La vapeur remplit la salle de bain, enveloppant l'espace dans une chaleur apaisante, mais mon esprit est loin d'être détendu. L'eau de la douche coule en continu, son bruit étouffant tout ce qui pourrait se passer à l'extérieur de la pièce. C'est mon seul moment de répit, ma seule couverture pour passer ce coup de fil sans risquer d'être entendue.
Je regarde mon téléphone, hésitant une seconde avant de composer le numéro de La Muerta. Il n'y a pas de retour en arrière une fois cet appel passé. Je lève les yeux vers le miroir embué, où mon propre reflet me renvoie l'image d'une femme qui se bat entre deux mondes.
— Allez, Valentina, murmuré-je à moi-même, ma main tremblant légèrement alors que je presse le bouton pour appeler.
Le téléphone sonne une fois... deux fois... puis enfin, elle décroche.
— Valeria, la voix froide et calculée de La Muerta traverse la ligne, presque imperceptible sous le bruit de l'eau. Tu es en retard pour ton rapport.
Je prends une profonde inspiration, fermant les yeux pour essayer de calmer la tension dans mon corps.
— Les choses deviennent compliquées ici, dis-je, ma voix basse et pressante. Marcus perd le contrôle, il tire sur ses propres hommes. Il est obsédé par la taupe, et Santiago commence à se méfier de moi.
Un silence s'installe de l'autre côté du téléphone, mais je sais que La Muerta réfléchit à grande vitesse, analysant chaque mot que je prononce.
— Et Alexander ? demande-t-elle enfin, sa voix tranchante comme une lame.
Je sens mon cœur se serrer. Alexander... Je me suis trop rapprochée de lui, je le sais. Je suis censée l'utiliser, mais quelque chose en moi s'accroche à cette idée que je peux tout contrôler, y compris ce que je ressens.
— Il est sous contrôle, mentis-je, sachant que La Muerta pourrait facilement déceler la moindre faille dans mon discours. Il commence à me faire confiance. Mais... il est de plus en plus difficile de cacher nos mouvements. Hector et Santiago sont sur mes traces.
Un autre silence, plus pesant cette fois. Je peux presque sentir La Muerta peser ses options, son calcul froid et impitoyable en marche.
— Si tu sens que tu vas échouer, dit-elle enfin, sa voix un murmure glaçant, tu sais ce que tu dois faire. Aucun échec ne sera toléré, Valentina. Pas après tout ce que nous avons fait pour toi.
Mon corps se tend sous la menace implicite. Je sais ce que cela signifie. Si je tombe, La Muerta et Le Scorpion ne se donneront pas la peine de me sauver. Ils me considéreront comme une perte acceptable. Un pion sacrifiable.
Je serre les dents, le téléphone toujours contre mon oreille.
— Je ne vais pas échouer, réponds-je avec fermeté, ma voix coupant l'air humide de la salle de bain. Je vais obtenir ce que nous voulons des frères. Mais je dois être plus prudente.
— Alors, sois-le, réplique La Muerta. N'oublie pas, tu fais partie de ma famille, mais la loyauté a un prix.
L'appel se termine brusquement, et je reste là, dans le bruit apaisant de l'eau, sentant le poids de cette conversation m'écraser. Je repose le téléphone sur le rebord du lavabo, me laissant glisser contre le mur, les gouttes de vapeur ruisselant sur les murs.
Leur confiance en moi est fragile. Ma mission, encore plus. Et Alexander... Alexander ne doit jamais savoir ce que je suis vraiment.
Je reste là, immobile, pendant ce qui me semble être une éternité. Le bruit de l'eau de la douche continue de remplir la pièce, mais il ne parvient plus à apaiser mes pensées. L'appel avec La Muerta a laissé un goût amer. L'échec n'est pas une option, et je sens le poids de cette responsabilité peser sur mes épaules.
Mais plus que tout, c'est ce que je ressens pour Alexander qui me déstabilise. Je ne devais pas. Pourtant, il est là, dans mes pensées, et je sens qu'il me tire dans une direction dangereuse. Une direction où je pourrais tout perdre.
Je serre les dents, puis attrape mon téléphone une nouvelle fois. Il y a une personne qui peut m'aider à me rappeler pourquoi je suis ici, qui je suis réellement. Je compose le numéro, mon cœur battant un peu trop vite. Ce n'est pas de la peur, c'est de la nécessité. J'ai besoin de l'entendre.
