur, se crispait de plus en plus. Il tentait de sourire, de me rassurer, mais je pouvais voir à travers ce masque de bravoure. Il avait mal. Très mal. Ses mains tremblaient légèrement, et sa respiration devenait de plus en plus saccadée.

Tantie Solange, toujours à ses côtés, essayait de garder son calme. Elle connaissait ces signes mieux que quiconque. La crise de drépanocytose SS n'était plus loin. Soudain, Marc Arthur gémit, un son sourd, étouffé, qui me glaça le sang. C'était comme si la douleur l'engloutissait. Je sentis une boule d'angoisse monter en moi.

Je voulais rester forte, mais la vision de mon ami souffrant était trop dure à supporter. Je me suis levée précipitamment, le cœur battant à tout rompre. Les larmes brouillaient ma vue, et avant que Tantie Solange ne puisse me retenir, j'ai quitté la salle. Je ne pouvais pas rester là. Voir Marc Arthur dans cet état me détruisait de l'intérieur.

Je me suis réfugiée dans un coin du couloir, essayant de reprendre mon souffle. Mon cœur hurlait de douleur, et l'idée que Marc Arthur puisse ne pas s'en sortir était insupportable.

Tantie Solange a appelé Tonton François après avoir vu l'état de Marc Arthur se détériorer. Je l'entendais d'où j'étais, le téléphone collé à son oreille. Sa voix tremblait, mélange de colère et de désespoir. « Allo, François ? Il faut que tu viennes, c'est grave. Ils ne le prennent toujours pas en charge, et il souffre tellement. Je ne sais plus quoi faire, j'ai tout essayé. »

Tonton François arriva rapidement, le visage fermé, la mâchoire crispée. Il entra dans la salle sans un mot, se dirigeant directement vers Marc Arthur. Le voir dans cet état a déclenché une vague de fureur silencieuse en lui. Il savait que le temps pressait, et que cette fois, il ne fallait pas compter sur la patience. Ils devaient agir vite, mais même lui semblait impuissant face à la bureaucratie médicale qui nous retenait en otage.

Je ne pouvais plus rester à l'hôpital. J'ai pris la décision de rentrer à la maison, incapable de supporter une minute de plus cette vision d'horreur. J'étais au bord de l'explosion. Chaque pas vers la sortie était un effort monumental pour contenir mes émotions.

En arrivant à la maison, l'atmosphère était tout aussi lourde. Ma grand-mère, assise dans son fauteuil, m'attendait avec une expression inquiète. Cheryl et Phillip étaient là aussi, les yeux remplis de questions. « Maureen, comment va Marc Arthur ? », demanda ma grand-mère avec une voix douce mais anxieuse.

Je les regardai tous sans rien dire. La douleur, la colère, l'inquiétude se mélangeaient en moi comme un ouragan. Je sentais que si j'ouvrais la bouche, tout ce que j'avais essayé de contenir sortirait d'un coup. Alors, je n'ai rien dit. Je me suis dirigée vers ma chambre sans un mot, ignorant leurs regards insistants.

Enfermée dans ma chambre, j'ai laissé les larmes couler. Je n'avais plus la force de les retenir. Dans un cri déchirant, j'ai supplié Dieu de sauver Marc Arthur. « Seigneur, sauve-le ! Pourquoi tu permets ça ? Pourquoi, Seigneur, pourquoi ? » Les sanglots m'étouffaient, et je me suis effondrée sur mon lit, submergée par l'injustice de la situation.

Je me sentais si petite, si impuissante. Je savais que je n'étais pas en colère contre Dieu, mais contre cette situation qui me dépassait, contre ce système qui mettait la vie de mon ami en danger. Je voulais croire, je voulais avoir foi, mais à cet instant, tout semblait si sombre, si désespéré.

Dans cette nuit noire, je n'avais que mes prières pour me réconforter, même si elles étaient remplies de doutes et de douleur.

DJOROKAOù les histoires vivent. Découvrez maintenant