El secreto de Hanna

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Barcelone, Espagne, Février 2024
Hanna Torres

Je me réveillai avec une légère migraine, une conséquence évidente de la soirée de la veille. Le goût amer de l'alcool persistait encore sur ma langue, et je regrettais déjà mes excès. Je roulai sur le côté, attrapant mon téléphone qui vibrait doucement sur la table de chevet. En le déverrouillant, je vis une série de notifications : des messages, des appels manqués, mais aussi des photos de la soirée, dont certaines me firent grimacer.

Je balayai les notifications sur mon téléphone, essayant de calmer la vague d'anxiété qui montait en moi. Ce n'était pas la première fois que je me retrouvais dans une situation compliquée, mais celle-ci me rendait particulièrement nerveuse. Ce baiser avec Léano la veille... Je n'arrêtais pas d'y penser. Ce n'était pas censé arriver, et maintenant, je devais trouver un moyen d'aborder ce sujet avec lui, de mettre les choses au clair sans que tout devienne encore plus bizarre.

Je sortis de chez moi, mon sac sur l'épaule, en essayant de ne pas trop réfléchir.

Arrivée devant les grilles du lycée, j'hésitai une seconde avant d'entrer. Peut-être que je pourrais éviter Léano aujourd'hui, juste le temps de trouver les bons mots. Mais je savais que c'était une illusion. Le lycée n'était pas si grand.

Les couloirs étaient déjà animés. Des groupes d'élèves discutaient bruyamment. J'essayai de me fondre dans la masse, la tête baissée, espérant passer inaperçue. Mais mes pensées ne me laissaient pas de répit.

Je tournai au coin d'un couloir, perdue dans mes réflexions, et c'est là que je le vis. Léano, appuyé contre un casier, parlait à un de ses amis. Il ne m'avait pas encore vue, et j'eus une furieuse envie de faire demi-tour, de m'éloigner le plus vite possible.

Je pris une grande inspiration et continuai à avancer. Mon cœur battait à tout rompre, et je devais me forcer à garder un pas normal. Alors que je m'approchais, Léano leva les yeux et nos regards se croisèrent. Il murmura quelque chose à son ami qui s'éloigna, me laissant seule avec lui.

Je m'arrêtai devant lui, tentant de garder une expression neutre, bien que je sentisse mes joues s'échauffer sous la pression. « Salut » Ma voix sonnait plus faible que je ne l'aurais voulu.

« Salut, Hanna, » répondit-il, un sourire timide aux lèvres. « On doit parler, non ? À propos de ce qui s'est passé hier soir. »

Je hochai la tête, cherchant les mots justes. « Oui.. Écoute, hier soir... j'ai pas été moi-même. » J'essayai de maintenir le contact visuel, mais c'était difficile.

Léano me regarda, attentif, mais avec une certaine confusion dans les yeux. « J'ai bien compris...Mais ça m'a surpris. J'aimerais juste comprendre ce que ça signifiait. »

Son ton était calme, mais je pouvais sentir qu'il attendait une réponse honnête. Mon esprit tournait à toute allure, cherchant une explication qui ne serait ni trop brutale, ni trop vague. « Hier soir, c'était... » Je m'interrompis. « C'était un moment où j'étais confuse, où j'essayais de... je sais pas, d'oublier certaines choses. Mais ce baiser, c'était... c'était une erreur, et je suis désolée si ça t'a donné de faux espoirs. »

Je vis son expression se durcir légèrement, et mon cœur se serra encore plus. « Une erreur, hein ? » Il resta silencieux pendant un instant, son regard fixé sur moi, comme s'il essayait de comprendre. « Et c'est ce que tu ressens vraiment ? »

Les mots me manquaient. J'avais peur de le blesser davantage, mais je ne pouvais pas mentir non plus. « Je suis désolée, » murmurai-je, sentant la culpabilité me ronger de l'intérieur. « Je ne voulais pas te faire de mal. »

Léano hocha la tête, son regard se perdant un instant dans le vide avant de revenir vers moi. « D'accord. C'est clair, je suppose. » Sa voix était plus distante, comme s'il essayait de se protéger. Il tenta un sourire, mais je pouvais voir qu'il était forcé. « On oublie ça et on passe à autre chose, alors ? »

Je sentis un poids s'enlever de mes épaules, mais ce soulagement était teinté d'amertume. « Oui, on oublie. »

Le reste de la journée se déroula rapidement, comme un film en accéléré. Les heures semblaient s'étirer et se contracter en même temps, chaque cours se fondant dans le suivant, sans que je sois vraiment capable de me concentrer.

