Jessie Brooks : la vie d'une lycéenne

Chapitre 8.

Ce soir-là, je téléphonais à ma mère pendant qu'Anna se promenait avec des filles de notre étage.

— Tu manges bien ? me demanda-t-elle.

— Ouais, c'est bon.

Ce n'était qu'un petit mensonge, la nourriture n'était pas excellente, mais quand même meilleure qu'au collège de Langton. Je m'assis sur le rebord de notre fenêtre pour avoir davantage de réseaux.

— Tu me manques, me dit ma mère.

— Tu me manques aussi, lui répondis-je.

À ce moment-là, je la vis en pensée, elle était dans la cuisine à préparer à manger. Cette vision me déprima.

— Il faut que je te laisse, ton père veut dîner.

À présent je l'imaginais aussi, assis en face d'elle à la table de la cuisine.

— D'accord, lui répondis-je, passe le bonjour à papa.

— D'accord, il te dit bonjour aussi.

— Oui, bonne soirée.

— Je t'aime, me dit-elle.

— Moi aussi, lui dis-je avant de raccrocher mon vieux portable.

C'était fou comme un coup de téléphone me projetait à chaque fois là-bas. Quelqu'un entra dans la chambre et je sursautai. J'aperçus Anna, qui venait d'arriver.

— Thomas m'a donné ça pour toi, me dit-elle en me jetant un carnet sur mon lit.

— C'est quoi ? lui demandai-je en me dirigeant vers mon couchage, mon téléphone toujours dans la main.

— Regarde toi-même.

Je posai mon portable sur le lit, m'assis et récupérai le carnet. En l'ouvrant, j'aperçus des croquis, c'était en fait des portraits. Le premier était celui d'une fille qui tenait un livre contre sa poitrine. Quelques secondes plus tard, je compris qu'il s'agissait de moi. Je feuilletai le carnet et je me rendis compte qu'il ne s'agissait que de portraits de moi. Tous les dessins étaient réalisés avec précision. Aucun trait ne dépassait et aucune trace de gomme n'était présente. Ils étaient parfaits. Sur la dernière page était inscrit « Pour toi Jessie ». J'étais surprise. D'abord, je ne savais pas qu'il dessinait et je ne comprenais pas pourquoi il m'avait choisie pour ces portraits. Ce qui était également suspect, c'était le comportement d'Anna. Normalement elle se serait déjà jetée sur moi pour savoir ce que le carnet contenait.

— Tu l'as ouvert ? lui demandai-je.

— Tu ne m'en veux pas ? me répondit-elle d'un air innocent.

Je ne dis pas un mot et continuais de regarder les croquis. Quelques instants plus tard, je reçus un message de Thomas m'indiquant de le rejoindre dans cinq minutes derrière son dortoir. Je me demandai pourquoi il souhaitait me voir, mais j'avais envie d'y aller. Je n'hésitai pas, me levai et enfilai ma veste.

— Je vais devoir te laisser... M. Warner voulait me voir ce soir pour m'aider à rattraper le niveau, mentis-je.

— Tu n'as pas plutôt un rencart ? me demanda-t-elle en rigolant.

— Non, bien sûr que non !

Je sortis alors de la chambre en essayant de ne pas faire de bruit. Mais en dépit de mes efforts, je me sentais bruyante. Je renonçais à prendre l'ascenseur qui faisait un bruit énorme de peur de me faire surprendre, sachant que nous n'étions pas autorisés à quitter l'internat. Je descendis les quatre étages à pied, craignant, arrivée à un étage, de me faire démasquer. Mais rien n'arriva et je réussis à me faufiler à l'extérieur. Stressée d'apercevoir le concierge, je continuais de marcher discrètement tout en surveillant les alentours. Une quinzaine de secondes plus tard, j'atteignis l'arrière de son bâtiment. Thomas me demanda juste de le suivre et de ne pas poser de questions. Il me fit entrer dans son dortoir, traverser la salle commune et emprunter le couloir qui mène à sa chambre. Il ouvrit la porte et me proposa d'entrer. Depuis l'entrée de la chambre, je vis une pièce dans un désordre. Du matériel de peinture était éparpillé un peu partout.