Chapitre 8 : Fuite!

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Je manque de souffle! Je n'arrive plus à respirer. J'aurais presque peine à survivre. J'ai mal! J'ai tellement mal. Dans ma main, dans ma poitrine, dans ma chair. J'ai mal. J'observe autour de moi, les yeux en terreur et j'attends! J'attends le second assaut qui m'achèvera.

-NONNNNNN! Crie Tomas en panique, courant dans ma direction et ce plaçant entre moi et des hommes armés cachés derrière leur bagnole, toujours en train de me menacer de leurs armes.

Je cherche Élizabeth du regard, confuse, en attente d'un appui. J'aperçois ses yeux inquiets et hésitants à la fois, toujours la main droite sur sa blessure. Je me retourne vers mon frère qui tient toujours tête à ces hommes vêtus d'uniformes bleus alors qu'ils lui demandent de s'écarter.

-Nous sommes la police. Cette jeune fille est dangereuse, déclarent-ils, poussez-vous, c'est un assassin.

-Non, répond Tomas, c'est ma sœur, laissez-la!

-Tomas, dis-je au bord des larmes, nerveuse.

Tomas me fait alors face et un visage triste et déboussolé se dessine sur un visage, qui, autrefois, me semblait trop confiant pour flancher. Je regarde mon ventre, là ou mon point git. Je pleur, je ne peux m'empêcher de pleurer, je ne peux m'arrêter de pleurer. Tout le monde observe la scène d'un silence de mort. Je détache le point de mon t-shirt, et regarde mon grand frère partager mes larmes. Puis, mes yeux dérivent et d'une lividité cadavérique, j'ouvre ma main pour y laisser tomber la balle avec laquelle un policier avait tenté de me tuer quelques minutes plus tôt.

Dans un réflexe rapide, tous les élèves autour de nous reculèrent et les policiers se mirent à hurler de plus belle, voulant me pousser à relâcher mon couteau et à me rendre. Je ne peux pas, je ne veux pas. Soit ils ont l'infime conviction de m'envoyer dans une maison pour les fous, soit un endroit où on enferme les gens qui tuent d'autres gens, ou ce sera un laboratoire dans lequel je serai disséqué pour être étudiée. Je sens alors les bras fort de Tomas s'enroulés autour de mes épaules pour me rassurer, comme pour me dire : «Ne t'en fais pas, tout ira bien».

-On vous dit de vous écarter!

Les policiers continuent de crier, mais je ne les écoute déjà plus. Et Tomas ne fait que les ignorer. Je ne me rappelle toujours pas de lui, mais ce souvenir précis de fratrie restera à jamais gravé dans ma tête. Je place mes mains autour de lui, et le serre très fort, comme si ma vie entière dépendait de ce moment.

C'est à cet instant que mon cœur se retourne contre moi pour laisser s'échapper un chagrin dévorant. Je dois partir! Je dois les quitter! Pas seulement pour moi, mais surtout pour eux. Je ne me sens pas capable de les laisser continuer à souffrir par ma faute. Cela fait à peine quelques jours que je suis de retour de l'hôpital et déjà je commence à perdre le contrôle de moi-même, je ne peux plus continuer de cette façon, je me dois de leur facilité l'existence. Ma grenouille me manquera, mais vu ce que je lui ai infligé, elle se portera sans doute mieux sans moi. Ces trois filles de tout à l'heure qui on été les premières à m'exprimer leur déception et mécontentement, seront plus heureuse si je disparais. Quant à Tomas, j'ignore s'il s'en remettra, mais honnêtement, je préfère ne pas m'auto-flageoler à y penser.

Je ne sais pas où j'irai, mais cela n'a guère d'importance. Le meilleur moyen, pour le moment, de protéger ma meilleure amie, mon grand frère ainsi que cette famille dont je ne sais toujours rien, est de m'éloigner le plus possible d'eux. La vitesse surhumaine vient de s'invitée dans ma liste de dons et je ne sais rien contrôler. J'ai blessé trop de gens pour me permettre le luxe de rester dans cet espace qui se devrait familier et un garçon est décédé à cause de moi. Je viens, de plus, d'apprendre la mort de mes parents et mon possible rôle dans cette tragédie. Je ne peux pas faire comme si rien ne s'était passé et je ne peux pas me permettre de me faire arrêter. Je dois partir, car dans les souvenirs qu'il me reste, ma mémoire seule sera ma prison.

C'est donc avec le cœur lourd et transcendé que je repousse Tomas violemment et l'envoie s'écraser sur le sol de béton près de la route, au pied des agents de police. Cet acte est sans doute d'une pure exagération, mais selon moi, la meilleure façon de disparaître de leur vie, et de ne pas être repéré en me faisant contacter, est de me mettre tous ceux que je semblais connaître à dos. S'ils sont en colère contre moi, peut-être auront-ils moins le cœur brisé. Peut-être me sentirais-je moins mal de les laisser sans le moindre souvenir d'eux. Bien sur, il sera plus difficile pour moi d'abandonner Elizabeth, étant donné se retour brutal de ma mémoire à son sujet.

L'un des policiers se prépare à me tirer la balle fatale, mais le son du canon devient plus grave et la douille semble ralentir sa course lorsque je me mets soudainement à courir. J'entends alors le son lointain d'une voix qui cri mon nom, mais déjà, je suis loin.

Je cours alors! Je cours encore! Je cours toujours! Mes jambes ne semblent pas vouloir s'arrêter. Je cours pour ma vie! Je cours pour ma famille et mes amis que je ne connais pas encore entièrement. Je cours pour les protéger. Pour me protéger! Je cours peut-être pour oublier que je suis un monstre à garder en cage. Pour oublier que j'ai tout oublié. Que j'ai perdu le contrôle de ma vie, de mes réflexes, de mes pensées. De moi-même!

***

Je cours depuis quelques secondes déjà, comme jamais je ne l'ai fait, mais je ralenti, car je commence à faiblir. Je finis pas freiner ma course et me rends compte que je ne suis plus du tout en ville, mais au fond d'une profonde forêt dans laquelle je me suis engouffré sans porter attention à où j'allais. J'aperçois, par chance, une petite cabane de bois rond camouflée dans un épais amas de branchages et de plantes.

Je décide alors de m'y approcher et jette un œil par une fenêtre dégagé. Essayant de faire le moins de bruit possible, je repousse d'un doigt une petite branche qui m'obstruait la vue et vois que, à l'intérieur, il y a un garçon. Cheveux noirs, légèrement frisés et longs, baraqué et environ de mon âge, il tient un long fusil et fixe l'extérieur par une autre fenêtre devant lui. Malencontreusement, je me déplace pour mieux voir, mais mon pied heurte une branche qui se case.

Brusquement, lorsque je relève le regard vers la fenêtre, il pointe son arme sur ma tête et ses yeux me transpercent.


Des souvenirs meurtriersOù les histoires vivent. Découvrez maintenant