Chapitre 12

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Indila - Love Story

Le bruit des machines médicales résonnait dans la pièce, régulier, mécanique, comme si elles cherchaient à rappeler à Nyx que la vie continuait, même si son cœur s'était arrêté. Chaque bip, chaque son électronique lui donnait envie de hurler, de briser quelque chose, mais elle ne le pouvait pas. Son corps était faible, trop faible pour exprimer la rage qui grondait en elle. Son esprit, en revanche, était en ébullition.

Elle restait là, allongée, les yeux fixés sur le plafond, comptant les secondes. Chaque battement de son cœur lui rappelait tout ce qu'elle avait perdu, et tout ce qu'elle ne retrouverait jamais. Ses bébés. Ils n'étaient plus là, ils n'avaient peut-être même jamais existé. Ils n'étaient qu'un rêve, un rêve qu'elle avait touché du bout des doigts, mais qui s'était effondré avant même qu'elle ne puisse vraiment les connaître.

Eryx venait la voir chaque jour. Il lui parlait, il lui tenait la main, mais elle ne l'entendait pas vraiment. Sa voix lui semblait lointaine, comme une mélodie étouffée par le vacarme de sa propre souffrance. Elle voyait son visage, épuisé, angoissé, mais cela ne suffisait pas. Rien ne suffisait plus.

Elle était perdue.

Les souvenirs de son rêve la hantaient encore. Elle voyait ses enfants courir dans les champs, elle sentait leurs petites mains se refermer autour des siennes. Leurs rires résonnaient dans sa tête comme une douce torture. Ils étaient là, si réels, si proches... mais elle les avait perdus. Tout s'était effondré, et elle n'avait rien pu faire pour les protéger. Elle n'avait pas pu les sauver.

Ce matin-là, elle tourna la tête vers Eryx. Cela faisait des jours qu'elle ne lui avait pas vraiment parlé. Les mots étaient restés bloqués dans sa gorge, comme des pierres impossibles à avaler. Mais aujourd'hui, quelque chose bouillait en elle, quelque chose devait sortir.

"Tu avais raison tu sais..."

Sa voix n'était qu'un murmure, rauque, presque inaudible, mais les mots frappèrent Eryx comme une gifle. Il fronça les sourcils, surpris par le ton sec de Nyx. Il se tourna vers elle, cherchant à comprendre ce qu'elle voulait dire.

"Comment ça ?" demanda-t-il, inquiet.

Nyx ne répondit pas tout de suite. Ses yeux étaient fixes, perdus quelque part entre la douleur et la colère froide. Elle inspira profondément, comme si chaque mot lui coûtait un effort immense.

"Lorsque tu m'as capturée... tu te souviens de ce que tu m'as dit ?" commença-t-elle, sa voix tremblante mais chargée de rancune. "Tu m'as dit que tu allais me détruire psychologiquement." Elle s'interrompit, laissant le silence s'étirer, et Eryx sentit une boule se former dans sa gorge. Il se souvenait de ces mots. Chaque détail de cette nuit lui revenait en mémoire, brutalement.

Nyx serra le drap du lit entre ses doigts, ses jointures blanchissant sous la pression. Sa respiration était saccadée, et elle ferma les yeux un instant, comme si le simple fait de parler lui arrachait une partie de son âme.

"Voilà pourquoi je ne voulais pas d'enfants."

Un choc silencieux envahit la pièce. Eryx resta figé, les yeux écarquillés, incapable de répondre. Ces mots qu'il avait prononcés, il ne les avait jamais pensés, pas vraiment. C'était une arme, une façon de la blesser à l'époque. Mais jamais, pas une seule fois, il n'avait imaginé que cela laisserait une cicatrice aussi profonde en elle.

"Nyx, je... je ne pensais pas... à l'époque, je..." balbutia-t-il, mais elle l'interrompit.

"Arrête ! " coupa-t-elle, la voix froide, tranchante. Elle retira sa main de la sienne, se repliant sur elle-même.

Ce n'est pas la question. La question, c'est que tu avais raison. Tu m'as détruite. Pas seulement à l'époque, mais tout au long de cette route. Et maintenant..." Ses yeux brillants de larmes se fixèrent sur lui, et elle posa une main tremblante sur son ventre vide. "Il ne me reste plus rien."

