J'ouvre les yeux, une larme tombe, je suis transpirant, je viens de faire une longue sieste. Mon lit est trempé de sueur. Je me lève, dévale les escaliers et fonce directement dans le jardin. Rien. Pas de voiture, pas de sang. Ma sœur est sagement assise dans le canapé en train de lire. Je cours l'embrasser rempli par un regain d'amour.
- Merci tu es là, tu es vivante. Dis-je soulagé.
- Bien-sûr que je suis vivante Dan ! Qu'est-ce qui t'arrive ! Je n'ai pas bougé comme tu m'as dit. Tu as vu, je respecte tes consignes à la lettre ! Me répond t-elle fièrement, ne sachant pas l'horrible cauchemar que je venais de faire. - Et pourquoi tu es trempé là ? Tu dormais ou tu es partir courir ?
- Ce n'est rien ne t'en fais pas.
Je croise ma mère dans le couloir, le sourire jusqu'aux oreilles. Le contraste entre mon rêve et ce que je vois me semble irréel. Je suis si heureux que tout ça ne soit pas arrivé.
Je vais dehors, dans la cour. Je me mets exactement à l'endroit où s'est passé l'accident dans mon cauchemar. Je fais le tour, les scènes horribles refont surface. Je ne comprends pas pourquoi j'ai fait ce cauchemar. Ou si, j'ai peut-être une idée. Mathis est mort le lendemain de son anniversaire, donc pour moi Mia pouvait mourir aujourd'hui si je suivais ma logique depuis le début. Je pense que c'est pour ça. La preuve que tout ça me travaille.
Madame Nida et Estelle arrivent, dans leur Audi A1 noire. Elles ont le visage pâle, les yeux cernés.
- Plus jamais d'enterrements, je veux que ce soit le dernier. Plus jamais ... Marmonne Estelle en rentrant dans la maison.
Madame Nida semble absente, ce qui est normal. Comment ne pas l'être après un tel moment.
J'attends qu'Estelle soit un peu disposé à m'écouter et je décide de lui raconter mon cauchemar, il fallait que j'en parle à quelqu'un.
A la fin de mon récit, elle m'embrasse en me réconfortant que tout ça ne pouvait pas arriver, que ma sœur était ici et qu'elle ne sortirait pas de la maison. Je suis vite rassuré. Elle rejoint ensuite sa mère dans la cuisine pour lui remonter le moral. J'ai vécu la perte d'un proche seulement dans mon subconscient et j'éprouvai une peine immense, alors je n'ose même pas imaginer ce que ça pourrait donner si cela m'arrivait vraiment.
Je vais aussi dans la cuisine et pour se soulager, madame Nida nous raconte comment s'est déroulé l'enterrement. Assise sur le tabouret, les coudes sur la table, elle est tremblante. Ma mère lui sert un verre d'eau et moi je m'assois en face d'elle, prêt à écouter son récit.
- Il y avait une vingtaine de personnes. Sa famille et ses amis proches. Lors de la cérémonie, j'étais assise en face de son cercueil. Il y avait beaucoup de fleurs, de mots d'amour et d'amitié, de photos dessus... Je me suis rendu compte qu'il était aimé par tous. Toute ma vie, tous nos souvenirs sont apparus dans mon esprit comme un film. Je revoyais tous nos meilleurs moments mais aussi les pires. J'ai revu notre rencontre à la fac, notre mariage à Paris, les naissances de Mathis et Estelle, les voyages en Espagne, aux Maldives, à New-York... Tout ce qui faisait de nous un couple solide. Puis j'ai revu le décès de mon fils, le sien... En plus la musique qui accompagnait la cérémonie était notre musique de mariage... Hallelujah de Léonard Cohen. C'était terrible.
Elle prend le temps de se moucher et reprend.
- Nous avons ensuite pris la voiture pour aller au cimetière. Quand nous marchions entre toutes ces tombes, j'ai ressenti un sentiment de tristesse inouï. Nous sommes arrivés sur la sienne... Quand ils ont déposés son cercueil dans ce trou qui allait être rebouché quelques minutes après, j'ai compris que je ne le reverrai plus. Me dire qu'il gît là-bas, que je ne l'entendrais plus rire, que je ne l'entendrais plus me susurrer « je t'aime », que je ne sentirais plus ses bars autour de moi avant de dormir...
Elle se prend la tête à deux mains, submergée par l'émotion.
Estelle la prend immédiatement dans ses bras.
- Estelle est restée très forte pour moi, et heureusement...
J'avais l'impression d'y être, je n'avais jamais assisté à un enterrement et c'est bien la dernière chose à laquelle j'aimerai aller.
Mon père descend de la chambre de bonne humeur, a contrario de l'ambiance qui règne dans la cuisine et s'assoit dans le canapé. Il prend la télécommande et regarde son programme habituel. Il n'est pas allé travailler aujourd'hui pour moi, sur ma demande. Une fois posé, il demande à ma sœur sans que je puisse entendre :
- Il y a du courrier aujourd'hui ? J'attends une réponse du maire pour la construction de la piscine du jardin.
- Je ne sais pas du tout papa. Dit-elle avec une voix douce. - Tu veux que j'aille voir ?
- S'il-te-plaît oui ! Je te remercie. Répond mon père.
Elle se lève, sort et ferme la porte. J'entends le claquement et dans la seconde je demande qui vient de sortir. Mon père me dit que Mia va chercher le courrier. Immédiatement je pense à mon cauchemar et m'empresse de sortir sous les regards confus de mes parents.
- Non Mia ! Rentre ! Tout de suite ! Criai-je.
- C'est bon Dan je prends juste le courrier ! Me lance t-elle insouciante se rendant à la boîte au lettre qui est à une vingtaine de mètres de l'entrée de la maison.
Sans même avoir le temps de répondre j'entends le bruit d'un crissement de pneu très violent avant qu'un vacarme monstrueux se produise. Caché par les arbres je ne vois pas si Mia est là, mais une fois que je vois la voiture je comprends ... Mon père déboule en courant en demandant où se trouve ma sœur. Ma mère crie, les voisins pleurent, Estelle et madame Nida sont sous le choc. Je vois une main dépasser puis un bras... Je revis la scène pour de vrai. Pitié, tout sauf ça...
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Demain est un autre jour
RomansaDan Welling a 17 ans. Il y a trois ans, il est tombé malade. Son cas est unique au monde, il souffre de la maladie de Cor. Son cœur s'arrête de battre chaque nuit à trois heures du matin ; précisément ; durant quelques secondes. Seulement chaque jo...