La tueuse & le Guérisseur, tome 1

Chapitre 1 - Valentina

La lumière faiblarde de la lampe de chevet éclaire à peine les murs de la chambre, là où les filles que La Muerta forme dorment et se préparent à leur destin. Elle a façonné chacune de nous, des armes parfaites pour leur empire. Et moi, je suis l'une de ses plus grandes réussites.

Assise sur le lit avec Flavia, je la regarde se préparer, méthodiquement, avec cette précision qui la rend si redoutable. Son dos est tourné, mais je peux deviner l'expression de son visage, son calme apparent dissimule toujours un feu intérieur. Son père, le Scorpion, a laissé son empreinte sur elle. Elle est à la fois la force brute et la froideur calculatrice, un mélange explosif.

— Tu penses qu'elle va t'envoyer où, cette fois ? demande-t-elle en jouant distraitement avec la lame de son Knif, son éternel compagnon.

Je lève les yeux, observant les cicatrices discrètes qui ornent mes avant-bras, souvenirs de combats passés. Ces marques sont autant d'histoires, de victoires, et de leçons apprises sous la tutelle de La Muerta. Mais cette fois, je sens que quelque chose est différent. Ce n'est pas juste une mission de plus. C'est autre chose.

— Elle ne m'a pas encore dit, mais ça ne va pas tarder, dis-je en me redressant, les bras croisés contre ma poitrine. Je sais que ça concerne les Costa, c'est tout.

Mon amie se tourne vers moi, ses yeux noirs, aussi intenses que ceux de son père, me fixent avec une lueur de curiosité. Le simple fait de mentionner les Costa capte immédiatement son attention.

— Les Costa ? Ça va être intéressant. Ils ont de l'influence... et du sang sur les mains, tout comme nous, murmure-t-elle en s'asseyant à mes côtés sur le lit.

Nous avons presque grandi ensemble, elle et moi. Depuis mon arrivée, nous avons été liées par bien plus que la loyauté à cette famille. Flavia, avec sa double lignée, celle de La Muerta, une mercenaire redoutée et Le Scorpion, un homme sans âme, représentent la puissance brute, l'héritière de deux forces indétrônables. Mais moi, je suis l'arme affinée, entraînée pour servir les Rorarez, pour tuer quand il le faut. Elle et moi, on ne se ressemble pas, mais on est pourtant semblable. Deux faces d'une même pièce.

— Tu te souviens de la première fois que ta mère m'a pris sous son aile ? Je demande, un sourire en coin.

— Oh que oui. Elle t'a vue combattre et elle a dit, « Cette gamine a du potentiel. Elle est à moi maintenant. » Et je n'avais plus de meilleure amie après ça, dit Flavia en riant légèrement, bien que je sache que ça l'a touchée, à l'époque.

Je me souviens encore du moment où La Muerta a fait de moi ce que je suis aujourd'hui. Elle m'a entraînée, m'a forgée. Mais c'est Flavia qui m'a aidée à ne pas me perdre complètement. Entre deux missions, entre deux opérations de sang et de douleur, elle était là, toujours, me rappelant que j'étais humaine, contrairement à elle.

— T'es encore avec moi, non ? Je réponds en lui lançant un regard complice.

— Toujours, Val. Toujours.

Cette amitié est la seule chose qui me garde ancrée dans cette vie. Mais parfois, je me demande jusqu'où elle tiendra. Nous vivons dans un monde où tout est question de pouvoir, de loyauté, et de trahison. Même notre relation pourrait un jour être mise à l'épreuve.

— Alors, t'es prête pour ce qui arrive ? reprend-elle après un long silence, ses yeux plantés dans les miens. Les Costa, c'est un autre niveau.

Je laisse échapper un soupir. Oui, je suis prête. Je dois l'être. Le plan est en place entre les propriétaires du manoir dont je ne devrais pas tarder à en connaître les détails, mais quelque chose me dit que je ne reviendrai pas indemne de cette mission.