Le téléphone sonne une fois... puis deux. Finalement, sa voix familière et rassurante me parvient, même si elle est teintée d'une légère surprise.
— Valentina ? dit-elle doucement, comme si elle savait déjà que cet appel n'était pas comme les autres.
Je prends une profonde inspiration, essayant de cacher ce qui bouillonne en moi. Je ne peux pas lui dire ce que je ressens pour lui. C'est bien trop risqué, et je ne peux pas me permettre de me laisser distraire. Mais entendre la voix de ma meilleure est comme un ancrage. Elle me rappelle qui je suis et d'où je viens.
— Flavia, dis-je, ma voix plus fragile que je ne l'aurais voulu. Je voulais juste t'entendre. Les choses ici deviennent compliquées, et j'ai besoin de me rappeler que je ne dois pas me perdre.
Un silence s'installe de l'autre côté de la ligne, mais je sais qu'elle réfléchit. Flavia a toujours été celle qui sait lire entre les lignes, celle qui comprend même quand on ne dit rien.
— Tu ne te perdras pas, dit-elle enfin, sa voix ferme, mais empreinte de cette douceur qui lui est propre. Tu es plus forte que tout ce qu'ils peuvent te jeter au visage. Et tu n'es pas seule.
Je ferme les yeux, me laissant bercer par ses mots. Elle ne sait pas tout ce qui se passe, mais entendre sa voix me donne la force dont j'avais désespérément besoin.
— Je sais, murmuré-je en retour. Mais parfois, je me perds dans tout ça.
Elle reste silencieuse un instant, mais je sens qu'elle est là, présente, comme elle l'a toujours été, même à des kilomètres de distance.
— Tu ne te perdras jamais, parce que je ne te laisserai pas, dit-elle finalement, sa voix pleine de conviction. On est ensemble dans tout ça. Comme toujours. Comme depuis le début.
Je souris faiblement, un sourire que seule elle pourrait me provoquer dans un moment pareil. Notre amitié n'a jamais eu besoin de promesses verbales ou de grands gestes. Elle est ancrée en nous, dans chaque épreuve que nous avons traversée, dans chaque mission où nous avons dû compter l'une sur l'autre.
— Rappelle-toi cette nuit où tout semblait s'effondrer, dit-elle avec un léger rire dans la voix, faisant allusion à l'un de nos souvenirs partagés. Quand on pensait que c'était la fin, mais on a réussi à s'en sortir, ensemble.
Je me souviens. C'était lors d'une mission où tout avait mal tourné. Nous étions jeunes, inexpérimentées, et nous pensions vraiment que c'était la fin. Mais c'est ensemble que nous avions trouvé la force de nous en sortir. Cette nuit-là avait scellé notre lien d'une manière que personne d'autre ne pourrait comprendre.
— Je me souviens, dis-je, un sourire réel cette fois se dessinant sur mes lèvres. Et tu avais raison. On ne se laisse jamais tomber.
— Exactement. Et peu importe ce qui se passe là-bas, poursuit-elle, sa voix plus grave maintenant. Je suis avec toi, toujours. Je ne laisserai rien t'arriver, ils goutteront à mes lames avant même de t'atteindre.
Dans ces moments, je me rends compte que tant que Flavia est là, tant que nous avons cette amitié inébranlable, je ne me perds pas. Et rien, pas même cette mission ou ce que je ressens pour Alexander, ne pourra changer cela.
— Merci, soufflé-je doucement, sachant que, même sans tout lui dire, elle comprend l'importance de cet appel.
— Toujours, répond-elle simplement, et ces mots contiennent tout ce que nous n'avons pas besoin de dire.
Je raccroche, finalement, l'esprit plus clair. Cet appel, même bref, m'a ramenée à la réalité. Flavia m'a rappelé pourquoi je suis ici. Alexander ne doit pas me détourner de mon objectif. Peu importe ce que je ressens, je dois rester concentrée. Ma mission passe avant tout.
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La tueuse & le Guérisseur, tome 1
RomanceFormée par La Muerta, une femme impitoyable qui façonne les meilleures armes humaines au côté du Scorpion, Valentina a été préparée toute sa vie à être une tueuse parfaite. Sa nouvelle mission la mène au cœur de la famille Costa, où elle doit infilt...