Dans les bras d'un monstre

Chapitre 19

Le plus difficile dans cette traversée fut le vent glacial qui annonçait le début d'un hiver rude. Épuisée, Freya faillit fermer les yeux à plusieurs reprises et s'efforçait de résister au mieux à la fatigue. Quelques voitures l'avaient dépassées et à chaque fois elle avait été terrifiée que quelqu'un s'arrête et que sa vie soit à nouveau en danger.

Au bout de longues heures de trajet elle avait enfin réussi à rejoindre la ville la plus proche de Lancaster et avait volontairement laissé la carriole dans un coin isolé. 

Elle caressa le cheval qui lui aussi semblait épuisé par le trajet et traversa la route déserte pour atteindre le magasin ouvert. 

Ayant faim, elle fit quelques courses puis s'installa sur le banc à côté du magasin pour manger un sandwich. 

Et ensuite ? 

Cette question tournait en boucle dans sa tête, effaçant toutes les autres. 

Maintenant qu'elle avait pris la fuite, où était sa place ? Où devait-elle aller ? 

Devait-elle écouter Jacob et prendre un billet de train et choisir n'importe quelle destination ? 

Avec un soupir elle tourna la tête à gauche puis à droite et le fait d'être seule alors que l'aube commençait tout juste à se lever lui arracha un frisson glacé.

Le ventre noué, elle termina le sandwich et se leva du banc pour jeter l'emballage à la poubelle quand soudain l'une des cabines téléphoniques se mit à sonner.

Freya se retourna en les regardant toutes jusqu'à trouver celle qui sonnait. D'un pas hésitant elle retourna s'asseoir sur le banc.

Le téléphone cessa de sonner et le silence reprit son droit. Freya en profita pour reprendre le cours de ses pensées mais le téléphone sonna de nouveau.

Inévitablement son cœur se mit à s'accélérer. Au ralenti, elle tourna la tête en direction de la même cabine téléphonique et se leva en se mettant dans la tête qu'il s'agissait probablement d'une coïncidence. 

Tout en s'approchant elle chercha des yeux un passant dans les alentours qui pourrait être la personne qui attendait ce coup de fil seulement elle était seule. Il n'y avait personne sauf les responsables à l'intérieur du magasin.

D'une main tremblante, elle se saisit du combiné et l'approcha à son oreille. Pour commencer elle essaya d'écouter si elle entendait une respiration,  un son, n'importe quoi qui aurait pu la rassurer.

  - Allô, finit-elle par dire en tenant le combiné d'une main moite.

  - Où vas-tu comme ça Freya ? 

Son souffle se coupa et elle se retourna pour regarder partout où il était possible de regarder.

C'était lui, et le timbre de sa voix était si sombre que son visage s'engourdissait déjà.

  - Comment...comment savez-vous où je me trouve ? 

  - Je t'ai posé une question Freya.

  - Je pars loin ! Répondit-elle en serrant le combiné si fort qu'elle le sentit trembler contre son oreille. Maintenant répondez à la mienne. Comment avez-vous su que j'étais là ? 

Un silence glaçant lui répondit et dans lequel Freya s'entendit respirer de façon brusque et désordonnée.

  - Aurais-tu oublié ce que je t'ai dit avant de te ramener dans ton lit ?