Chapitre 24.

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Mieux valait être le plus discret possible, le plus silencieux possible si une personne voulait jouer les voyeurs. Que se passerait-il si quelqu'un vous prenait la main dans le sac ? Quelles seraient les conséquences de vos actes ?

Ce lundi, j'aperçus le journal du lycée dans le hall du bâtiment dont Erwan, un élève de première, en était le rédacteur en chef. Il rédigeait des articles et prenait des photos sur la vie de l'établissement, les activités ou encore les matchs de baskets pour informer et divertir tous les étudiants ainsi que les adultes du lycée. Il avait l'autorisation de faire publier un journal par mois et cela lui prenait beaucoup de son temps libre, d'après ce qui était raconté.

J'attrapai le premier de la pile avant de lire le titre de l'article en première page « Jessie Brooks, élève de seconde, seule suspecte concernant le vol du dossier élève et le piratage du réseau informatique ».

Je fus stupéfaite, mais je comprenais qu'il écrive un article à ce sujet. Cela faisait partie de l'actualité du lycée. Une photo de moi complétait le texte. Une photo de moi que je n'avais jamais vu. Une photo qui permettrait aux élèves qui ne me connaissaient pas de mettre enfin un visage sur le nom dont tout le monde parlait. Les rumeurs, puis maintenant un article dans le journal de l'établissement scolaire. Ma réputation était faite depuis un petit moment déjà, mais cet article allait la renforcer.

Pas la peine de perdre mon temps pour essayer d'expliquer aux autres étudiants que je n'étais pas coupable, ils ne me croyaient pas. Les élèves préféraient écouter les bruits qui couraient dans les couloirs plutôt que d'entendre ce qu'avait à dire la suspecte. La seule suspecte dans une affaire qui n'avait ni queue ni tête. La découverte de cette photo m'avait ahuri au plus haut point.

Je pris le temps pour lire le premier paragraphe de l'article. Les premières lignes suffisaient à comprendre qu'il me prenait pour une voleuse, une fille malhonnête et une menteuse.

Comment est-ce que les professeurs, l'administration, la CPE ou même le proviseur pouvaient laisser passer ça ? Pourquoi autorisaient-ils la diffusion de ce genre d'article alors que les étudiants et Erwan lui-même n'avaient aucune idée ne précise de l'affaire ? Le lieutenant m'avait pourtant dit qu'il ne pouvait pas divulguer d'informations tant que l'enquête n'était pas terminée donc pourquoi un élève pouvait publier un article avec du contenu dont il ignorait tout ?

Contrariée et exaspérée, je froissai le journal en boule que je jetai dans la première poubelle que j'aperçus, tel un panier de basketball. Tout le long du couloir, jusqu'à ce que je sois arrivée devant la porte de notre salle de classe, les regards étaient fixés vers moi. Même certains élèves de ma classe me dévisageaient. J'essayais le plus possible de prendre sur moi, mais au moins je savais pourquoi tous les étudiants me jetaient des regards noirs. Je tentais de me contrôler et de contenir mes nerfs en entendant les remarques et les critiques dans mon dos.

À la pause de dix heures, alors que j'étais installée sur un banc avec Thomas dans l'entrée du lycée, Andrea s'approcha vers nous.

— Qu'est-ce que c'est que ça ? me demanda-t-elle.

Elle tenait un exemplaire du journal à la main et me montrait du doigt la photo qui accompagnait l'article.

— Je n'en ai aucune idée, lui répondis-je.

— Elle vient d'où cette photo ? C'est toi qui lui as donné ?

— Non, lui dis-je avec un signe de tête.

Thomas me regarda avec étonnement. Il ne m'avait pas parlé du journal, ni de l'article et encore moins de la photo, mais cela m'aurait étonné qu'il ne l'ait pas vu. Comme tous les mois, il était à la disposition des étudiants et du personnel dans tout l'établissement scolaire. Il était même en libre-service le midi, sur une table du réfectoire.

Jessie Brooks : la vie d'une lycéenneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant