Chapitre 18 - Quelqu'un ment

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De nouveau entre ces quatre murs. Mais cette fois, mes pensées se tournent vers d'autres émotions. Je ne cherche plus à fuir Alek mais à m'enterrer huit pieds sous terre. Bon sang, ce que j'ai honte. Honte d'avoir cédée devant celui que je devrais considérer comme mon ennemi, celui dont je devrais me méfier. Non pas lui ouvrir mes cuisses. Mais également honte d'avoir fausser compagnie à Helena de cette manière. En une conversation, elle m'a apporté tellement. Je m'en veux de le lui rendre comme ça. C'était juste trop d'un coup, je ne pouvais plus rester sur cette chaise à écouter mon monde s'écrouler encore et encore.

Et Alek n'a fait que rajouter une couche à mon calvaire. La façon dont il s'est permis de me parler, comme si je lui devais quelque chose, comme si nous étions plus que des inconnus. Il est sur mon dos constamment depuis cette fameuse conversation. Où est passé l'homme insouciant et simple que j'ai rencontré ?

Je ne sais pas trop ce qu'il s'est passé dans ma tête. Toutes mes émotions ont juste explosées. Mais si on m'avait dit que la colère pouvait mener à une telle passion, une telle perte de contrôle...
Ce feu vibrait dans chaque parcelle de ma peau, me consumant à mesure que sa pulpe digitale se frayait un chemin sur mon épiderme, laissant dans son sillage mes poils hérissés.

C'était... Je secoue la tête pour m'arrêter là. C'était la dernière fois. De toute façon, ce n'est pas comme s'il avait vraiment envie de recommencer. La manière dont il m'a repoussé était assez explicite. Je suis partie la tête haute mais avec la dignité légèrement effleurée.

Il est temps de se re-concentrer sur l'objectif Sasha.

Je récupère le porte document marron qui gisait sur ma table de nuit et laisse mes doigts parcourir le tissu lisse. J'ajoute une barre à la suite des précédentes. Il en trône maintenant six en haut du papier. Je souffle. Avec tout ça, j'en ai oublié le démon qui rode. Je me suis reposée sur mes lauriers, insouciante du danger. Ces barres sont le rappel de mon angoisse qui grimpe et du temps qui presse. Je me suis laissée aller. Rien de devrait compter d'autres que détruire Nikolas et découvrir la vérité. Mais les propos d'Alek me reviennent en tête ce qui a le don de me foutre en rogne. Je parcours le premier document, cherchant des mots sur lesquels déverser mes pensées.

Il s'agit de cette fameuse lettre, récupérée dans le bureau qui peuple mes cauchemars. Je ne la connais que trop bien et passe à la suite. Cette fois-ci, il s'agit d'une photo. Noah se tient derrière moi, un air triomphant sur le visage. Dans sa main droite, un panier remplis de chocolat contraste avec celui de la petite fille. Avec ses couettes en palmier sur le crâne et son air boudeur, elle semble déjà prête à arracher les yeux de son jumeau. Je me mords l'intérieur de la lèvre pour ne pas pleurer.

Il est temps de passer à un autre document. Cette lettre m'est destinée cette fois. De son écriture serrée, Noah me donne des nouvelles de sa vie à la marine. Je fixe chaque mot comme s'ils avaient un sens caché et qu'avec assez d'intensité dans le regard, je pourrais les décrypter. Mais non, ce ne sont que des mots basiques. Dénués de sens à mon gout. Noah a toujours eu dû mal à exprimer ses sentiments, alors à l'écrit, c'était encore pire. Je me rappelle vouloir plus à cette époque que ces vagues informations sur la pluie et le beau temps, quelque chose de plus personnel. Vouloir mon frère dans toute sa complexité. Être sure qu'il va réellement bien, qu'il est heureux dans sa nouvelle vie.

Pour une raison que j'ignore, un détail me froisse. Je relis encore et encore les mêmes mots, sans trouver l'origine de mon trouble. Ma cage thoracique se bloque lorsque je tilte. Noah était l'opposé de moi, toujours à vivre au jour le jour, plein de légèreté. L'une des seules fois où je l'ai vu angoissé, c'est lorsque maman a frôlé le coma éthylique. Il a développé ce tic où il se frottait tellement la barbe qu'elle ne poussait plus à certains endroits. Je relis cette partie d'un œil nouveau.

L'ombre des vaguesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant