Le jour où j'ai réalisé

Snapchat et inconnu

- Tu m'en veux? demandai-je d'une petite voix, glissant ma tête dans l'ouverture de la porte de Ambre. Elle a 18 ans, mais quand elle est triste, elle parait en avoir 15. Je culpabilise. Comme je ne sais que dire, je me contente de m'asseoir à ses côtés.

- Tu sais que je t'aime, hein? murmurai-je.

- Uhum, aquiesça-t-elle.

- T'es toujours triste?

- Nan.

- Alors ça t'embête si je te laisse et que je monte dans ma chambre?

Elle me regarde avec des yeux ronds, elle ne s'attendait pas à ce que je prenne la fuite aussi vite. Mais toujours est-il qu'elle ne trouve rien pour me retenir. Je monte donc dans ma chambre.

La diode de mon phone clignote, j'ai reçu un message. Oh, c'est une photo sur Snap. NOM DE DIEU! Sur mon écran, David, souriant, pose tel un mannequin de Playboy, sans un vêtement pour laisser quoi que ce soit à l'imagination. Je m'empresse de fermer ma porte, avant que quelqu'un ne s'aperçoive que je reçois des photos bien plus découvertes que la majorité des filles de mon âge. Il a vu que j'ai vu son Snap, il m'écrit quelque chose.

david3420leplusbeau:

Salut toi... 

gaellemoonlightprincess:

Salut... Mais dis-moi, tu es chaud aujourd'hui...

david3420leplusbeau:

Viens me rejoindre, je saurai te gâter comme une reine... Mais n'oublie pas que les services s'échangent...

gaellemoonlightprincess:

Alors comme ça tu as envie de moi haha :3 Mais écoute, donne-moi deux heures, et j'arrive... Tu tiendras jusque là?

david3420leplusbeau:  

Je ne sais pas... Que fais-tu?..

gaellemoonlightprincess:

Je me touche en pensant à toi, rien que d'imaginer ce que tu vas me faire, je mouille déjà... J'espère que tu seras à la hauteur je me déplace que pour avoir affaire à des kings...

Il est vraiment trop bête. Il faut être stupide pour penser qu'une fille va se mettre à se masturber juste pour vous. Je laisse un petit rire m'échapper et ferme l'application. Avant de lire la suite de ses messages qui s'annoncent cochons, je dois travailler. Si mes résultats ne restent pas excellents dans toutes les matières, ma mère se doutera forcément que le temps que je passe ailleurs qu'à la maison, je ne l'utilise pas pour travailler, comme je lui dis, à chaque fois que je pars voir un sex friend. Depuis quelques temps, je subtilise des termes venant de l'anglais pour les utiliser dans le langage de tous les jours. Je trouve par exemple que sexfriend est un mot beaucoup plus distingué que Plan Q. Bon, je suis peut-être totalement hypocrite, à ne pas vouloir assumer ce que je fais. Mais vu d'un angle différent, ça peut aussi se comprendre. La diode recommence à clignoter, je vais devoir mettre mon natel sous mode avion, si je veux pouvoir étudier. ... . L'allemand a toujours été une de mes faiblesses. Je ne comprends pas un des mots alignés sur cette feuille. J'ai beau lire et relire, plus je relis et moins ça a de sens. Je décide de laisser l'allemand de côté et de me focaliser sur les maths. Les chiffres, les algorythmes, les vecteurs sont compréhensibles eux, au moins. Le soleil se décale lentement dans le ciel et ce n'est que quand je reçois ses rayons dans les yeux que je comprends que j'ai loupé mon rendez-vous. Encore éblouie, ma vision parsemée de taches blanches, je prends mon téléphone et allume Snapchat. Je clique sur les messages non lus.

david3420leplusbeau:  

Ne t'inquiète pas, tu ne vas pas être déçue. Je vais te faire monter au septième ciel plus rapidement que jamais. Rien que de penser à toi, je suis déjà dur, tu es une sorcière, Gaëlle...

