20 : 𝐷𝑒𝑒𝑝 𝑖𝑛

20 3 3
                                    

« I watched a change in you. It's like you never had wings. » Deftones

Point de vue Eliott

La peur m'a saisi une première fois lorsque je ne l'ai pas vu m'attendre devant l'université, elle m'a pris aux tripes jusqu'à me donner la nausée. Des tremblements incontrôlables ont forcé mes sens à s'alerter pour lui courir après.

L'envie de la retrouver était vitale, appuyée d'une force métaphysique incompréhensible. Le moteur de ma moto n'avait jamais autant rugi, à l'image de la peur qui brouillait ma raison.

La peur m'a de nouveau saisi, une deuxième fois, lorsque je l'ai vu faire face à ce taré qui la suivait. Hors de moi, j'avais envie de bondir pour lui arracher la tête. Un simple crochet du droit aurait suffi à l'écarter.

Aucun mot ne serait suffisant pour qualifier la colère qui s'emparait de moi à cet instant. Jamais je n'aurais pensé éprouver une telle rage pour quelqu'un, pour une femme, pour elle.

La peur m'a enfin saisi une troisième fois ce soir lorsque Miranda m'a appelé du centre pour m'avertir d'une nouvelle crise de la part de mon demi-frère, rien que ça. Une crise plus forte, plus violence, une crise qui a fait une victime.

Une infirmière qui n'avait rien demandé, qui n'était là que pour faire son travail. Il a frappé une femme, quelqu'un qui faisait tout l'aider.

Je ne lui pardonnerais jamais pour ça, ni pour toutes ces fois où il s'est plongé dans son mal-être en me repoussant pour éviter de s'en sortir. Noah le sait, dès qu'il ira mieux, il retournera chez notre père.

Sauf que je ne peux pas le laisser faire, je ne peux pas lui donner ce qu'il veut sous principe qu'il serait une victime. Notre père est bien des choses mais nous savons tous les deux qu'il est innocent, il n'a jamais été violent que ce soit physiquement ou mentalement auprès de lui.

Il a été un bon père, même si à la mort de sa mère, il s'est renfermé sur lui-même et nous a ignorés pour se noyer dans ses idées sombres. Un homme perdu, loin du quai, sans phare pour le guider.

J'aurai pu l'accueillir mais désormais la donne a changé, il ne s'agit plus que de lui mais de sa violence, de la colère qui le met dans une rage si forte qu'il perd le contrôle de lui-même.

Il n'est pas prêt. C'est ce que je me répète en boucle en attendant que le feu passe au vert. Je n'entends même plus la musique qui tourne dans la voiture.

Je ne sens que le parfum de Zoë, son aura douce et délicate qui s'évertue à me haïr à cause de son manque de confiance. Je ne peux même pas la blâmer car elle risque d'avoir raison.

Ses traits sont détendus et son air est songeur, la tête posée pour la vitre, elle suit de très près la course des gouttes de pluie qu'elle s'est imaginée. Elle les saisit sans les épargner, elle sait d'emblée qui va gagner mais reste concentrée pour leur laisser le bénéfice du doute.

Aucune question ne franchit la barrière de ses lèvres, elle serait pourtant en droit de le faire. Je l'ai traînée dans la voiture sans lui expliquer quoi que ce soit. J'apprécie cette qualité de discrétion, les secrets ne sont que trop bien gardés en une personne si pure.

Si calme tel un lac laissant flotter des pétales de roses, si élégante à la manière dont le signe se déplacer vers son amant, si belle à la façon dont le cadre idyllique rend tout cela si apaisant.

C'est le somptueux cygne blanc qui se pavanne entre les nénuphare, cherchant désespérément sa moitié sans jamais la trouver.

Elle est une œuvre d'art qui attire le regard, douce comme ce drap fin qui recouvre la statue de la même pierre. Je m'en délecte sans m'en lasser et cela m'effraie; je ne suis rien sans ce regard qui m'embellit rien qu'à la façon dont elle m'observe quand je ne la regarde pas.

Begin againOù les histoires vivent. Découvrez maintenant