Quand la sonnerie annonçant la fin des cours retentit, je ressentis un immense soulagement. Mon sac sur l'épaule, je me précipitai vers la sortie.

J'avançai machinalement, mes pensées ailleurs, jusqu'à ce que je franchisse enfin la porte de chez moi.

Je me dirigeai directement dans ma chambre, m'affalant sur mon lit avec un soupir. J'avais besoin de faire quelque chose, n'importe quoi, pour me vider la tête. C'est alors que mon regard se posa sur un vieux carton au fond de mon placard, un de ceux que je n'avais pas encore déballés depuis mon arrivée à Barcelone. Un élan soudain de motivation me poussa à me lever et à l'ouvrir.

Je tirai le carton vers moi et commençai à en sortir son contenu : des livres, des vêtements que je ne portais plus, et des souvenirs, ceux que j'avais laissés derrière moi en quittant Madrid. Chaque objet semblait me ramener à un moment précis, à une version de moi-même que j'essayais d'oublier. Et puis, au fond du carton, je tombai sur un petit carnet à la couverture usée. Mon cœur se serra en le reconnaissant.

C'était mon journal intime, celui que je tenais durant mes années de seconde et première à Madrid.

Je l'ouvris, et les premières pages me ramenèrent instantanément à cette période de ma vie, une époque où tout semblait différent, où j'étais une autre personne.

Je feuilletai rapidement les pages jusqu'à ce que mes yeux se posent sur un passage particulièrement marqué.

« Cher Journal,

Aujourd'hui, c'est l'enfer. Mateo, mon copain, a complètement pété un câble. Plutôt que de me soutenir, il s'est retourné contre moi. Il est devenu pote avec Elora et Anais, les deux filles qui me harcèlent depuis des semaines.

Mateo s'est dit que ce serait fun de répandre des rumeurs dégueulasses sur moi. Mais ce n'est pas tout : il a aussi partagé des montages truqués de moi dans des situations trop humiliantes. Les gens ont commencé à parler de ça, et maintenant tout le monde se fout de ma gueule.

Je suis passée de l'enfer à la honte en un rien de temps. Les gens me regardent, rient et chuchotent derrière mon dos.

J'ai dû rentrer chez moi en pleurant. Ma mère a vu que quelque chose n'allait pas, mais je n'ai pas eu le courage de tout lui dire.

Je me sens tellement seule et désemparée. C'est dur de se sentir comme une paria. Je ne sais pas comment je vais faire pour affronter tout ça demain. J'ai honte, et je me sens complètement perdue. »

Je reposai le journal, le cœur lourd. En lisant ces passages, je me retrouvai confrontée à une partie de moi que je préférais oublier. Chaque mot semblait raviver les cicatrices de cette époque sombre, révélant pourquoi j'avais tant de mal à faire confiance aux autres.

Je savais que j'avais changé. Je ne pouvais plus laisser quiconque me traiter avec le mépris que j'avais connu.

Mais ce secret, je devais le garder enfoui. Si quelqu'un découvrissait la vérité, cela pourrait rouvrir des blessures que j'avais mis tant de temps à cicatriser. Je ne voulais pas que ce passé me rattrape ici, à Barcelone, ni que quiconque utilise ces souvenirs douloureux contre moi. La honte et la peur de revivre ce cauchemar me poussaient à protéger ce secret coûte que coûte.

I'll score for you - Hector FortOù les histoires vivent. Découvrez maintenant