Tu as du retard... Je vais être obligé de te punir quand tu arriveras... mauvaise fille...

Putain tu fous quoi?! J'ai pas que ça à faire, que d'attendre une gamine gâtée!

gaellemoonlightprincess:

...

Sincèrement désolée, je peux passer maintenant, si tu veux...

david3420leplusbeau:  

Ouais c'est ça magne-toi...

gaellemoonlightprincess:

A toute alors...

Ce gars a cru que j'avais que ça à foutre? Non mais sérieusement! C'est bien la dernière fois qu'il me traite comme ça! Je prends un sac, j'y fourre une nuisette, un linge, du maquillage. Je me change, mettant soigneusement mes sous-vêtements les plus sexy. Je suis désormais enrobée de dentelle, laissant peu à l'imagination. Je choisis une robe moulante s'ouvrant devant, avec de gros boutons, un style très rétro que je porte à merveille. J'attache mes longs cheveux lissés avec un élastique et j'y glisse une sorte de bijou à pierres précieuses bleues pour relever mes yeux. Enfin, je sais délicatement mon parfum et, de deux légères pressions, je m'en vaporise dans la nuque et sur le poignet gauche. Maintenant, mon cher ami, à nous de jouer. J'enfilai mes escarpins de 15 centimètres, m'envoyai un baiser dans le miroir puis filai de chez moi, lançant un "Je mangerai chez un ami ne m'attendez pas" qui se perdit dans les pièces de la maison. Aucune réponse. Je pris ça pour un oui et marchai jusqu'à l'arrêt de bus, ligne 406. Il devait arriver d'une seconde à l'autre. En effet, le grondement habituel du moteur diesel se fit entendre et, quelques secondes plus tard, je vis le bus apparaître dans un des virages de la route qui me menerait vers David. Le bus s'arrêta, une vieille dame descendit. Elle me fit un sourire et ma salua comme si l'on se connaissait. Rien à foutre. Je montai et cherchai une place. Le bus était bondé, il ne restait qu'une place libre. Je m'assis donc, ne prêtant pas attention aux gens autour de moi. Une voix grave et masculine s'éleva à ma droite. Je tournai la tête et découvris que la personne à côté de laquelle je m'étais assise était en fait un jeune homme, ayant l'air d'avoir 18 ans, possédant de magnifiques fossettes et des yeux bleus à faire avouer les innocents.

- Salut! Voudrais-tu partager ta source de bonheur avec moi? Je t'observe depuis tout à l'heure et tu ne fais que sourire.

Nickel. Je déteste l'ironie quand ce n'est pas moi qui en fait et, apparemment, ce gars en est un adepte. Mais bon, j'avais encore 15 minutes à tuer.

- J'ai reçu un chèque de 2'000'000 de francs suisses d'un riche homme politique que je ne pourrai citer, ce qui me permet de rouler en limousine d'habitude, sauf que j'ai été victime d'une panne, et donc, je suis obligée de prendre le bus.

Il rit.

 - Je m'appelle Théo. Et toi, comment tu t'appelles?

- Emmanuelle.

Je ne sais pourquoi, je n'avais pas envie de lui dire mon prénom. J'étais sûre qu'il me lâcherait plus facilement s'il n'avait aucune vraie information à mon propos. Nous parlons du temps, de rien et de tout, de tout et de rien. Le bus freine, je dois descendre.

- Ciao Théo, à une prochaine peut-être!

Lorsque je descendis du bus, je l'entendis me dire:

- Ciao Gaëlle, passe un bel après-midi!

Merde. D'où est-ce qu'il connaît mon nom? Je n'en reviens pas. Mais je n'ai pas vraiment le temps d'y réfléchir, me voilà déjà devant l'immeuble où loge David. J'appuie sur le bouton de l'interphone. Il y a un clic, et la porte du bâtiment s'ouvre, me laissant entrer. C'est parti...