Je provenais d'un endroit où tout était triste. Nous n'avions quasiment pas de printemps et presque jamais d'automne. Les feuilles tombaient des arbres même avant d'avoir changé de couleur. Si l'idée vous étiez venus à l'esprit de chercher la splendeur dans la petite ville de Langton, autant vous réfugier dans votre petite et ancienne maison pour laisser libre recours à votre imagination. Moi, ce qui avait envahi mes pensées tout au long de mon année de troisième fut le lycée de Fairview. Je décidais de ne pas aller dans celui de Langton. Je l'avais visité lors de la journée portes ouvertes au début du printemps alors qu'il faisait encore froid. Le sordide établissement de Langton n'était pas mon rêve. J'avais beaucoup travaillé pour être prise à celui de Fairview et cela avait payé. Après un entretien, je sus que j'étais acceptée et, à ce moment-là, je pensai aux autres que je connaissais qui n'avaient pas été admis et qui restaient à Langton. J'étais déçue pour eux et heureuse pour moi, c'était ce qui comptait davantage.
Assise à côté de papa qui conduisait dans les rues ensoleillées de Fairview, je me retenais pour ne pas m'approcher trop près de la vitre. Les boutiques étaient impressionnantes, il y avait des milliers de couleurs dans les vitrines. Énormément de gens se promenaient, certainement parce qu'ils partaient travailler à pied. Les rues étaient décorées de plantes, de fleurs de toutes les couleurs et elles étaient propres. J'étais heureuse d'enfin être ailleurs qu'à Langton.
Mon père entra dans le parking du lycée quelques instants plus tard. De là, j'aperçus inscrits à l'entrée de l'établissement « collège et lycée général, technologique et professionnel de Fairview ». Papa choisit le premier emplacement vide pour se garer. D'ici, je vis plusieurs filles entrées dans le bâtiment, me demandant si nous ferions connaissance. À vrai dire, je n'avais jamais eu vraiment beaucoup d'amies, j'étais timide. J'étais sortie avec un ami de mon frère pendant l'été. Il était en première au lycée de Langton et j'avais rompu avec lui pour venir à celui de Fairview. Cela étonnait mes anciennes camarades, mais un rien les surprenait. J'espérai que ce serait différent ici.
De l'endroit où était garé mon père, nous pouvions apercevoir le stade et le terrain de tennis. Nous distinguions également l'internat, disposé en arc de cercle à côté du stade. Des parents embrassaient leurs enfants avant de les laisser. Deux professeurs au visage sévère discutaient, postés près de la fontaine. Un peu plus loin, des filles bavardaient et comparaient leurs emplois du temps tout en ricanant. Elles devaient sûrement déjà se connaître. D'autres entraient dans le lycée, certains avec des valises.
— Voilà, on y est ! Tu n'es pas trop stressée ? Tu es prête ? me dit papa.
Un silence s'installa quelques secondes.
— Je ne suis pas obligée de rester si tu ne veux pas, répondis-je enfin.
Mon père me regarda en souriant.
— Tu me crois capable de faire ça Jessie ? Tu as choisi de faire tes études ici.
— Oui, je sais.
— Bon, tu devrais y aller, je t'aime, me dit-il en me faisant un bisou.
Mais cela je le savais déjà. J'avais envie de travailler dans ce lycée alors me payer cet établissement était déjà une preuve d'amour.
— Moi aussi, je t'aime, lui dis-je avant de sortir de la voiture.
Mon père ouvrit le coffre du véhicule, récupéra ma valise et me serra contre lui. Je scrutai ses yeux, du même bleu que les miens, et je compris qu'il ne doutait pas un instant de mes compétences à réussir dans cette école. Il devait douter de se débrouiller seul avec ma maman à la maison.
Mon grand frère, Corentin, avait fait ses valises et était parti pour l'Université d'Easton depuis une semaine déjà. Désormais, il ne restait plus que mon père et ma mère dans notre petit logement. Je sus que mon père allait parfois être seul quand ma mère, qui était infirmière, travaillait le soir ou le week-end. Mais je n'avais pas le choix si je voulais étudier ici. Cela me déprimait de ne les savoir plus que tous les deux. C'était pour cela que ma mère n'avait pas pu m'accompagner avec mon père jusqu'au lycée. Je pensai qu'elle aurait voulu venir, qu'elle aurait souhaité voir l'établissement et qu'elle aurait aimé me dire au revoir sur le parking avant de me laisser. Moi aussi j'aurais énormément voulu qu'elle soit là, mais elle n'avait pas pu se libérer.

VOUS LISEZ
Jessie Brooks : la vie d'une lycéenne
Teen FictionJe m'appelle Jessie Brooks et j'avais 16 ans lors de ces mésaventures. Alors que j'effectuais ma rentrée de seconde dans le lycée de Fairview, je fis une rencontre qui avait complètement changé le cours de ma vie. Celle de Thomas Carver. Tout était...