La dévastation dans ses mots frappa Eryx de plein fouet. Il voulait la prendre dans ses bras, effacer cette douleur, mais il savait que rien de ce qu'il pourrait faire ne pourrait jamais réparer la destruction qu'il voyait dans ses yeux. Il tenta de prendre à nouveau sa main, mais elle la retira violemment, un geste brusque qui marquait la distance entre eux.

"Nyx... tu n'as rien perdu," murmura-t-il, la voix pleine de désespoir. "Nous avons encore nous. Tu m'as encore moi."

Mais ses paroles tombèrent dans le vide. Nyx tourna lentement la tête, ses yeux noirs de colère.

"Nous ?" répéta-t-elle, une froideur glaciaire dans la voix. "Tu crois que toi et moi, ça suffit à combler ce que j'ai perdu ? Regarde-moi, Eryx. Regarde ce qu'il reste de moi !" Elle montra son ventre, un sourire amer tordant ses lèvres. "Ça ne suffira jamais."

Eryx resta silencieux, anéanti, incapable de formuler la moindre réponse. Il sentait son monde s'effondrer, mais il ne savait pas comment la retenir, comment la sauver de ce gouffre dans lequel elle semblait sombrer.

Arès observait la scène, immobile dans l'ombre. Il voulait intervenir, il voulait dire quelque chose, mais il savait que c'était impossible. Il voyait la souffrance de sa sœur, mais il savait aussi que les pires vérités n'avaient pas encore été dites. Ce secret qu'il gardait depuis des jours, celui que même Eryx ignorait, était comme un poison qui le rongeait de l'intérieur.

Les médecins avaient été clairs : ils avaient dû retirer l'utérus de Nyx pour la sauver. Cette vérité le hantait chaque nuit, et il savait que si Nyx découvrait cela, il n'y aurait plus de retour possible. Elle serait détruite. Mais Arès savait aussi que ce mensonge, ce silence, n'allait pas tenir encore longtemps. Eryx le sentait. Les tensions grandissaient entre eux, et chaque jour où Arès gardait ce secret, il sentait la distance croître.

Les jours suivants, Nyx recommença à marcher. Elle avait besoin de retrouver des forces, de sortir de ce lit qui la retenait prisonnière. Chaque pas lui coûtait, mais elle refusait de se laisser abattre. Elle se battait, même si elle ne savait plus pourquoi. Ses jambes tremblaient, mais elle avançait, portée par une rage sourde. Elle ne resterait pas là, à attendre la mort. Elle avait encore à se battre.

Mais à chaque mouvement, elle sentait le vide en elle, comme si son corps lui-même lui rappelait ce qu'elle ne serait plus jamais. Eryx était là, à chaque instant, mais il ne comprenait pas. Comment pouvait-il comprendre ce que cela faisait de se sentir brisée de l'intérieur, de savoir que tout ce qu'elle avait perdu ne reviendrait jamais ?

Et plus les jours passaient, plus les regards entre Eryx et Arès devenaient lourds de sens. Ils lui cachaient quelque chose, elle le sentait. Les silences, les conversations à mi-voix, tout lui indiquait que quelque chose se tramait, et elle en était au centre.

Un soir, alors que Nyx était allongée, épuisée par la journée, elle entendit des voix s'élever dans le couloir. Elle se figea, tendant l'oreille. Eryx et Arès. Ils se disputaient.

"On ne peux pas lui cacher ça plus longtemps, Arès !" grogna Eryx, sa voix grondante résonnant dans le silence.

Arès resta silencieux, et Nyx, immobile dans son lit, sentit son cœur s'accélérer. Ils lui cachaient quelque chose, et elle le savait.

"Ce n'est pas le moment." répondit finalement Arès, la voix plus calme, mais tout aussi tendue.

Eryx explosa de colère.

"Pas le moment ?! Pas le moment ?! Tu crois que je ne la vois pas ? Que tu me prends pour un con ?"

Nyx sentit la rage monter en elle, un mélange de peur et de frustration. Elle n'était plus en mesure de rester dans l'ignorance. Ce secret, quel qu'il soit, la concernait directement, et elle devait savoir.


Ashes of RetributionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant