02. Invitation.

1K 80 125
                                        










HEESEUNG.

J'entends à peine ce qui se passe autour, malgré mon ouïe fine.

Nous longeons le couloir de l'école de business, Jay et moi. Il fait déjà froid, avec l'automne qui dirige la météo. Le ciel se dégrade et se peint en gris. Une pluie gracile se déverse sur la ville. Ses gouttelettes rampent le long des vitres.

Nous nous arrêtons à l'entrée de la bibliothèque. Jay sort son gel qu'il se passe sur ses mains. Ce maniaque de la propreté a du m'en proposer. Or je suis trop perdu dans mes pensées pour l'entendre.

Sunghoon est plus loin, près d'une étagère.

Le futur avocat, dans sa veste et ses lunettes de vues habituelles, nous fait signe. Grand, athlétique, une chevelure ébène et soyeuse. Un peu comme Jay. Sauf que ce dernier — dans la même école que moi — a coupé ses longueurs la semaine passé. Et rares sont les fois où je ne le trouve pas en costume. C'est un vrai petit chef d'entreprise. Ces derniers temps, on remarque qu'il se fait plus désirable pour les beaux yeux d'une personne.

— Laisse tomber, on l'a perdu depuis hier, soupire-t-il, me faisant prendre conscience qu'il y a des minutes qu'une discussion a été entamé.

Sunghoon me fixe d'un air blasé, sous l'expression stricte que lui confère sa paire de lunettes et sa veste repassée avec soin.

— Heeseung, tu pue.

Il retrousse son nez. Ils sont comme des frères pour moi. Au plus vrai, des cousins éloignés. Car nous venons de la même meute de loups, avec ses nombreuses branches.

— On dirait franchement un ado qui ne sait pas tenir ses phéromones, renchérit Jay.

— Ok, dis-je. Ce n'est pas comme si tu t'étais mis au sport juste pour courir derrière un chat. Ce qui, entre nous, fais très tueur en série. Mais après tout, ce n'est pas un concours je suppose.

— Jay, il n'a pas tord. En fait, il n'y en a pas un pour rattraper l'autre. Vous êtes tous les deux intenables.

— Attendez, laissez-moi m'expliquer. Ce n'est pas ce que tu crois. Je fais du sport parce que c'est bon pour le cardio.

— Tu emprunte le même chemin que ton chat de gouttière alors que son parcours est à l'opposé de ton dortoir Jay, lui fais-je comprendre.

Il doit arrêter de lutter. Son comportement est déplorable. J'ignore le regard de mon ami qui se décompose, ses lèvres légèrement ouvertes.

— Le culot ?! Alors déjà, ce n'est pas un chat de gouttière. Mais un magnifique—

— Jay tu me dégoûte, le juge Sunghoon sans retenu.

J'affiche un sourire en coin, fier de moi. Nous formons un drôle de trio je dois le reconnaître. Chacun semble y avoir un rôle qui constitue une sorte d'équilibre presque parfait, je dirais.

— Moi au moins je ne l'ai pas marqué !

Je me tends.

Je sais à quoi il fait référence. Je grommèle tout bas, une main dans ma poche, l'autre passant dans mes cheveux dont la teinture s'étiole.

— Je ne l'ai pas marqué, je nie.

— Il a senti ton odeur toute la journée, Heeseung.

Je n'ai rien à dire. Déjà que je suis un cas à part au sein de la meute — que je ne fonctionne pas comme les autres loups — si mon odeur dure plus qu'il ne le faut, devrais-je être encore surpris ? Le bruit d'un livre qu'on ferme éclate ma bulle de pensées.

𝐇𝐘𝐁𝐑𝐈𝐃𝐄𝐒 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant